Réaliser un examen complet du nouveau-né à terme

L’examen clinique du nouveau-né à terme a un rôle essentiel : il permet de vérifier la bonne adaptation à la vie extra-utérine, d’anticiper des situations à risque, de dépister d’éventuelles malformations, de vérifier les capacités neurosensorielles du nouveau-né et de promouvoir précocement les liens entre les parents et leur enfant. Il est réalisé de manière systématique par la sage-femme dans les 2 heures qui suivent la naissance, et est renouvelé pendant le séjour en maternité par le pédiatre. Ce deuxième examen est consigné dans le carnet de santé et conduit à la rédaction du premier certificat de santé obligatoire dit du 8e jour. Ce certificat contient deux feuillets, un feuillet médical destiné au centre de protection maternelle et infantile (PMI) et un feuillet administratif. Cet examen est complet, de l’anamnèse à l’examen physique de chaque appareil. Le nouveau-né à terme naît entre 37 semaines d’aménorrhée (SA) et 41 SA. Il est eutrophe si ses mensurations de naissance (poids, taille et périmètre crânien) sont comprises entre le 10e et le 90e percentile sur les courbes néonatales de type AUDIPOG (Association des utilisateurs de dossiers informatisés en pédiatrie, obstétrique et gynécologie). En moyenne, un nouveau-né à terme pèse 3 300 g, mesure 50 cm et a un périmètre crânien de 35 cm.

Recueil des données obstétricales

Le recueil exhaustif des données anamnestiques dans le dossier obstétrical est indispensable : il permet d’identifier précocement des facteurs de risque éventuels pour le nouveau-né, d’orienter l’examen clinique et une prise en charge rapide. Il comporte les antécédents familiaux (âge maternel, pathologies maternelles notamment maladies chroniques, sérologies maternelles, groupe sanguin ABO et rhésus, antécédents gynécologiques et obstétricaux, notion de consanguinité), le déroulement de la grossesse (marqueurs sériques du premier trimestre, écho­graphies anténatales, éventuelle malformation dépistée en anténatal, résultat du prélèvement vaginal, éventuelles hospitalisations pendant la grossesse, existence d’un diabète gestationnel, prises de toxiques tels que tabac, alcool, drogues ou de médicaments), le déroulement de l’accouchement (terme de naissance, durée du travail, fièvre maternelle, antibioprophylaxie per-partum, tension artérielle maternelle, enregistrement du rythme cardiaque fœtal, présentation fœtale, couleur du liquide amniotique, mode d’accouchement – voie basse avec extraction instrumentale ou non ou césarienne –, mode d’anesthésie).

