Nous vous avons concocté un document avec toutes les recos sur la prévention et la prise en charge des pathologies de l’enfant voyageur (maladies à transmission vectorielle, diarrhée, mais aussi pathologies plus « courantes ») avec des fiches pratiques, des ordonnances types à télécharger et des algorithmes décisionnels. Indispensable pour la pratique !

L’enfant est exposé à des pathologies spécifiques des régions visitées. Cependant, il contracte souvent une maladie banale mais qui, survenant dans un contexte inhabituel en matière d’accès aux soins, est plus complexe à gérer. L’objectif est d’évaluer les risques de morbidité et fournir aux parents les moyens de les réduire. En cas d’affection chronique (allergie nécessitant un traitement préventif ou d’urgence [Anapen], dermatite atopique, asthme, insuffisance respiratoire, cardiaque ou rénale, drépanocytose…) et pour les nouveau-nés, une consultation spécialisée est nécessaire 3 mois avant le départ.

Pour donner des conseils adaptés, il faut connaître l’épidémiologie des principales maladies infectieuses dans les régions visitées. Un voyage dans un environnement extrême (haute altitude, désert) devrait faire l’objet d’une préparation avec l’aide de spécialistes.

Pathologies « courantes » du voyage

Sur la protection contre le soleil et la chaleur, les accidents de baignade et les infections transmises par l’eau, des fiches d’information et de prévention mises à disposition par le GPTrop (groupe de pédiatrie tropicale) peuvent être remises aux parents :

  • Affiche sur les recos relatives à la photoprotection
  • Affiche sur les précautions pour les bains et la boue
  • Trousse à pharmacie enfant voyageur
  • Fiche conseils parents – enfant drépanocytaire
  • Fiche conseils parents – envenimations
  • Fiche conseils parents – expatriation & voyage itinérant
  • Fiche conseils parents – mesures d’hygiène et prévention enfant voyageur

Vaccinations

Un voyage est l’occasion de mettre à jour le calendrier des vaccinations « universelles » et de proposer celles spécifiques à la prévention des risques infectieux locaux. Deux peuvent être obligatoires et exigées au contrôle sanitaire de certaines frontières : la fièvre jaune et le méningocoque tétravalent.

La liste des pays à risque pour les différentes maladies à prévention vaccinale est disponible dans les recommandations voyageurs 2023 (HCSP).

Vous trouverez les modalités pratiques sur les vaccins du voyage chez l’enfant ici : vaccination de l’enfant voyageur (GPTrop).

Paludisme

La protection – nécessité vitale dans les régions intertropicales où sévit P. falciparum – repose sur 4 mesures complémentaires :

  • sensibilisation au risque ;
  • protection personnelle antivectorielle (encadré 1) et chimioprophylaxie en fonction du risque (encadré 2 ; NB : nourrissons et enfants < 6 ans sont toujours considérés à risque) ; cf. tableau 1 pour les schémas prophylactiques ;
  • vigilance vis-à-vis de la fièvre, après le retour de zone d’endémie et même après une prophylaxie adaptée et bien suivie.

Autres maladies à transmission vectorielle

Dans certaines régions, d’autres infections transmises par des arthropodes durant la journée (dengue, Zika, chikungunya, trypanosomiases, borrélioses, rickettsioses…) ou la nuit (virus du Nil de l’Ouest, encéphalite japonaise, leishmaniose, filariose lymphatique…) imposent une protection personnelle antivectorielle 24 h/24 (encadré 1). Les seules prévenues par la vaccination sont la fièvre jaune et les encéphalites à tique et japonaise.

Diarrhée

Pathologie la plus fréquente, elle est rarement grave mais peut se prolonger, se compliquer et perturber le séjour. La prévention repose sur l’allaitement au sein des nourrissons, la consommation d’eau en bouteille capsulée ou d’eau bouillie 1 minute ou microfiltrée et désinfectée chimiquement par un hypochlorite (Micropur forte ou Aquatabs).

Le traitement comporte une réhydratation orale (à l’aide de solutés) et des mesures diététiques (à expliquer aux parents, comme les signes de déshydratation et de gravité). Si aucun médecin n’est disponible dans les 48 h, uneantibiothérapie probabiliste peut être prescrite pour être initiée par les parents (azithromycine en 1re intention, cf. tableau 2). Le lopéramide est contre-indiqué avant 2 ans.

Au retour du voyage, la diarrhée est souvent sans gravité et d’évolution favorable en quelques jours. Plus rarement, d’autres tableaux nécessitent des explorations et/ou une antibiothérapie : diarrhée liquidienne grave ou persistante au-delà d’une semaine, diarrhée sanglante +/- fièvre, ou bien aqueuse, afécale (algorithmes listés ci-après). Pour plus d’informations (examens complémentaires et choix d’antibiothérapie en fonction des agents infectieux) : fiche conseils médecin – antibiothérapie de la diarrhée de retour (GPTrop).

