L’histoire du traitement de la maladie d’Alzheimer est une suite d’espoirs suivis de désillusions.L’historique des différents traitements essayés contre cette pathologie est ponctué par des échecs. La démonstration de l’efficacité d’un candidat-médicament est complexe, ainsi que le montrent les exemples passés, comme celui des inhibiteurs de l’acétylcholinestérase (tacrine, donézépil...) et de l’inhibiteur des récepteurs de l’acide N-méthyl-D-aspartique (mémantine), qui ont été retirés du marché pour une efficacité non démontrée ou des effets indésirables trop importants. L’hypothèse amyloïde, qui postule que l’accumulation de plaques amyloïdes est centrale dans la maladie d’Alzheimer, a conduit à mener plusieurs essais utilisant des anticorps monoclonaux dont la plupart n’ont pas prouvé leur efficacité. Les tentatives d’explication de ces échecs associent des stades de la maladie trop avancés et des incertitudes diagnostiques. Les exigences pour l’évaluation des traitements reposent sur des preuves cliniques d’efficacité, un effet suffisant selon les standards internationaux et une vigilance quant aux effets indésirables. Ces derniers comportent notamment des anomalies d’imagerie par résonance magnétique (IRM) comme des oedèmes ou des hémorragies (amyloid-related imaging abnormalities : ARIA) dont les conséquences cliniques ne sont pas connues. Enfin, les coûts très importants de ces traitements doivent être pris en compte.Les cas de l’aducanumab et du lécanémab illustrent les controverses entourant ces traitements. Bien que l’aducanumab ait montré une réduction des plaques amyloïdes, les résultats cliniques n’étaient pas concluants et les effets indésirables préoccupants. Le lécanémab, quant à lui, a obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) aux États-Unis malgré des résultats modestes et des craintes similaires concernant les ARIA. Cette molécule qui s’administre par perfusion, a obtenu une AMM de la Commission européenne le 15 avril 2025, après beaucoup d’hésitation.Enfin, le donanémab en dépit d’un avis favorable des États-Unis et de la Grande-Bretagne, a reçu un avis défavorable de l’Agence européenne du médicament (EMA) le 28 mars 2025 en raison de la fréquence des effets indésirables de type ARIA.Ainsi, l’expérience avec les anticorps monoclonaux n’est pas convaincante car les échecs surpassent les succès. L’utilisation restreinte de ces médicaments est indispensable, en tenant compte des caractéristiques des patients et en assurant un suivi rigoureux pour minimiser les risques associés. D’autres voies de recherche devraient être explorées.
Gilles Bouvenot, professeur émérite à la faculté de médecine de Marseille, membre de l’Académie nationale de médecine
22 avril 2025