Évaluation de l’adaptation à la vie extra-utérine

L’accueil d’un enfant en salle de naissance nécessite la présence d’une personne entraînée à la prise en charge d’un nouveau-né pouvant présenter des difficultés d’adaptation à la vie extra-utérine et sachant réaliser les premières manœuvres de réanimation (sage-femme ou pédiatre).
Après la naissance, les soins au nouveau-né sont systématiques :
clampage, désinfection et section du cordon et vérification de la présence des 3 vaisseaux (2 artères et 1 veine) ;
évaluation de l’adaptation à la vie extra-utérine : score d’Apgar (tableau 1). Il contient 5 items (fréquence cardiaque, mouvements respiratoires, coloration, tonus et réactivité), cotés de 0 à 2 points. Le score minimum est de 0, il correspond à un enfant né en état de mort apparente ; le score maximum étant de 10 pour un enfant dont l’adaptation est correcte. Le score est évalué à 4 reprises : à 1 minute, 3, 5 puis 10 minutes de vie ;
désobstruction douce dans le nez et la bouche si besoin ;
lutte contre l’hypothermie : accueil du nouveau-né dans une pièce chauffée, séchage soigneux avec un lange, bonnet et peau à peau contre sa mère chaque fois que cela est possible ;
premier examen clinique complet ;
mensurations de naissance : poids, taille et périmètre crânien, qui doivent être consignés dans le carnet de santé ;
vérification des perméabilités : choanes (atrésie des choanes) ; anus (imperforation anale) et éventuellement œsophage (test de la seringue pour dépister une atrésie de l’œsophage) ;
port de deux bracelets d’identification ;
prévention de la maladie hémorragique du nouveau-né : administration de vitamine K1 (2 mg) par voie orale (dose qui sera répétée pour tous les enfants entre le 4e et le 7e jour de vie, puis à un mois de vie en cas d’allaitement maternel exclusif) ;
la prévention des infections oculaires à gonocoques par collyre antibiotique, une goutte dans chaque œil, n’est plus recommandée en dehors des situations à risque (grossesse non suivie, antécédent maternel d’infection sexuellement transmissible, sérologie maternelle positive pour le virus de l’immunodéficience humaine ou le virus de l’hépatite B). Certains vont proposer l’utilisation de la rifamycine en collyre, d’autres proposent Amukine ;
alimentation précoce du nouveau-né : première mise au sein ou prise d’un biberon dans l’heure qui suit la naissance.
On considère que l’enfant s’adapte bien à la vie extra-utérine et qu’il n’a pas besoin de réanimation si plusieurs conditions sont réunies : il est né à terme, il crie ou il respire, et son tonus musculaire est normal. Dans ce cas, il peut être posé sur le ventre de sa mère, et les soins de routine lui sont prodigués en poursuivant une surveillance étroite.
Si un des critères n’est pas présent, l’enfant doit être évalué sur une table radiante par un professionnel entraîné avec la pose d’un capteur d’oxymètre de pouls à la main droite afin de mesurer la saturation transcutanée en oxygène : on procède à des aspirations rhinopharyngées, puis à une ventilation en pression positive avec un masque. L’intubation survient secondairement en cas de non-réponse à la ventilation au masque, ou s’il existe une contre-indication à la ventilation au masque : enfant en « état de mort apparente » (score d’Apgar à 1 min < 3) et né dans un liquide méconial, ou hernie diaphragmatique. Dans ces deux derniers cas, on procède en première intention à l’intubation trachéale. Si l’enfant présente une bradycardie malgré la ventilation efficace, on débute le massage cardiaque externe, et on procède à l’administration d’adrénaline si nécessaire.
Moins de 10 % des nouveau-nés nécessitent une réanimation en salle de naissance, et moins de 1 % nécessiteront un massage cardiaque externe.

