Argumenter les principales hypothèses diagnostiques et justifier les examens complémentaires pertinents.
Connaître les principes de la thérapeutique et du suivi du patient.
Connaître la conduite à tenir vis-à-vis de l’entourage autour d’un diagnostic de rougeole, rubéole, scarlatine, et les risques chez la femme enceinte.
Elles nécessitent une analyse anamnestique et sémiologique, méthodique et fine, afin de poser un diagnostic qui est le plus souvent clinique et éliminer une urgence thérapeutique. L’interrogatoire prend une place importante. Dans une hypothèse infectieuse, il doit tenir compte de l’épidémiologie de ces pathologies (âge de l’enfant, saison, épidémies en cours), de la notion de contage, des prodromes, de voyages à l’étranger et du statut vaccinal. Il est important de tenir compte de certains terrains à risque, nécessitant une prise en charge spécifique, principalement le nouveau-né, l’eczéma sévère, la drépanocytose, l’immunodépression et la présence d'une femme enceinte dans l'entourage.
L’analyse sémiologique précise des lésions cutanées élémentaires ainsi celle de leur topographie et de leur évolution est essentielle à la démarche diagnostique. Les lésions élémentaires sont des lésions qui permettent de décrire l’éruption et de la classer ; leurs formes sont multiples, et nous nous limitons ici à celles qui prédominent dans les éruptions fébriles de l’enfant.
Dans ce cadre nosologique, on peut citer :
- les lésions sans relief : les macules ;
- les lésions avec un relief faible et solide : les papules ;
- les lésions avec un relief à contenu liquidien de moins de 5 mm : les vésicules, appelées pustules si le liquide est trouble et bulles si le contenu liquidien fait plus de 5 mm ;
- le purpura, en cas d’extravasation de globules rouges dans le derme, se traduisant par des macules ou papules rouges à violacées ne s’effaçant pas à la vitropression.
Les signes cliniques associés sont essentiels à l’orientation étiologique, par exemple :
- une altération de l’état général de l’enfant est classique au cours de la rougeole ou de la maladie de Kawasaki mais absente au cours de la roséole ;
- les caractéristiques de la fièvre sont à prendre en compte ; elle est peu intense pour la rubéole ; elle dure entre quarante-huit et soixante-douze heures pour la roséole ; elle dure plus de cinq jours et est classiquement en plateau pour la maladie de Kawasaki.
- éruptions morbilliformes (qui ressemblent à la rougeole), exanthème rouge fait d’éléments de petite taille (≤ 1 cm de diamètre) avec intervalles de peau saine ;
- éruptions roséoliformes (qui ressemblent à la roséole syphilitique), érythème discret fait de petits éléments rosés mal délimités avec de larges intervalles de peau saine ;
- éruptions scarlatiniformes (ressemble à la scarlatine), érythème en grands placards rouge vif avec peu ou pas d’intervalles de peau saine.
Éliminer les urgences vitales
Purpura fulminans
Des lésions purpuriques peuvent être également observées au cours de vascularite, d’infection virale (parvovirus B19, rougeole...) ou être d’origine mécanique, par exemple dans le territoire de la veine cave supérieure après des efforts de vomissements. Néanmoins, dans le doute et en l’absence de recul, tout purpura fébrile doit être considéré comme un purpura fulminans.
Syndrome de choc toxinique
Le syndrome du choc toxique à staphylocoque et streptocoque produit est dû à des toxines à activité superantigénique qui stimulent la prolifération d’un grand nombre de lymphocytes T et provoquent une avalanche cytokinique. Il se manifeste par une hyperthermie, une éruption maculeuse érythémateuse diffuse ; une chéilite et une conjonctivite peuvent s’y associer. L’hémodynamique est altérée avec, dans un premier temps, une tachycardie, puis une hypotension artérielle et une atteinte systémique évoluant rapidement vers une défaillance multiviscérale. La prise en charge repose sur le traitement du choc septique et du foyer infectieux. L’antibiothérapie doit inclure une molécule aux propriétés antitoxiniques (clindamycine) ; elle peut être associée à un traitement par immunoglobulines polyvalentes.
