Facteur de risque modifiable, la nutrition est un levier clé de la prévention…
Le système digestif est exposé quotidiennement et en première ligne aux aliments et boissons que nous ingérons. La part des cancers digestifs attribuée à la nutrition dans son ensemble, c’est-à-dire l’alimentation mais aussi la composition corporelle (IMC, adiposité) et l’activité physique, est ainsi estimée à 45 % pour le côlon-rectum, 34 % pour l’œsophage, 23 % pour le foie, 17 % pour l’estomac et la vésicule biliaire et 15 % pour le pancréas (au Royaume-Uni).1
Dans les études épidémiologiques (effectif important, suivi prolongé, grand nombre d’informations collectées), les données nutritionnelles sont mises en relation avec l’apparition ou non d’un cancer à l’issue du suivi.
Des expertises internationales (p. ex : WCRF/AICR2, OMS-CIRC3) ou nationales (INCa4) en font régulièrement le bilan et évaluent leur cohérence et la plausibilité des résultats à la lumière de travaux expérimentaux sur les mécanismes sous-jacents.
Ce processus aboutit à l’attribution d’un « niveau de preuve » pour chaque association. Les évaluations disponibles (fin 2018) pointent l’implication de plusieurs facteurs nutritionnels dans le développement des cancers digestifs.
Dans les études épidémiologiques (effectif important, suivi prolongé, grand nombre d’informations collectées), les données nutritionnelles sont mises en relation avec l’apparition ou non d’un cancer à l’issue du suivi.
Des expertises internationales (p. ex : WCRF/AICR2, OMS-CIRC3) ou nationales (INCa4) en font régulièrement le bilan et évaluent leur cohérence et la plausibilité des résultats à la lumière de travaux expérimentaux sur les mécanismes sous-jacents.
Ce processus aboutit à l’attribution d’un « niveau de preuve » pour chaque association. Les évaluations disponibles (fin 2018) pointent l’implication de plusieurs facteurs nutritionnels dans le développement des cancers digestifs.
Surcharge pondérale
C’est un facteur de risque pour l’ensemble des cancers digestifs. Une augmentation de 5 kg/m2 de l’IMC, en particulier s’il est supérieur à 25 kg/m2 (surpoids), de 10 cm du tour de taille ou de 0,1 point de ratio tour de taille/tour de hanche est associée à une hausse de risque « convaincante » de cancer du côlon-rectum (respectivement : 5 %, 2 %, 2 %), de l’œsophage (adénocarcinome : 48 %, 34 %, 38 %), du pancréas (10 %, 11 %, 19 %) et du foie (IMC : 43 %), et « probable » pour l’estomac (cardia ; IMC : 23 %) et la vésicule biliaire (IMC : 23 %). En France, 34 % des adultes sont en surpoids et 17 % sont obèses.5
Mécanismes clés : inflammation systémique à bas bruit, stress oxydant et résistance à l’insuline (hyperinsulinisme, hyperglycémie) favorisant les altérations de l’ADN et la prolifération cellulaire, et limitant l’apoptose ; facteur de risque pour la NASH (complication : tumeur hépatique), les reflux gastriques (facilitant les tumeurs gastriques [cardia] et œsophagiennes) et les calculs biliaires (sources de tumeurs de la vésicule biliaire).
Mécanismes clés : inflammation systémique à bas bruit, stress oxydant et résistance à l’insuline (hyperinsulinisme, hyperglycémie) favorisant les altérations de l’ADN et la prolifération cellulaire, et limitant l’apoptose ; facteur de risque pour la NASH (complication : tumeur hépatique), les reflux gastriques (facilitant les tumeurs gastriques [cardia] et œsophagiennes) et les calculs biliaires (sources de tumeurs de la vésicule biliaire).