Examen clinique

L’examen clinique pendant le séjour en suites de couches est réalisé selon les équipes au premier ou au deuxième jour de vie, dans une pièce éclairée et suffisamment chauffée. Le nouveau-né doit être rassuré et calme, si possible après une prise alimentaire.
Cet examen est fait en présence d’un ou des deux parents, permettant au pédiatre de montrer les compétences de l’enfant. L’examen doit être rigoureux et complet. Il étudie de manière standardisée chaque appareil, permet d’évaluer la bonne adaptation à la vie extra-utérine, d’identifier les situations nécessitant une prise en charge en urgence et de rechercher la présence d’éventuelle malformation.
Appareil respiratoire
On recherche la présence de signes de lutte (battement des ailes du nez, tirage intercostal, balancement thoraco-abdo­minal, geignement expiratoire), on évalue la fréquence respiratoire (la fréquence respiratoire normale est entre 30 et 60 cycles par minute). L’auscultation pulmonaire recherche le murmure vésiculaire qui doit être bilatéral et symétrique sans bruit sur­ajouté.
Appareil cardio-circulatoire
On vérifie l’hémodynamique de surface avec l’évaluation du teint de l’enfant, du temps de recoloration cutanée (qui doit être inférieur à 3 secondes). La fréquence cardiaque normale est comprise entre 130 et 140 batt/min chez un nouveau-né au calme, mais peut osciller entre 80 et 160 batt/min. L’auscultation cardiaque vérifie la bonne position à gauche des bruits du cœur et recherche la présence d’un souffle. Enfin, on palpe les pouls huméraux et pouls fémoraux, qui doivent être bien frappés et symétriques. La diminution ou l’abolition des pouls fémoraux doit faire évoquer une coarctation de l’aorte, qui est une urgence vitale.
Appareil digestif
La palpation abdominale recherche la présence d’une hépato­mégalie, d’une splénomégalie. On vérifie que les orifices herniaires sont libres, de même que les fosses lombaires (absence de contact lombaire), et que l’anus est bien perméable. La diurèse doit être amorcée dans les 24 premières heures de vie, et le méconium (premières selles, substance noire verdâtre et gluante) doit être émis avant 48 heures de vie. Un retard d’émission du méconium doit faire évoquer plusieurs pathologies : mucoviscidose, hypothyroïdie congénitale ou maladie de Hirschsprung. Le cordon ombilical noircit et sèche vers le 3e jour de vie, puis se rétracte et tombe dans le courant de la 2e semaine de vie. Un retard à la chute de cordon après 1 mois de vie doit faire évoquer un déficit immunitaire.
Organes génitaux externes
L’examen des organes génitaux externes doit être minutieux, afin de confirmer le sexe de l’enfant. Chez la petite fille, on vérifie l’aspect des grandes lèvres et du clitoris, et la perforation de l’hymen. Dans les premiers jours de vie, il peut y avoir des leucorrhées et des métrorragies de faible abondance, sans aucune gravité – il s’agit de la crise génitale du nouveau-né. Chez le garçon, il faut vérifier le bon emplacement du méat urinaire. On parle d’hypospadias si le méat est situé à la face postérieure de la verge sur le trajet de l’urètre. Enfin, on vérifie la présence des deux testicules à l’intérieur du scrotum. En cas de doute clinique sur le sexe de l’enfant ou si aucun testicule n’est palpé (cryptorchidie), il peut s’agir d’une anomalie de la différenciation sexuelle qui requiert un avis d’une équipe spécialisée. Dans ce cas, il faut temporairement sursoir à la déclaration de sexe à l’état civil (demande faite auprès du procureur de la République).
Peau
à la naissance, la peau est recouverte d’un enduit blanchâtre appelé vernix caseosa, qui protège la peau du fœtus pendant la vie intra-utérine. Il est absorbé rapidement après la naissance, est très hydratant et ne doit pas être enlevé. La peau peut être recouverte d’un petit duvet, appelé lanugo, notamment au niveau du dos, des épaules et du front, qui disparaîtra en quelques jours. La peau du nouveau-né est le plus souvent fine mais peut desquamer chez le nouveau-né post-terme (après 42 SA). Elle est de couleur rose, parfois érythrosique. Chez certains enfants, les extrémités (mains et pieds) peuvent être cyanosées de manière physiologique pendant les 24 premières heures de vie (acrocyanose).
La peau du nouveau-né peut être le siège de lésions pigmentées bénignes :
taches ethniques ou « mongoloïdes » : il s’agit de taches ardoisées arrondies, uniques ou multiples, siégeant préférentiellement dans le dos et dans la région lombo-sacrée. Elles s’atténuent voire disparaissent dans les premières années de vie ;