Prescriptions types et algorithmes décisionnels

Ordonnances téléchargeables et adaptables en fonction de chaque enfant sur le site GPTROP

  • Ordonnance type de l’enfant voyageur
  • Ordonnance type de protection antimoustique
  • Ordonnance prévention paludisme AQPG
  • Ordonnance prévention paludisme Doxy
  • Ordonnance prévention paludisme MQ
  • Ordonnance traitement de réserve AMLF
  • Ordonnance  traitement de réserve ANPQ

Attention : le traitement de réserve contre le paludisme n’est pas recommandé chez l’enfant, qui en cas de fièvre devra consulter impérativement un médecin sur place dans un délai maximal de 12 heures. Toutefois, en cas de voyage complexe ou d’expatriation, la prescription d’un traitement curatif d’avance, à prendre après confirmation biologique du paludisme, permet d’éviter le risque d’acheter sur place un médicament contrefait. Les contre-indications doivent être vérifiées et les modalités de prise précisées avant le départ.

Algorithmes décisionnels diagnostiques et thérapeutiques

Encadre

1. Protection personnelle antivectorielle (PPAV)

La PPAV est la base de la prévention du paludisme. Elle concerne toutes les zones d’endémie et doit être mise en place dès la tombée du jour jusqu’à l’aube, période d’activité de l’anophèle.

Porter des habits longs, couvrants (pantalon et manches longues). L’imprégnation des vêtements et tissus par des insecticides n’est plus recommandée en raison d’un rapport bénéfices-risques défavorable.

Appliquer des répulsifs sur la peau non couverte :

  • contre-indiqués avant l’âge de 6 mois ;
  • appliquer au maximum :
    • 1 fois par jour entre 6 mois et l’âge de la marche ;
    • 2 fois par jour de l’âge de la marche à 12 ans ;
    • 3 fois par jour après 12 ans ;
  • ne pas appliquer sur les mains et le visage ;
  • chez l’enfant < 12 ans, le produit doit être appliqué par un adulte ;
  • produit et concentrations selon l’âge :
    • 6 mois à 1 an : IR3535 10-20 % ;
    • 1 an à 2 ans : IR3535 10-20 % ou DEET 10 % ;
    • 2 ans à 3 ans : IR3535 25-35 % ou DEET 30-50 % ou icaridine (= picaridine ou KBR3023) 10-25 % ;
    • > 3 ans : IR3535 25-35 % ou DEET 30-50 % ou icaridine (= picaridine ou KBR3023) 10-25 % ou huile d’Eucalyptus citriodora 10-30 %

Ne sont pas recommandés : bracelets anti-insectes, huiles essentielles, vitamine B1, appareils à ultrasons, rubans et papiers autocollants gluants sans insecticide, homéopathie...

Dormir sous une moustiquaire imprégnée d’insecticide, après avoir lavé l’enfant avec de l’eau et du savon pour enlever les traces de répulsif.

Les mesures domiciliaires sont des mesures d’appoint (ne remplacent pas la PPAV) : climatisation, ventilation, diffuseurs électriques, serpentins fumigènes. Attention : placer un nourrisson à plus de 1 mètre d’un diffuseur électrique ; utiliser les serpentins fumigènes uniquement en extérieur. Pour une expatriation, les moustiquaires de fenêtre sont indispensables et les mesures péridomiciliaires (lutte contre les gîtes larvaires) ont toute leur place.

Encadre

2. Quand prescrire une chimioprophylaxie antipaludique (CPAP) ?

L’évaluation individuelle du risque de paludisme et de la pertinence d’une CPAP repose sur une analyse détaillée des caractéristiques du voyage (zones visitées, conditions d’habitat, type d’activités, durée et saison du séjour, etc.) et du profil du voyageur (âge, comorbidités, interactions médicamenteuses…).

En pratique, les séjours sont classés en deux profils :

  • « conventionnel » : courte durée (< 1 mois), majoritairement en zone urbaine ou sur des sites touristiques classiques ;
  • « non conventionnel » (routards, militaires, séjour improvisé, VFR, humanitaire, chercheurs…) : durée > 1 mois, nombre élevé de nuitées en zone rurale, hébergements précaires, périple pendant la saison des pluies ou dans une région de forte transmission palustre.

Dans tous les cas, le praticien doit identifier, à partir des caractéristiques du voyage, un niveau de risque et le confronter au profil du voyageur, au risque d’effets indésirables graves des antipaludiques et au choix du patient :

  • en cas de risque élevé de transmission (ex : Afrique subsaharienne, Papouasie… [v. liste exhaustive de la situation de transmission du paludisme selon les pays, p. 130-152 des recommandations voyageurs]), la CPAP est toujours nécessaire ;
  • si le risque d’effets secondaires graves est plus important que le risque de transmission du paludisme (dans la plupart des régions touristiques d’Asie et d’Amérique du Sud) en cas de séjours conventionnels, il est légitime de ne pas prescrire de CPAP ;
  • certains voyageurs doivent toujours être considérés à risque de paludisme grave : nourrissons et enfants de moins de 6 ans, femmes enceintes, personnes âgées, personnes infectées par le VIH, sujets aspléniques ;
  • dans les situations complexes, se référer aux centres de conseils aux voyageurs et de vaccination internationaux.
Pour en savoir plus
Groupe de pédiatrie tropicale. Enfant voyageur. Recommandations. Mars 2022.
Nahon F, Piccoli S, Sorge F. Consultation de l’enfant voyageur.  Rev Prat Med Gen 2017;31(984):498-9.
Martin Agudelo L. Recommandations voyageurs : quelles nouveautés en 2023 ?  Rev Prat (en ligne) 30 juin 2023.

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