Le syndrome de choc toxique staphylococcique est associé à des staphylocoques aureus producteurs de toxines superantigènes (TSST-1, entérotoxines A, B, C, D, E). La TSST-1 est responsable du choc menstruel, qui survient lors de l’utilisation de tampons vaginaux. Les chocs non menstruels sont souvent en relation avec une ostéomyélite, une plaie chirurgicale, un abcès cutané, une brûlure ou une infection bactérienne des voies respiratoires.
Le syndrome de choc toxinique streptococcique est initialement décrit avec le streptocoque A (
Éruptions virales
Éruptions vésiculeuses
Varicelle
La varicelle est la primo-infection par le virus varicelle-zona (VZV) appartenant à la famille des Herpesviridae. C’est une pathologie très fréquente et très contagieuse : 90 % de la population est séroconvertie avant l’âge de 15 ans. Elle est présente toute l’année, avec un pic printanier. La transmission est le plus souvent aérienne ; elle se fait parfois par contact direct avec des lésions cutanées, le cas index est alors le plus souvent un cas de varicelle, mais un patient ayant un zona peut également transmettre le virus. L’incubation est de quatorze jours en moyenne, les sujets sont contagieux trois jours avant le début de l’éruption et jusqu’à la disparition des lésions vésiculeuses.Les prodromes (fièvre, céphalée, rhinite) sont généralement peu importants. Un exanthème maculo-papuleux prurigineux sur le cuir chevelu et le tronc peut précéder l’apparition des vésicules. Celles-ci sont initialement claires « en gouttes de rosée sur un pétale de rose » qui s’ombiliquent, se troublent puis se rompent, formant une érosion croûteuse (
Les complications sont rares mais multiples :
- varicelle floride, avec atteinte cutanéo-muqueuse diffuse et altération sévère de l’état général ;
- surinfections bactériennes des tissus cutanés, sous-cutanés et ostéo-articulaires ; infections des voies aériennes (otites moyennes aiguës, pneumopathies) ;
- pneumopathies virales, surtout chez l’adulte ou les nourrissons âgés de moins 6 mois ;
- atteintes neurologiques, avec ataxie cérébelleuse varicelleuse transitoire et bénigne ; méningites ; méningo-encéphalites virales ;
- atteinte hématologique, avec des tableaux sévères de coagulation intravasculaire disséminée liés à des déficits acquis en protéine S, ou un purpura thrombopénique immunologique.
La varicelle peut entraîner des embryopathies. Elle est responsable d’infections néonatales sévères si la mère contracte la maladie entre les cinq jours précédant et les deux jours suivant l’accouchement.
La confirmation diagnostique n’est pas nécessaire dans les formes typiques non compliquées. Elle repose sur la mise en évidence du VZV par PCR, qui peut être réalisée dans tout fluide biologique, notamment dans le liquide céphalorachidien et sur écouvillonnage du liquide des vésicules. La sérologie n’a pas d’intérêt pratique dans le diagnostic en raison de la séroconversion tardive.
Le traitement chez l’enfant est symptomatique. Les soins locaux reposent sur une toilette (bi)quotidienne, des ongles propres coupés court et l’application d’antiseptiques. Les pommade, crème, talc sont déconseillés en raison du risque de surinfection cutanée. L’aspirine et les autres anti-inflammatoires non stéroïdiens sont formellement contre-indiqués, la première en raison du risque de syndrome de Reye et les seconds du fait du risque de surinfection (fasciite nécrosante). En cas de prurit, on peut proposer des antihistaminiques de classe 1. Le traitement antiviral de référence est l’aciclovir ; il n’est indiqué que pour les formes sévères et doit alors être administré par voie systémique.
L’éviction scolaire n’est pas obligatoire. Néanmoins, l’état clinique nécessite un repos les premiers jours.