angiomes plans : souvent retrouvés au niveau des paupières, au milieu du front (angiome en flammèche) ou dans la nuque. Ce sont des macules érythémateuses, leur couleur s’accentuant avec les pleurs du nourrisson. Elles s’atténuent également dans les premiers mois de vie.
Certaines dermatoses néonatales transitoires peuvent également être identifiées en maternité : l’érythème toxique (association de lésions maculo-papuleuses érythémateuses, sur tout le corps), les grains de milium (lésions papuleuses blanches ou jaunes, siégeant au niveau du front, du nez et des joues), l’acné du nourrisson (comédons fermés avec lésions pustuleuses, liés à la présence d’androgènes maternels). Les hémangiomes sont fréquemment retrouvés chez les nouveau-nés (10 % de la population), plus souvent chez les filles et les prématurés. Ils apparaissent après un intervalle libre de quelques jours. L’évolution se fait par une phase de croissance pendant 6 à 12 mois puis une régression progressive sur plusieurs années à partir du blanchiment central de l’hémangiome. Certaines localisations nécessitent un avis dermatologique spécialisé (péri-orificiel, angiome Cyrano sur le bout du nez, ou gênant l’ouverture des yeux) pour un éventuel traitement par bêtabloquant.
Examen neurologique
Couché sur le dos, l’enfant a spontanément ses quatre membres en flexion (quadriflexion). La motricité spontanée est symétrique. On évalue le tonus des membres (manœuvre du foulard, talon-oreille, angle poplité), le tonus axial (lors de la manœuvre du tiré assis, l’enfant est capable de maintenir quelques secondes sa tête dans l’axe vertical puis la passe vers l’avant ; maintenu en position verticale sous les aisselles, il se redresse sur les membres inférieurs), les réflexes ostéo-tendineux (qui sont habituellement vifs) et les réflexes archaïques (marche automatique, les points cardinaux, l’allongement croisé, la succion, le grasping, le réflexe de Moro).
L’examen se poursuit par l’examen ophtalmologique. L’enfant est capable de fixer un objet et de le suivre (poursuite oculaire). Les hémorragies sous-conjonctivales sont fréquentes et banales. L’inspection vérifie la taille du globe oculaire (un œil rouge et augmenté de taille doit faire évoquer un glaucome congénital qui est une urgence thérapeutique), la transparence de la cornée, la présence d’un iris complet, et la présence des lueurs pupillaires qui témoigne de la transparence des milieux cristallins (lueurs rouges du fond de l’œil survenant à l’illumination à travers la pupille ; leur absence doit faire évoquer un rétinoblastome ou une cataracte congénitale).
Appareil locomoteur
L’examen de l’appareil locomoteur recherche la présence d’une impotence fonctionnelle pouvant évoquer une paralysie du plexus brachial ou de fractures, notamment en cas d’extraction difficile : examen des clavicules, humérus et fémurs.
Les pieds doivent également être examinés, à la recherche de malposition pouvant nécessiter de la kinésithérapie douce pendant quelques semaines, ou de pieds bots, uni- ou bilatéraux (attitude irréductible des pieds en varus équin).
L’examen clinique des hanches est primordial, à la recherche d’une luxation congénitale de hanches, par les manœuvres de Barlow et Ortolani qui recherchent un ressaut. En cas de ressaut, on réalise une échographie de hanches en urgence puis consultation orthopédique pour la mise en place du traitement (langeage en abduction). Si l’examen clinique est normal, l’échographie de hanches est faite à 1 mois de vie en cas de facteurs de risque de luxation congénitale de hanches (antécédents familiaux au 1er degré, présentation par le siège ou transverse, contraintes intra-utérines (gémellité ou macrosomie avec poids de naissance supérieur à 4 kg) ou des malformations congénitales comme les pieds bots ou un genu recurvatum). Enfin, on vérifie le nombre et l’aspect des doigts et des orteils.
Crâne
On évalue à l’examen la taille et la tension des fontanelles : la fontanelle antérieure est de forme losangique. La fontanelle postérieure est de petite taille et peut même être fermée à la naissance. Les sutures sont mobiles et peuvent se chevaucher dans les premiers jours. La palpation du crâne recherche également des signes de traumatisme obstétrical : la bosse sérosanguine (hématome sous-cutané, mobile et mal limité, qui disparaît en moins d’une semaine) et le céphalhématome (hématome sous-périosté, limité par les sutures, qui disparaît en quelques semaines). La forme du crâne est également appréciée et, en cas d’anomalie (scaphocéphalie, trigonocéphalie), une craniosynostose devra être éliminée.

