Chez les seniors, l’activité physique permet de ralentir les changements physiologiques liés à l’âge et de prévenir les maladies chroniques. Quels sont les bénéfices prouvés dans la littérature scientifique ? Quelles recommandations donner pour cette tranche d’âge ? Quid des programmes adaptés ? Un article des Cahiers de Nutrition et de Diététique paru le 13 décembre 2025 fait le point.
Bénéfices prouvés
Mortalité et capacités fonctionnelles
La pratique d’une activité physique (AP) en endurance réduit de façon significative la mortalité chez les plus de 70 ans.1 Certaines études montrent que l’AP a un bénéfice sur la mortalité quelle que soit l’intensité2 avec un effet dose-réponse, surtout chez les femmes, et même en cas d’intensité faible.3
En ce qui concerne la sarcopénie, une méta-analyse a montré qu’un entraînement en résistance augmente la force de préhension et la vitesse de marche. Les exercices réalisés avec des bandes élastiques pendant 40 - 60 min plus de 3 fois par semaine serait la méthode la plus efficace pour lutter contre la sarcopénie.4
Marche, équilibre, risque de chute
L’équilibre est amélioré par un entraînement à la marche.5,6
En prévention des chutes, un entraînement combiné (quand il est possible) serait le plus efficace,7 associant exercices de résistance, entraînement à l’équilibre ou fitness avec tai chi, pilates et Bā Duàn Jǐn.8
D’après plusieurs études de cohortes, l’AP en endurance diminue le risque de fracture, mais seulement si elle est combinée à d’autres mesures de prévention des chutes.9
L’AP (séances de 60 minutes ou plus, 2 à 3 fois par semaine pendant au moins 7 mois) améliore la densité minérale osseuse au niveau du rachis lombaire et du col du fémur (mais le niveau de preuve est faible).10
Facteurs de risques cardiométaboliques
L’activité physique en endurance améliore significativement les capacités cardiorespiratoires des patients âgés et très âgés et les exercices de résistance luttent contre l’augmentation de la proportion de la masse grasse liée à l’âge.
La course à pied est l’activité physique entraînant la diminution la plus importante de l’HTA systolique et diastolique. La marche réduit également la pression artérielle systolique, d’autant plus si la séance est longue.11,12
L’association entre AP et réduction du risque de diabète de type 2 est prouvé, avec des bénéfices obtenus dès un faible niveau d’activité.13 Le risque de DT2 est réduit de 26 % chez les patients pratiquant 150 min d’activité physique modérée par semaine, comparé aux inactifs. Il est donc important de promouvoir l’activité physique chez les populations à risque de développer un diabète de type 2.
Les effets de l’AP sont moins marqués sur les dyslipidémies.
En prévention primaire, l’AP entraîne une réduction du risque d’AVC ischémique et d’accidents coronariens.14 En prévention secondaire, elle permet de diminuer la mortalité chez les patients avec une maladie coronarienne stable, et d’autant plus chez les personnes à haut risque CV.15
Le risque de certains cancers est également réduit : leucémies myéloïdes, myélomes et cancer du cardia, mais aussi cancers de l’endomètre, du sein, du poumon et du foie,16 cancer de la prostate17.
Capacité neurocognitive
Les bénéfices en prévention de la maladie d’Alzheimer commencent à être bien caractérisés, l’AP agissant via plusieurs mécanismes : diminution des facteurs de risque CV, de l’inflammation, maintien des liens sociaux…
En prévention primaire, une activité physique en endurance 3 fois 60 min/semaine améliore les performances cognitives.8 Chez les patients atteints de maladie d’Alzheimer, les résultats sont moins nets.18
Dépression
L’activité physique est recommandée par la HAS en première intention dans les dépressions légères à tous les âges. Chez les patients vivants en institution, elle permet une amélioration de la dépression, mais plus les personnes vieillissent, moins les effets sont significatifs.19 Chez les plus de 65 ans vivant seuls à domicile, une étude suggère que les exercices d’étirement pourraient être plus efficaces.20
Recommandations actuelles
Chez les personnes âgées en bonne santé, les repères d’intensité sont les mêmes que pour les personnes jeunes. L’OMS recommande ainsi 150 min/semaine d’activité physique d’endurance d’intensité modérée, ou 75 min/semaine d’activité d’endurance d’intensité soutenue, ou une combinaison équivalente d’activités d’intensités modérées et soutenues. Des exercices de renforcement musculaire sont préconisés deux fois par semaine.