Boissons alcoolisées
Elles sont cancérogènes pour l’homme (groupe 1, OMS-CIRC). Pour chaque dose de 10 g/j d’éthanol (soit environ 1 verre standard), l’accroissement du risque « convaincant » de cancer du côlon-rectum est de 7 %, de 25 % pour l’œsophage (carcinome épidermoïde) et de 12 % pour le foie. Il est « probable » pour l’estomac. Si cette hausse est plus particulièrement observée à partir d’environ 3 verres/j pour les cancers du côlon-rectum, du foie et de l’estomac, elle est constatée dès 1 verre/j pour celui de l’œsophage ou d’autres localisations comme le sein. En France, la consommation moyenne d’alcool est de 12,3 g/j (hommes : 19,8 g/j, femmes : 5,2 g/j).5
Mécanismes clés : formation de composés génotoxiques et cancérogènes (acétaldéhyde, espèces réactives de l’oxygène) ; rôle de solvant promouvant l’action d’autres cancérogènes tels que le tabac ; déficit en folates, impliqués dans la stabilité de l’ADN ; développement de stéatose, fibrose, cirrhose favorisant un futur cancer.
Mécanismes clés : formation de composés génotoxiques et cancérogènes (acétaldéhyde, espèces réactives de l’oxygène) ; rôle de solvant promouvant l’action d’autres cancérogènes tels que le tabac ; déficit en folates, impliqués dans la stabilité de l’ADN ; développement de stéatose, fibrose, cirrhose favorisant un futur cancer.
Charcuteries et viandes rouges
Charcuteries (viandes salées, fumées, séchées) et viandes rouges (hors volailles) sont classées respectivement comme cancérogènes et cancérogènes probables pour l’homme (groupes 1 et 2A, OMS-CIRC). La consommation de charcuteries est notamment associée à un risque accru « convaincant » de cancer colorectal (16 % pour chaque portion de 50 g/j). Ce risque est « probable » pour le cancer de l’estomac (non cardia, 18 %). Les viandes rouges favo-riseraient « probablement » le cancer colorectal (12 % pour chaque portion de 100 g/j). En France, les consommations moyennes sont respectivement de 40,9 g/j et 69,2 g/j.5
Mécanismes clés : interactions entre fer héminique, lipides, nitrites et nitrates (additifs de fabrication des charcuteries), amines hétérocycliques et hydrocarbures aromatiques polycycliques (cuisson à haute température) générant inflammation, stress oxydant et dommages de l’ADN (peroxydation lipidique, composés N-nitrosés) ; forte teneur en sel des charcuteries (cf. infra).
Mécanismes clés : interactions entre fer héminique, lipides, nitrites et nitrates (additifs de fabrication des charcuteries), amines hétérocycliques et hydrocarbures aromatiques polycycliques (cuisson à haute température) générant inflammation, stress oxydant et dommages de l’ADN (peroxydation lipidique, composés N-nitrosés) ; forte teneur en sel des charcuteries (cf. infra).
Aliments salés
En particulier, ceux conservés par le sel (charcuteries et poissons séchés/ fumés) augmentent de manière probable – niveau de preuve assez fort – le risque de cancer de l’estomac. En France, la consommation sodée médiane est de 7,6 g/j,5 objectif à ne pas dépasser.6
Mécanismes clés : inflammation de la muqueuse gastrique et modification de la viscosité du mucus, favorisant prolifération cellulaire, mutations, action de cancérogènes (composés N-nitrosés) et colonisation par Helicobacter pylori (à l’origine de lésions prénéoplasiques).
Mécanismes clés : inflammation de la muqueuse gastrique et modification de la viscosité du mucus, favorisant prolifération cellulaire, mutations, action de cancérogènes (composés N-nitrosés) et colonisation par Helicobacter pylori (à l’origine de lésions prénéoplasiques).
Activité physique
Elle est associée à une diminution de risque « convaincante » de cancer du côlon. En France, il est recommandé d’en pratiquer au minimum 30 min/j à intensité modérée à élevée (équivalant à la marche rapide) au moins 5 jours/semaine, en évitant la sédentarité.6
Mécanismes clés : limite la surcharge pondérale et la résistance à l’insuline, favorise la digestion et le transit intestinal (réduisant le temps de contact entre composés cancérogènes et muqueuse intestinale).