Dépistages en maternité

Le séjour en maternité permet le dépistage d’anomalies neuro­sensorielles. Le dépistage auditif est recommandé en maternité, par la recherche des oto-émissions acoustiques. Elles permettent d’enregistrer des sons perçus par l’oreille interne. La réalisation de potentiels évoqués auditifs automatisés peut être également effectuée par certaines équipes.
Enfin, on réalise des dépistages sanguins par le test du buvard (Guthrie) au 3e jour de vie (après 72 heures de vie). Il permet de dépister des maladies graves mais rares, dont le diagnostic précoce permet une prise en charge rapide améliorant le pronostic et la qualité de vie. Les parents se voient remettre une information claire (dépliant expliquant les pathologies dépistées). Leur consentement écrit est indispensable en cas de recherche génétique pour la mucoviscidose.
Plusieurs maladies sont dépistées.
Phénylcétonurie : il s’agit d’une maladie métabolique, liée à un blocage enzymatique, de transmission autosomique récessive. La phénylalanine qui s’accumule a une toxicité importante au niveau neurologique pouvant conduire à des déficiences mentales. La prise en charge comprend un régime alimentaire strict d’exclusion de la phénylalanine. Elle touche un enfant sur 15 000, et est dépistée par le dosage de la phénylalanine.
Mucoviscidose : maladie autosomique récessive, elle touche un nouveau-né sur 3 500 dans les populations caucasiennes. Le dépistage repose sur le dosage de la trypsine immunoréactive ; le diagnostic sera confirmé par la recherche de mutation génétique (la plus fréquente étant la mutation ΔF508). Le diagnostic précoce permet une prise en charge multidisciplinaire qui améliore le devenir.
Hypothyroïdie congénitale : maladie endocrinienne résultant d’un déficit en hormones thyroïdiennes, qui peut conduire à un déficit intellectuel. Elle touche 1 enfant sur 4 000 et est dépistée par le dosage de la thyréostimuline (TSH). Le plus souvent, l’hypo­thyroïdie est d’origine périphérique (athyréose ou ectopie thyroïdienne) et conduit donc à une augmentation du taux sanguin de TSH. Le traitement sera une supplémentation quotidienne par hormones thyroïdiennes (L-thyroxine).
Hyperplasie congénitale des surrénales : maladie endocrinienne résultant d’une déficit de production d’hormones surrénaliennes, elle est responsable d’une perte de sel et d’une déshydratation, qui peuvent conduire au décès en cas de retard de prise en charge. Elle touche 1 nouveau-né sur 16 000 et est dépistée par le dosage de la 17-hydroxyprogestérone. Le traitement repose sur une supplémentation hormonale quotidienne à vie (hydrocortisone, fludrocortisone et supplémentation sodée).
Drépanocytose : maladie héréditaire de l’hémoglobine, de transmission autosomique récessive. Le dépistage repose sur l’électro­phorèse de l’hémoglobine. Le dépistage est réalisé si les deux parents sont originaires d’un pays à risque, si la mère est originaire d’un pays à risque et que le père n’est pas connu, ou s’il existe des notions de maladie de l’hémoglobine dans la famille. Le diagnostic précoce permet une prise en charge adaptée en centre spécialisé.