Il existe un vaccin vivant, recommandé pour les sujets non immuns entre l’âge de 12 et 18 ans, les femmes en âge de procréer, les professionnels de santé ou en contact avec la petite enfance et les adultes de plus de 18 ans en post-exposition. La vaccination pour tous les enfants à partir de l’âge de 1 an n’est pas encore recommandée en France, mais elle est conseillée par Infovac. Ce vaccin est contre-indiqué chez les immunodéprimés, les enfants âgés de moins de 1 an et les femmes enceintes. Pour ces patients, l’injection d’immunoglobulines spécifiques en cas d’exposition doit être proposée.
Zona
Le zona est l’expression de la récurrence du virus varicelle-zona (VZV) : il correspond à la réactivation d’une infection latente du virus dans un des ganglions sensitifs. Cette récurrence fait suite à une baisse de l’immunité qui permet la réplication virale et la migration axonale rétrograde du virus jusqu’à la peau du métamère correspondant. L’incidence chez l’enfant est faible ; de rares cas ont été observés chez les enfants immunodéprimés.L’éruption est unilatérale vésiculo-pustuleuse sur une base érythémateuse, située dans un métamère, le plus souvent hémithoracique de T5 à T12 (50 % des cas). Les douleurs neuropathiques radiculaires sont peu fréquentes chez l’enfant ; leur incidence augmente avec l’âge. L’infection est bénigne chez l’enfant immunocompétent et le pronostic excellent. Le zona ophtalmologique est une urgence, avec un risque de complication oculaire.
Le diagnostic est clinique. En cas de doute, il est recommandé de rechercher le virus sur un prélèvement de la lésion par immunofluorescence, PCR ou culture.
Un traitement antiviral par aciclovir (oral ou intraveineux) ou un autre antiviral oral (par exemple, valaciclovir) doit être discuté chez les patients à risque d’atteinte oculaire, en cas d’immunodépression ou en cas d’atteinte avec des symptômes importants.
Infections à Herpes simplex virus de types 1 et 2
Les Herpes simplex virus de type 1 (HSV-1) et de type 2 (HSV-2) appartiennent à la famille des Herpesviridae.HSV-1 et HSV-2 sont responsables d’infections cutanéo-muqueuses se traduisant par des vésicules cutanées et des érosions muqueuses douloureuses. Ces virus peuvent rester quiescents et entraîner des récurrences ultérieures. L’HSV-1 intéresse plus particulièrement les zones cutanées et orales et l’HSV-2 la sphère génitale ; cette distinction n’est néanmoins pas absolue, HSV-1 ayant été mis en évidence dans 50 % des primo-infections génitales et 20 % des récurrences. La primo-infection de l’enfant est le plus souvent asymptomatique. Parfois, elle se traduit par une gingivo-stomatite herpétique, caractérisée par un énanthème buccal (
Ces affections sont traitées dans une question spécifique (v. item 168). Néanmoins, certaines infections herpétiques peuvent se présenter sous une forme essentiellement éruptive :
- chez les patients immunodéprimés, l’éruption peut se généraliser et se compliquer d’atteintes d’organes, comme des méningoencéphalites ou des hépatites ;
- chez les sujets atteints d’eczéma, une surinfection à HSV rend compte du syndrome de Kaposi-Juliusberg (ou eczema herpeticum), responsable d’une aggravation brutale de l’atteinte cutanée avec présence de vésiculo-pustules et érosions arrondies confluentes d’évolution croûteuse, d’un état général altéré et d’une fièvre élevée (fig. 5) ; le traitement repose sur un traitement antiviral par aciclovir par voie systémique et le plus souvent par une antibiothérapie à visées antistreptococcique et antistaphylococcique ;
- chez le nouveau-né, dans un contexte d’infection néonatale, des tableaux d’infections multisystémiques avec atteinte cutanée diffuse, neuroméningée, hépatique, coagulation intravasculaire disséminée nécessitent une prise en charge réanimatoire et un traitement antiviral par aciclovir.
Un traitement symptomatique est suffisant dans la plupart des cas, par des antalgiques oraux et parfois locaux. Un antiviral est indiqué en cas de forme sévère, de récurrence fréquente et chez les patients immunodéprimés. L’aciclovir et le valaciclovir peuvent être utilisés, ils sont plus efficaces s’ils sont débutés tôt (dans les 48 premières heures).