Mécanismes clés : limite la surcharge pondérale et la résistance à l’insuline, favorise la digestion et le transit intestinal (réduisant le temps de contact entre composés cancérogènes et muqueuse intestinale).
Fibres et céréales complètes
Les fibres, molécules glucidiques complexes indigestibles, contenues dans les produits céréaliers, fruits et légumes, légumineuses et fruits secs, diminuent de manière probable le risque de cancer colorectal (9 % pour chaque augmentation de 10 g/j). Il en est de même pour les produits à base de céréales complètes (ex : pain, pâtes, riz ; 17 % par portion de 90 g/j). En France, les apports moyens en fibres sont de 19,6 g/j (< à la recommandation de 30 g/j) et la consommation de produits à base de céréales complètes de 7,9 g/j.5
Mécanismes clés. Fibres : interaction avec le microbiote intestinal contribuant à réduire l’inflammation (maintien de la diversité microbienne et de sa fonction barrière, production de butyrate) ; baisse de l’hyperinsulinisme ; diminution du contact entre composés cancérogènes et épithélium colique (fixation et élimination, augmentation du volume des selles, raccourcissement du temps de transit). Céréales complètes : outre les fibres, autres composés potentiellement bénéfiques, notamment antioxydants (vitamine E, sélénium, cuivre, zinc).
Mécanismes clés. Fibres : interaction avec le microbiote intestinal contribuant à réduire l’inflammation (maintien de la diversité microbienne et de sa fonction barrière, production de butyrate) ; baisse de l’hyperinsulinisme ; diminution du contact entre composés cancérogènes et épithélium colique (fixation et élimination, augmentation du volume des selles, raccourcissement du temps de transit). Céréales complètes : outre les fibres, autres composés potentiellement bénéfiques, notamment antioxydants (vitamine E, sélénium, cuivre, zinc).
Produits laitiers
Leur consommation est associée à une diminution de risque « probable » de cancer colorectal (13 % pour chaque augmentation de 400 g/j). Les Français en ingèrent en moyenne 322,6 g/j. Ils sont une source importante de calcium, contribuant pour 38 % aux apports.5 De fait, les apports calciques alimentaires sont associés à une diminution du risque de cancer colorectal (6 % par tranche de 200 mg/j) ; concernant les compléments alimentaires à base de calcium, le lien est « probable ».
Mécanismes clés. Calcium : propriétés antiprolifératives, prodifférenciation et pro-apoptose ; neutralisation des acides biliaires et acides gras libres ; moindre mutation du gène K-ras.
Produits laitiers : outre le calcium, d’autres composés pourraient avoir un role bénéfique dans la prévention du cancer colorectal (encore à l’étude) ; caséine et lactose (augmentent la biodisponibilité du calcium), bactéries lactiques, lactoferrine, vitamine D, acides gras conjugués de l’acide linoléique, acide butyrique.
Mécanismes clés. Calcium : propriétés antiprolifératives, prodifférenciation et pro-apoptose ; neutralisation des acides biliaires et acides gras libres ; moindre mutation du gène K-ras.
Produits laitiers : outre le calcium, d’autres composés pourraient avoir un role bénéfique dans la prévention du cancer colorectal (encore à l’étude) ; caséine et lactose (augmentent la biodisponibilité du calcium), bactéries lactiques, lactoferrine, vitamine D, acides gras conjugués de l’acide linoléique, acide butyrique.
Café
La diminution du risque de cancer du foie est « probable » : 14 % pour chaque tasse consommée par jour.
Mécanismes clés : propriétés anti-oxydantes, anti-inflammatoires et anti- angiogéniques ; implication dans des mécanismes de détoxication et de réparation de l’ADN ; réduction de la résistance à l’insuline.
À noter toutefois que la consommation de boissons très chaudes (> 65 °C), incluant le café, a été récemment classée comme cancérogène probable pour l’homme (groupe 2A, OMS-CIRC), notamment vis-à-vis du risque de cancer de l’œsophage.