Reconnaître les situations nécessitant une prise en charge spécialisée

Détresse respiratoire
La naissance est un phénomène complexe mêlant de multiples adaptations, notamment au niveau respiratoire. La détresse respiratoire est une pathologie fréquente, touchant environ 10 % des nouveau-nés. Le diagnostic est clinique et repose sur l’identification des signes de lutte respiratoire : battement des ailes du nez, balancement thoraco-abdominal, tirage intercostal, entonnoir xyphoïdien, geignement expiratoire. La gravité est évaluée par le score de Silverman (tableau 2), qui comprend les 5 signes de lutte respiratoire, cotés de 0 à 2 points, soit un score maximal de 10 points. Les signes de gravité sont une respiration irrégulière, voire des apnées, des troubles de conscience. L’évaluation clinique sera complétée par la réalisation d’une radiographie de thorax ainsi que par le prélèvement de gaz du sang. Les étiologies à évoquer sont, par ordre de fréquence : la détresse respiratoire transitoire ou retard de résorption du liquide pulmonaire (syndrome interstitiel à la radiographie pulmonaire, plus fréquente en cas de césarienne, avant travail et en cas de diabète gestationnel), la maladie des membranes hyalines (déficit en surfactant, syndrome alvéolaire à la radiographie de thorax, qui peut survenir quel que soit le terme de naissance mais est plus fréquente chez les prématurés), le pneumothorax et/ou pneumomédiastin (qui peut survenir de façon spontanée en dehors de toute ventilation au masque), l’inhalation de liquide méconial (naissance dans un liquide méconial, détresse respiratoire sévère avec opacités en mottes à la radiographie de thorax), les infections néonatales bactériennes précoces (à évoquer devant tout nouveau-né symptomatique), l’hypertension artérielle pulmo­naire persistante, les malformations (atrésie de l’œsophage, atrésie des choanes, hernie diaphragmatique).
Le traitement repose sur la ventilation en pression positive, le traitement étiologique (antibiothérapie, administration de surfactant, « exsufflation de pneumothorax »…) et le traitement symptomatique.

Ictère néonatal

Il s’agit d’une symptomatologie extrêmement fréquente qui justifie que tous les nouveau-nés soient dépistés tous les jours, et ce dès le premier jour de vie, par mesure de la bilirubine transcutanée. En cas de valeur élevée, supérieure aux normes attendues pour l’âge, la confirmation du diagnostic est faite par le dosage sanguin de la bilirubine totale et conjuguée. L’indication de traitement par photothérapie repose sur l’analyse de courbes de référence du taux de la bilirubine non conjuguée en fonction de l’âge postnatal. La photothérapie intensive est le traitement de référence. L’ictère est pathologique s’il est précoce (survenue dans les 24 premières heures de vie), intense (bilirubine non conjuguée > 300 mmol/L) ou prolongé (> 8 jours). Les causes des ictères à bilirubine non conjuguée sont multiples : les incompatibilités materno-fœtales, rhésus ou ABO, sont les plus fréquentes. La confirmation diagnostique repose sur la détermination du groupe sanguin de l’enfant et la réalisation du test de Coombs direct. Ensuite, les autres causes à évoquer sont la présence d’hématomes, les maladies du globule rouge (de membrane, maladie de Minkowski-Chauffard ou enzymo­pathie, déficit en glucose-6-phosphate-déshydrogénase (G6PD), y compris chez les filles). Devant un ictère prolongé, il faut savoir évoquer une hypothyroïdie. Devant des selles décolorées et des urines foncées, l’urgence est d’éliminer une atrésie des voies biliaires (ictère à bilirubine conjuguée).