Syndrome pieds-mains-bouche
La famille des entérovirus comprend de nombreux virus pathogènes chez l’homme (virus Coxsackie, échovirus, entérovirus) ; parmi ceux-ci, plusieurs sont associés à des éruptions fébriles, mais seul le syndrome pieds-mains-bouche est clairement individualisé.Principalement lié au virus Coxsackie, le syndrome pieds-mains-bouche est un exanthème lié aux entérovirus, famille regroupant une centaine de virus. Il est le plus souvent observé au cours de la petite enfance, sous forme épidémique à la fin de l’été ou au début de l’automne. La transmission est interhumaine et se fait à partir de liquide biologique contaminé (salive, selles). L’incubation est de trois à six jours.
À la différence d’autres exanthèmes peu spécifiques associés à certains entérovirus, le syndrome pieds-mains-bouche est suffisamment caractéristique cliniquement pour affirmer un diagnostic étiologique : éruption vésiculeuse avec des vésicules ovalaires grisâtres cernées d’un halo érythémateux situées au niveau des paumes des mains et des plantes des pieds (
Éruptions maculo-papuleuses
Rougeole
L’agent causal est le virus de la rougeole, virus morbilleux appartenant à la famille des Paramyxoviridae. Il s’agit d’une des pathologies les plus contagieuses. Les récentes épidémies survenues entre 2008 et 2012 puis en 2018-2019 rappellent l’importance d’une couverture vaccinale optimale. Or, aujourd’hui en France, seulement 87 % des enfants âgés de 2 ans sont vaccinés avec deux doses et 93 % avec une seule dose, ce qui reste inférieur aux objectifs de santé publique d’élimination de la rougeole : une couverture vaccinale de 95 %.La phase d’incubation est en moyenne de douze jours. Une personne est contagieuse dans les cinq jours qui précèdent et les cinq jours qui suivent l’éruption. Les premiers symptômes sont une fièvre, un catarrhe oculo-nasal (coryza) et une conjonctivite. L’enfant est grognon et asthénique. L’éruption débute par un énanthème, notamment le signe de Koplik : piqueté blanc en regard des molaires (
Les principales complications de la rougeole sont :
- neurologiques : encéphalites (1/1 000 cas) et panencéphalites subaiguës (1/100 000 cas) ;
- pulmonaires : pneumopathies sévères chez le jeune adulte et les patients immunodéprimés ;
- infectieuses : otites moyennes aiguës, pneumopathies bactériennes.
Le diagnostic biologique repose sur le dosage des anticorps anti-rougeole (IgM et IgG). Il peut se faire sur un prélèvement sanguin et/ou salivaire et doit tenir compte du statut vaccinal. Un test diagnostique par biologie moléculaire est disponible (recherche d’ARN viral par PCR) sur un prélèvement salivaire ou nasopharyngé mais peut être réalisé sur tout liquide biologique.
Il n’existe pas de traitement curatif spécifique hormis les traitements symptomatiques et celui des surinfections. Des mesures d’isolement « air » sont nécessaires.
Il s’agit d’une maladie à déclaration obligatoire et sans délai.
Un traitement préventif peut être administré aux sujets à risque : par vaccination dans les soixante-douze heures qui suivent le contage ou par injection d’immunoglobulines polyvalentes (efficace dans les 6 jours après le contage) chez les sujets chez qui le vaccin est contre-indiqué (immunodéprimés, nourrissons âgés de moins de 6 mois si la mère est atteinte ou non immunisée, et tous les nourrissons de 6 à 11 mois non vaccinés).
Chez les malades, une éviction scolaire est nécessaire jusqu’à cinq jours après le début de l’éruption.
Rubéole
L’agent responsable est le rubivirus de la famille des Togaviridae. C’est une maladie bénigne chez la plupart des enfants, mais la survenue d’une rubéole chez une femme enceinte pendant le premier trimestre expose au risque de mort fœtale ou de rubéole congénitale. En France, on compte environ 30 femmes enceintes par an présentant une primo-infection et 5 ou 6 rubéoles congénitales.L’incubation est de quatorze à vingt et un jours avant l’éruption. L’éruption maculeuse, rose pâle, est à évolution descendante en vingt-quatre heures. Les signes associés sont des adénopathies nucales et occipitales postérieures, des arthralgies qui peuvent durer plusieurs mois. Il s’agit d’une affection peu fébrile (moins de 38,5 °C), sans altération de l’état général.