Il faut veiller à promouvoir et encourager toutes sortes d’AP régulière chez les seniors. La HAS recommande de diminuer les activités sédentaires et d’augmenter les activités du quotidien et les pratiques sportives en se fixant des objectifs simples.
Atteindre ces objectifs n’est pas toujours possible selon l’état de santé de la personne. Il faut donc les adapter : pour les personnes robustes, le but sera de les maintenir en bonne santé avec préservation de l’autonomie tandis que chez les personnes dépendantes, il sera de ralentir le déclin fonctionnel.
Les programmes d’entraînement doivent aussi être ciblés : chez les patients sarcopéniques, les exercices de renforcement musculaire sont essentiels, alors que chez les chuteurs on privilégiera les exercices d’équilibre.
L’APA est prescrite aux personnes ne pouvant pas pratiquer l’activité physique dans des conditions habituelles du fait de leur incapacité ou atteintes d’une affection de longue durée. Les séances (de 45 min à 1 h, 2 à 3 fois par semaine) sont animées soit par un professionnel du sport ou de santé.
Des programmes ciblés
Ces programmes sont proposés dans différentes structures en ville, en EHPAD ou à l’hôpital, que ce soit dans le public ou dans le privé.
À Strasbourg, la consultation de l’aptitude physique pour la santé (CAPS) propose un programme personnalisé sur ergocycle (PEP’C) après un bilan médical et une épreuve d’effort. Ce programme de 34 minutes sur ergocycle, deux fois par semaine pendant 18 semaines, vise à restaurer les capacités cardiorespiratoires et musculaires nécessaires à la reprise d’une activité physique.
Le programme européen VIVIFRAIL, utilisé par plus de 5 000 professionnels, cible la prévention de la fragilité et du risque de chute chez les personnes âgées, via des exercices adaptés de renforcement, d’équilibre et d’endurance.
Consultation médicale
Chez les patients âgés, la HAS recommande une évaluation minimale du niveau de risque cardiovasculaire avant de commencer une AP d’intensité modérée. L’épreuve d’effort est indiquée si l’intensité de l’activité physique prévue est élevée (> 6 METs, comme par exemple une marche rapide à plus de 6,5 km/h) ou en cas de facteurs de risque ou de comorbidités CV importantes.
À l’interrogatoire, on recherche une dyspnée, des palpitations, des douleurs thoraciques, musculaires ou articulaires, des sensations vertigineuses, les antécédents familiaux de mort subite ou de décès précoces par événements CV. Il faut également peser et mesurer les patients, relever la pression artérielle, la fréquence cardiaque et la saturation, ainsi que réaliser un examen cardiopulmonaire pour rechercher une valvulopathie et éliminer une décompensation cardiaque.
Il convient avant tout d’éliminer les contre-indications absolues à la pratique d’une activité physique (encadré ci-contre).
Enfin, il faut informer le patient que le risque d’événements CV est plus important dans les premières semaines après la reprise d’une activité physique intense. En cas de signes d’intolérance à l’exercice (étourdissement, sensation de manque d’air, douleur ou oppression thoracique, palpitations, nausées, peau pâle ou humide ou froide, cyanose [ongles ou lèvres], fatigue intense), il faut arrêter l’exercice et consulter.
Contre-indications absolues
Infarctus du myocarde récent (3 - 6 mois) ou angine de poitrine instable
Arythmies auriculaires ou ventriculaires non contrôlées
Anévrisme disséquant de l’aorte
Rétrécissement de l’aorte grave
Endocardite / péricardite aiguë
Hypertension artérielle non contrôlée (> 180/100 mmHg)
Maladie thromboembolique aiguë
Insuffisance cardiaque aiguë grave
Insuffisance respiratoire aiguë grave
Hypotension orthostatique non contrôlée
Diabète sucré, avec décompensation aiguë ou hypoglycémies non contrôlées
Facture récente au cours du dernier mois (entraînement de force)
Toute autre circonstance qui, selon son médecin, empêche la réalisation d’activité
D’après : Schuh M, Schmitt E, Vogel T. Importance de l’activité physique chez le sujet âgé dans la prise en charge globale : promotion du sport santé. Cah Nutr Diet 13 décembre 2025.
2. Ottenbacher AJ, Snih SA, Karmarkar A, et al. Routine physical activity and mortality in Mexican Americans aged 75 and older. J Am Geriatr Soc 2012;60(6):1085-91.
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Pour en savoir plus :
Schuh M, Schmitt E, Vogel T. Importance de l’activité physique chez le sujet âgé dans la prise en charge globale : promotion du sport santé. Cah Nutr Diet 13 décembre 2025.