Reconnaître et diagnostiquer une infection pendant le premier mois de vie

Deux catégories d’infection bactérienne surviennent dans le premier mois de vie :
l’infection néonatale bactérienne précoce (INBP), improprement qualifiée d’infection materno-fœtale, qui survient dans les 72 heures après la naissance. Son mode de transmission est vertical (de la mère au fœtus) ;
l’infection néonatale bactérienne à début tardif (après 72 heures) dont le mode de transmission est horizontal ou communautaire, voire nosocomial.
Seule l’INBP sera abordée car il s’agit d’une cause évitable de mortalité et de morbidité chez le nouveau-né.
La généralisation du dépistage du portage vaginal du streptocoque du groupe B (SGB) par prélèvement entre 34 et 38 SA et l’antibioprophylaxie per-partum en cas de résultat positif a eu pour conséquence une diminution des infections néonatales précoces à SGB.
Néanmoins, chez le nouveau-né à terme, le principal agent pathogène de l’INBP reste le SGB dans plus de la moitié des cas. Viennent ensuite Escherichia coli (20 % environ) et diverses bactéries (autres streptocoques, pneumocoque, Hæmophilus influenzæ, etc.). La listériose congénitale est devenue très rare.
Le diagnostic d’INBP qui repose sur la présence de bactéries dans un prélèvement bactériologique central (hémoculture ou liquide céphalo-rachidien) est néanmoins rarement confirmé par ces prélèvements. Dans la pratique, il repose sur un faisceau d’arguments anamnestiques, cliniques et paracliniques. Les facteurs de risque sont classés en :
majeurs : infection bactérienne précoce du jumeau, chorio­amniotite, rupture prolongée des membranes de plus de 18 heures, fièvre maternelle supérieure à 38 °C avant ou en début de travail, portage vaginal de streptocoque du groupe B avec antibioprophylaxie incomplète ou inadéquate, prématurité spontanée avant 35 SA ;
mineurs : rupture de la poche des eaux entre 12 et 18 heures, fièvre maternelle en fin de travail, liquide amniotique teinté, tachycardie fœtale.
Les signes cliniques de l’INBP sont non spécifiques : détresse respiratoire, troubles hémodynamiques (tachycardie, temps de recoloration allongé, teint gris…), troubles de la régulation thermique (fièvre ou hypothermie), hypotonie, etc. Cette présentation pléiomorphe est traduite dans l’adage « tout nouveau-né qui va mal à la naissance est suspect d’infection ». Les arguments biologiques reposent sur la conjonction des cultures des prélèvements périphériques (liquide gastrique, conduit auditif externe et anus), permettant d’identifier la colonisation du nouveau-né, et de la présence d’un syndrome inflammatoire biologique (décalage de la CRP au moins 8 heures après la naissance). La prise en charge consiste en une antibiothérapie probabiliste secondairement adaptée aux résultats bactériologiques, administrée par voie intraveineuse associant une bêtalactamine (amoxicilline) et un aminoside.

Promouvoir la qualité des premiers liens affectifs parents-enfant

La relation mère-enfant doit être privilégiée et mise en valeur dès la naissance. Après la naissance, le nouveau-né est placé contre sa mère, en peau à peau. Si l’allaitement maternel est souhaité, la première mise au sein doit être précoce. Pendant le séjour à la maternité, la mère est encadrée dans les soins à prodiguer à son enfant ; il est également important de mettre en avant les capacités déjà présentes du nouveau-né comme sa capacité à reconnaître et fixer sa mère. Avant la sortie, il est primordial d’indiquer à la mère les relais présents en ville qui pourront l’aider en cas de difficultés au moment du retour au domicile, notamment la PMI.

Expliquer aux parents la base de la puériculture et les informer des mesures de prévention à mettre en œuvre dans les deux premières années de la vie

Bases de la puériculture
Les bases de la puériculture doivent être expliquées aux parents pendant leur séjour en maternité.
L’alimentation : l’Organisation mondiale de la santé recommande l’allaitement maternel exclusif pendant les 6 premiers mois de l’enfant. L’allaitement maternel se fait à la demande, de 6 à 12 tétées par jour. Lors d’un allaitement artificiel, les biberons sont préparés avec 1 cuillère-mesure rase de poudre de préparation pour nourrisson pour 30 mL d’eau faiblement minéralisée. La stérilisation des biberons n’est plus nécessaire pour les nouveau-nés à terme et en bonne santé.
Le change : il est effectué 7 ou 8 fois par jour, au moment des tétées, avec de l’eau et du savon doux.
Les soins du cordon :
ils sont faits quotidiennement avec un désinfectant (par exemple Biseptine ou chlorhexidine aqueuse) jusqu’à la chute du cordon.
Le bain : il peut être donné quotidiennement et doit faire l’objet d’un apprentissage par les parents lors du séjour en maternité.
La pesée : elle peut être effectuée une fois par semaine, chez le médecin traitant ou à la PMI. Si l’enfant boit suffisamment, les couches doivent être humides 4 ou 5 fois par jour.