La gravité des fœtopathies justifie un dépistage systématique chez les femmes non vaccinées en âge de procréer et en cours de grossesse.
Roséole (exanthème subit ou 6e maladie)
Il s’agit d’une pathologie liée au virus humain herpétique 6 (HHV-6) qui appartient à la famille des Herpesviridae ; l’HHV-7 a également été incriminé mais de manière plus rare. Elle est très fréquente et survient le plus souvent entre l’âge de 6 mois et de 3 ans.L’incubation est de cinq à quinze jours. Après quarante-huit à soixante-douze heures de fièvre élevée bien tolérée, se développe une éruption maculo-papuleuse prédominant sur la partie haute du tronc et au niveau du visage. Un discret halo pâle peut entourer chaque lésion. Cette éruption est fugace et concomitante de la défervescence thermique (
En dehors d’un contexte d’immunosuppression sévère, la confirmation biologique est inutile (ADN viral par PCR).
Parvovirus B19 (mégalérythème épidémique)
La primo-infection par le parvovirus B19, qui appartient à la famille de Parvoviridae, touche essentiellement les enfants entre l’âge de 4 et 10 ans. L’incubation est de quatre à quatorze jours ; les personnes ne sont plus contagieuses dès que l’éruption apparaît. Celle-ci débute au niveau du visage par des plaques rouge vif, donnant un aspect de « joues souffletées » (L’état général est conservé, la fièvre est modérée ou absente. Les signes associés peuvent être articulaires (arthralgies) ou hématologiques.
Au point de vue hématologique, il entraîne une érythroblastopénie qui peut se compliquer d’une anémie sévère, notamment chez les patients immunodéprimés, porteurs d’une pathologie du globule rouge, ou le fœtus. Le mégalérythème est responsable de fœtopathies sévères (anasarque) nécessitant un dépistage chez les femmes enceintes en cas de contact et d’une surveillance rapprochée des grossesses en cas de primo-infection avérée.
Le diagnostic repose sur la recherche d’anticorps antiparvovirus dans le sérum (IgM et IgG). Il peut être complété par une recherche d’ADN viral par PCR dans le sérum.
Il n’y a pas de traitement curatif ou préventif spécifique. En cas d'immunodépression, des immunoglobulines polyvalentes peuvent être proposées.
Virus d’Epstein-Barr (mononucléose)
La mononucléose infectieuse est un syndrome associé dans la majorité des cas à une primo-infection au virus d’Epstein-Barr (EBV), qui est un virus de la famille des Herpesviridae. Elle survient le plus souvent au cours de l’enfance, entre l’âge de 5 et 10 ans, mais également chez les adolescents et les jeunes adultes (« maladie du baiser »).La transmission se fait par voie aérienne, la période d’incubation est de trente à cinquante jours. L’éruption est inconstante, variable et peu spécifique. Sa survenue au décours d’une prise d’ampicilline ou d’aminopénicilline est évocatrice du diagnostic.
Un œdème des paupières est souvent associé. La fièvre est variable, parfois absente ou prolongée. Les autres signes peuvent être une asthénie importante, une amygdalite pseudomembraneuse parfois obstructive, un purpura pétéchial du voile du palais, des adénopathies souvent volumineuses et de siège ubiquitaire, une splénomégalie et une hépatomégalie.
La primo-infection à EBV peut se compliquer, dans de rares cas, d’une rupture splénique, d’une agranulocytose ou de complications neurologiques.
Le diagnostic clinique peut être conforté par la présence d’un syndrome mononucléosique biologique et d’une cytolyse hépatique modérée (entre 2 et 5 fois la normale).