Mécanismes clés : propriétés anti-oxydantes, anti-inflammatoires et anti- angiogéniques ; implication dans des mécanismes de détoxication et de réparation de l’ADN ; réduction de la résistance à l’insuline.
À noter toutefois que la consommation de boissons très chaudes (> 65 °C), incluant le café, a été récemment classée comme cancérogène probable pour l’homme (groupe 2A, OMS-CIRC), notamment vis-à-vis du risque de cancer de l’œsophage.
pour en savoir pluS
1. WCRF/AICR. Cancer preventability estimates for food, nutrition, body fatness, and physical activity.
https://bit.ly/2lnX0zL
2. WCRF/AICR. Systematic Literature Review - Continuous Update Project Report. The Associations between Food, Nutrition and Physical Activity and the Risk of Esophagus, Stomach, Pancreas, Gallbladder, Liver and Colorectal Cancer. Washington, DC: AIRC; 2012-2017. https://bit.ly/2SqowKg
3. WHO/IARC. Monographs on the Evalua- tion of Carcinogenic Risks to Humans. Agents classified by the IARC Monographs 1-123. November 2018.
https://bit.ly/2TUzVnh
4. INCa. Nutrition et prévention primaire des cancers : actualisation des données. Juin 2015.
https://bit.ly/2TTKLtz
5. Anses. Etude Individuelle nationale des consommations alimentaires 3 (INCA 3). Juin 2017.
https://bit.ly/2tMc1fp
6. Actualisation des repères du Programme national nutrition santé :
– HCSP. Avis relatif à la révision des repères alimentaires pour les adultes du futur Programme national nutrition santé 2017-2021. Février 2017.
– Anses. Avis relatif à l’actualisation des repères du PNNS : révision des repères de consommations alimentaires ». Décembre 2016. Avis relatif à « l’actualisation des repères du PNNS : révisions des repères relatifs à l’activité physique et à la sédentarité ». Décembre 2016.
– World Cancer Research Fund (WCRF) : www.wcrf.org
– Institut national du cancer (INCa) : www.e-cancer.fr
– Réseau national alimentation cancer recherche (NACRe) : www.inra.fr/nacre
– Repères du programme national nutrition santé : www.mangerbouger.fr
– Pour participer à la grande étude épidémiologique NutriNet-Santé :
www.etude-nutrinet-sante.fr
https://bit.ly/2lnX0zL
2. WCRF/AICR. Systematic Literature Review - Continuous Update Project Report. The Associations between Food, Nutrition and Physical Activity and the Risk of Esophagus, Stomach, Pancreas, Gallbladder, Liver and Colorectal Cancer. Washington, DC: AIRC; 2012-2017. https://bit.ly/2SqowKg
3. WHO/IARC. Monographs on the Evalua- tion of Carcinogenic Risks to Humans. Agents classified by the IARC Monographs 1-123. November 2018.
https://bit.ly/2TUzVnh
4. INCa. Nutrition et prévention primaire des cancers : actualisation des données. Juin 2015.
https://bit.ly/2TTKLtz
5. Anses. Etude Individuelle nationale des consommations alimentaires 3 (INCA 3). Juin 2017.
https://bit.ly/2tMc1fp
6. Actualisation des repères du Programme national nutrition santé :
– HCSP. Avis relatif à la révision des repères alimentaires pour les adultes du futur Programme national nutrition santé 2017-2021. Février 2017.
– Anses. Avis relatif à l’actualisation des repères du PNNS : révision des repères de consommations alimentaires ». Décembre 2016. Avis relatif à « l’actualisation des repères du PNNS : révisions des repères relatifs à l’activité physique et à la sédentarité ». Décembre 2016.
– World Cancer Research Fund (WCRF) : www.wcrf.org
– Institut national du cancer (INCa) : www.e-cancer.fr
– Réseau national alimentation cancer recherche (NACRe) : www.inra.fr/nacre
– Repères du programme national nutrition santé : www.mangerbouger.fr
– Pour participer à la grande étude épidémiologique NutriNet-Santé :
www.etude-nutrinet-sante.fr