Surveillance médicale, vaccins

Une visite à la PMI est habituellement conseillée dans la semaine qui suit le retour à domicile. Une consultation médicale avec le pédiatre ou le médecin généraliste doit être programmée 15 jours à 1 mois après la naissance. Lors de cette consultation, le médecin vérifiera la croissance du nouveau-né, fera le point avec les parents sur les éventuelles difficultés rencontrées et pourra prescrire les premiers vaccins à faire le deuxième mois : vaccin hexavalent (diphtérie, tétanos, poliomyélite, coqueluche, Hæmophilus influenzæ et hépatite B) et le vaccin contre le pneumocoque. La vaccination par le BCG sera faite au cours de cette consultation pour les enfants à risque.

Prévention de la mort inattendue du nourrisson

Le nouveau-né doit être couché sur le dos, à plat, sur un matelas ferme adapté au lit. La température doit être autour de 19 °C. Il doit dormir seul dans son lit. Il est recommandé par l’Académie américaine de pédiatrie que l’enfant dorme dans la même chambre que ses parents, mais dans son propre lit. L’enfant est couché dans une turbulette. Les couettes, couvertures, tours de lit et diverses peluches doivent être bannis du lit de l’enfant en raison du risque d’enfouissement et d’étouffement. Une information des parents concernant l’augmentation du risque de mort inattendue du nourrisson en cas de tabagisme passif doit également être effectuée. •
Points forts
Évaluation et soins du nouveau-né à terme

POINTS FORTS À RETENIR

L’examen clinique du nouveau-né à terme doit être fait consciencieusement et de manière répétée.

Le séjour en maternité permet de vérifier la bonne adaptation à la vie extra-utérine, de dépister des pathologies (malformation, luxation congénitale de hanches, dépistage auditif, test sanguin sur buvard).

Il est l’occasion de développer les liens entre les parents et leur enfant, de délivrer des messages de prévention.

Encadre

L’infection néonatale bactérienne précoce au xx siècle

La diminution de l’incidence des infections néonatales précoces (INBP) à streptocoque du groupe B (SGB) dans les pays développés depuis le début des années 2000 a conduit à l’élaboration de nouvelles recommandations relatives à la prise en charge des INBP aux États-Unis et au Royaume-Uni depuis 2012. Ces recommandations insistent sur l’évolution des facteurs de risque d’INBP. En effet, à côté des facteurs de risque établis tels que la prématurité, la fièvre maternelle et la durée prolongée de l’ouverture de la poche des eaux, ce n’est plus tant la présence de SGB dans le prélèvement vaginal qui demeure un facteur de risque que la réalisation d’une antibioprophylaxie per-partum inadéquate.

À ce jour, en France, l’application des recommandations de l’ANAES 2002 concernant le diagnostic et le traitement de l’infection bactérienne précoce du nouveau-né n’est pas adaptée à l’incidence de la maladie et n’est plus réalisable dans tous les établissements. Les performances diagnostiques des examens complémentaires de l’époque ne correspondent plus à la réalité épidémiologique de 2015 et induisent des prescriptions inutiles d’examens complémentaires et d’antibiothérapies néonatales, coûteuses et délétères pour le nouveau-né, des allongements de la durée d’hospitalisation de la mère et du nouveau-né, et perturbent le fonctionnement des services de soins et des laboratoires, ainsi que l’écologie bactérienne.

L’actualisation en cours de ces recommandations vise à cibler non seulement les nouveau-nés à risque d’INBP relevant d’une surveillance clinique et/ou de la réalisation d’examens complémentaires mais également à réduire le nombre des antibiothérapies administrées chez le nouveau-né, ainsi que le nombre d’associations d’antibiotiques et la durée de l’antibiothérapie lorsqu’elle a été instaurée à la naissance. Ceci devrait permettre de minimiser la médicalisation de nouveau-nés bien portants et le plus souvent indemnes d’infection et d’obtenir une utilisation raisonnée des antibiotiques afin de diminuer la pression antibiotique et ainsi d’éviter le développement de résistances bactériennes.

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