La confirmation du diagnostic est sérologique : la présence d’IgM anti-VCA (IgM contre l'antigène de la capside virale du virus Epstein-Barr) est en faveur d’une primo-infection récente. Le MNI-test n’est pas indiqué chez l’enfant, car il n’est pas suffisamment fiable. La recherche par PCR quantitative peut compléter la sérologie.
Le traitement est avant tout symptomatique.
Autres éruptions virales
Urticaire aiguë
L’urticaire aiguë est une affection très fréquente chez l’enfant. Les lésions apparaissent brutalement, sous forme de papules prurigineuses roses ou rouges, de taille et de forme variables (notamment annulaire). Elles sont fugaces et migratrices. Ces plaques s’associent fréquemment à un œdème (angioœdème), forme profonde de l’urticaire. Chez le nourrisson et le jeune enfant, des lésions ecchymotiques se mêlent au tableau dans environ un cas sur deux, parfois source d’erreur diagnostique, notamment confusion avec l’œdème hémorragique du nourrisson (L’indentification du facteur déclenchant est en général difficile. Elle est principalement secondaire à un virus dans un contexte de fièvre, mais d’autres agents infectieux peuvent être responsables (infection à Streptococcus pyogenes, parasites) et/ou la prise de certains médicaments (le plus souvent par mécanisme non spécifique histamino-libérateur, sans véritable allergie). Il faut penser à éliminer une cause allergique (alimentaire, médicamenteuse) principalement dans un contexte d’urticaire de survenue rapide (dans l’heure) après exposition à l’allergène suspecté d’autant plus si elle est accompagnée d’autres symptômes d’anaphylaxie ou si elle récidive après une nouvelle exposition.
Le traitement est symptomatique, surtout avec des antihistaminiques oraux.
Infection par le SARS-CoV-2
Les manifestations cutanées associées au Covid‐19 sont nombreuses et peuvent varier considérablement. Les principaux schémas dermatologiques peuvent être classés en éruptions paravirales communes (maculopapuleuses, urticariennes), éruptions vésiculeuses ou lésions d’origine vasculaire (pseudo-engelures, purpura et aspect de livedo réticulé).Lors du début de la pandémie, l’une des complications grave de l’infection était le pediatric inflammatory multisystem syndrome (PIMS). Il s’agit d’un syndrome inflammatoire multisystémique avec des caractéristiques semblables à la maladie de Kawasaki chez des enfants testés positifs au SARS-CoV-2 dans les deux mois précédents. Comme la maladie de Kawasaki, ce syndrome se caractérise par une éruption polymorphe inconstante. C’est une urgence diagnostique, le risque étant une atteinte myocardique avec défaillance cardiaque.
Arboviroses
Les arbovirus (arthropod-borne viruses) sont des virus transmis à l’homme par des arthropodes hématophages (moustiques, tiques, phlébotomes) à partir d’un réservoir animal ou d’un individu infecté. Ils regroupent un ensemble hétérogène de virus : principalement la dengue, le chikungunya et le virus Zika. Ces infections sont responsables d’un tableau clinique pseudogrippal, avec de possibles exanthèmes maculo-papuleux, survenant dans les quinze jours suivant le retour d’une zone endémique.Éruptions apparentées aux éruptions virales
Exanthème latéro-thoracique unilatéral
Cet exanthème, dont l’origine virale est discutée, survient pendant l’enfance. L’éruption est constituée de papules érythémateuses groupées en placards mal limités, d’aspect eczématiforme. Elle siège initialement de manière unilatérale et en zone périflexurale, typiquement sur la paroi thoracique ou à la racine des membres.L’éruption est souvent associée à de la fièvre et à des signes digestifs et respiratoires.
La régression spontanée débute la troisième semaine, avec une guérison complète en cinq à huit semaines.
Syndrome de Gianotti-Crosti (acrodermatite papuleuse infantile)
Le syndrome de Gianotti-Crosti est rencontré chez l’enfant généralement âgé de 1 à 6 ans. Il est associé au virus d’Epstein-Barr le plus souvent, mais également à de nombreux autres virus : hépatites B et A, cytomégalovirus, parvovirus, Coxsackies, etc.L’exanthème débute brutalement et est parfois précédé de prodromes à type de pharyngite, d’infection des voies aériennes supérieures ou de diarrhée. Il est constitué de papules ou de papulovésicules monomorphes de 1 à 5 mm de diamètre, de couleur rose à brun rouge, parfois discrètement prurigineuses et confluentes. Leur nombre est variable, allant de quelques dizaines à plusieurs centaines, disposées de manière bilatérale et symétrique sur les faces d’extensions des membres (coudes, genoux, extrémités), les fesses, les joues. Elles épargnent le tronc, les paumes et la zone médio-faciale.
Il n’y a pas d’énanthème ; la fièvre et les signes associés sont peu intenses et rares.
La guérison est spontanée en dix à soixante jours.
Pityriasis rosé de Gibert
Le pityriasis rosé de Gibert est une éruption de cause inconnue, avec une probable imputation du virus herpès humain de type 6 ou 7.La lésion initiale (« plaque annonciatrice ») est ovalaire avec une bordure squameuse puis, dans les deux semaines, survient sur le tronc, le cou et la partie proximale des membres, une efflorescence de lésions monomorphes ovalaires fines de plus petite taille, qui évoluent en plusieurs poussées sur une durée maximale de trois mois. Le prurit est très variable. L’éruption peut être précédée d’une fébricule, de myalgies, de céphalées.
Éruptions bactériennes
La dermohypodermite aiguë non compliquée se présente sous la forme d’un placard inflammatoire de début brutal, induré, parfois surélevé, donnant un aspect de bourrelet sur son pourtour (visage). L’éruption peut être parsemée, à sa périphérie, de vésiculo-bulles (
La fièvre est fréquente mais non constante, on peut retrouver une adénopathie et une lymphangite satellite. La localisation est principalement au niveau des membres inférieurs.
La porte d’entrée n’est pas toujours retrouvée.
Les dermatoses prurigineuses (eczéma, gale, piqûres d’insecte) et les plaies traumatiques sont des facteurs favorisants.
Des complications sont possibles, soit par sécrétions de toxines, soit par dissémination loco-régionale ou générale de l’infection (abcès, lymphangite, ostéomyélite, septicémie).
Le diagnostic est clinique ; en cas de bulles ou de porte d’entrée, un prélèvement bactériologique peut être réalisé. En cas de signes systémiques et de fièvre, un bilan sanguin peut être réalisé : hémoculture, hémogramme et protéine C réactive (CRP). Les stigmates habituels d’une infection bactérienne peuvent être retrouvés : polynucléose à neutrophiles, syndrome inflammatoire biologique. Le traitement est le plus souvent hospitalier à la phase initiale, avec une antibiothérapie adaptée.
Éruptions toxiniques
Scarlatine
L’éruption est dite scarlatiniforme ; elle débute au niveau du tronc, avec un aspect granité qui peut être comparé au toucher à des grains de sable ou à du papier de verre. Elle prédomine au niveau des plis de flexion ; elle touche les membres jusqu’aux paumes et plantes (
La recherche d’un foyer infectieux primitif doit être systématique : angine érythémato-pultacée, lésions cutanées ou anite.
La fièvre est élevée, d’apparition brutale et mal tolérée, l’enfant est geignard et asthénique.
Le diagnostic est clinique. En cas de doute, le test de diagnostic rapide des angines à streptocoque du groupe A ou un prélèvement pharyngé pour culture apporte une confirmation.
Le traitement repose sur une antibiothérapie générale par amoxicilline. C’est une indication à l’éviction scolaire, qui peut être levée après deux jours d’antibiothérapie.
La scarlatine « staphylococcique » peut s’observer, mais généralement sans angine, sans énanthème et avec un état général conservé.
Épidermolyse staphylococcique aiguë
Les bulles sont stériles, mais la culture du site initial de l’infection peut être positif à Staphylococcus aureus.
Chez les nouveau-nés, ces épidermolyses peuvent être généralisées et de forme sévère.
La prise en charge repose sur le traitement du foyer infectieux, un traitement antalgique soutenu et une réhydratation.
Éruptions médicamenteuses
Toxidermies bulleuses
Le syndrome de Steven-Johnson comporte une atteinte cutanée moins sévère (surface corporelle décollée-décollable inférieure à 10 %). Il existe des formes frontières avec le syndrome de Lyell (surface corporelle décollée-décollable de 10 à 30 %). Il peut être lié à des infections (mycoplasme, herpès) ainsi qu’à des médicaments.
Drug reaction with eosinophilia and systemic symptoms (DRESS)
Éruptions inflammatoires
Maladie de Kawasaki
L’état général de l’enfant est constamment altéré.
Le diagnostic repose sur les critères suivants : fièvre de plus de cinq jours associée à quatre critères parmi les cinq suivants : conjonctivite ; énanthème (chéilite, langue framboisée) ; rash cutané ; atteinte des extrémités (œdèmes, puis érythème, puis desquamation) ou adénopathie cervicale unilatérale de plus de 1,5 cm (
Les complications sont en premier lieu cardiaques, avec un risque de vascularite des artères coronaires pouvant se compliquer d’anévrisme ou de sténose.
Il n’y a pas de test biologique spécifique, mais la présence d’un syndrome inflammatoire conséquent (élévation de la CRP et du fibrinogène) et d’une thrombocytose est évocatrice du diagnostic.
Le traitement repose sur l’injection d’immunoglobulines polyvalentes à dose élevée (2 g/kg) et d’acide acétylsalicylique. Une injection d’immunoglobulines pendant les huit premiers jours diminue de plus de 85 % le risque d’atteinte coronarienne, d’où l’intérêt d’un diagnostic le plus précoce possible.
Autres
La maladie de Still (arthrite juvénile idiopathique systémique) est caractérisée par une atteinte systémique associant fièvre, éruption, adénopathies, hépatosplénomégalie ; les arthrites ou arthralgies viennent au second plan. La présentation classique est une fièvre durant plus de six jours, avec des pics vespéraux, ne répondant pas au paracétamol. L’éruption cutanée qui coïncide avec des pics fébriles, fugace, est constituée de maculo-papules rosées, qui peuvent prendre un aspect urticarien et être prurigineuses.
Le lupus, les éruptions lupiques ne se limitent pas au classique masque lupique mais peuvent également se traduire par un rash morbilliforme, des lésions de vascularite d’évolution centrifuge ou de topographie distale, des aphtes ou une alopécie.
L’œdème aigu hémorragique du nourrisson se rencontre principalement chez les nourrissons et les enfants en bas âge. C’est une vascularite bénigne leucocytoplastique dont la cause est inconnue mais probablement virale. La triade clinique classique associe fièvre, œdème et présence de grandes macules purpuriques (rouge violacé) arrondies, au niveau du visage et des extrémités (fig. 20).
L’érythème noueux est une maladie inflammatoire réactionnelle du tissu graisseux sous-cutané, forme particulière de panniculite. Il est caractérisé par des nodules sous-cutanés douloureux, rouges ou violets, palpables en regard de la crête tibiale et parfois d’autres sites. Il peut apparaître en association avec une maladie sous-jacente systémique, notamment une infection streptococcique, une sarcoïdose et une maladie intestinale inflammatoire. Chez l’enfant, dans plus de 50 % des cas, il est considéré comme idiopathique et a une évolution favorable.
Conclusion
Les fièvres éruptives sont un motif très fréquent de consultation. Leurs principales causes sont recensées dans le tableau.
Leur épidémiologie est influencée par la vaccination.
Le plus souvent, ces éruptions sont bénignes et le fait de viroses ; elles n’exigent alors pas d’examens complémentaires.
Les examens complémentaires ne sont indiqués qu’en cas de facteurs de gravité, de pathologie à déclaration obligatoire, ou si la pathologie peut représenter un danger pour une tierce personne (immunodéprimés, femmes enceintes).
Une éruption peut, dans certaines situations, révéler une pathologie sévère qu’il faut savoir diagnostiquer, comme la maladie de Kawasaki ou le syndrome de choc toxique.
La rougeole, la rubéole, le parvovirus et la varicelle peuvent entraîner des fœtopathies.