La production d’hormones thyroïdiennes (TH), en particulier la triiodothyronine (T3) et la thyroxine (T4), repose sur l’agencement des cellules folliculaires de la thyroïde en structures 3D monocouches appelées follicules, composés de cellules épithéliales polarisées. L’espace interfolliculaire contient un groupe de cellules productrices de calcitonine (cellules C) ainsi qu’un vaste réseau de vaisseaux sanguins, facilitant le transport des TH vers les tissus cibles. Le compartiment stromal de la glande thyroïde est principalement constitué de fibroblastes ectomésenchymateux. Des études de transplantation ont montré que les organoïdes thyroïdiens murins et humains conservent leur fonctionnalité lorsqu’ils sont transplantés dans la capsule rénale de souris et restaurent donc la fonction thyroïdienne.En 2012, un modèle 3D a utilisé des cellules souches pluripotentes de souris pour induire l’expression transitoire des gènes NKX2.1 et PAX8, facilitant la différenciation vers la thyroïde. Un traitement par la TSH induisait la prolifération et la maturation. Après vingt-deux jours, des follicules fonctionnels ont été observés in vitro et leur potentiel de restauration de la fonction thyroïdienne in vivo a été évalué en greffant des follicules 3D matures dans la capsule rénale de souris athyroïdiennes. Quatre semaines après la transplantation, les cellules dérivées des cellules souches ont généré des follicules produisant de la T4 entourés de vaisseaux sanguins. De plus, chez des souris athyroïdiennes, les niveaux de T4 et de TSH se sont normalisés. Cette étude a mis en évidence la capacité de la transplantation d’organoïdes thyroïdiens à restaurer la fonction thyroïdienne.En 2022, il a été démontré que les cellules souches embryonnaires humaines peuvent se différencier en progéniteurs thyroïdiens par la surexpression transitoire de gènes clés. Un pool de follicules thyroïdiens produits a été transplanté dans la capsule rénale de souris NOD-SCID athyroïdiennes. Les analyses effectuées cinq semaines après la transplantation ont révélé une augmentation des taux de T4 et de T3 accompagnée d’une réduction des taux de TSH. L’analyse histologique a montré l’accumulation de T4 dans la lumière de la plupart des follicules, entourés de vaisseaux sanguins dérivés de l’hôte. Des cellules stromales ont également été observées dans le compartiment interfolliculaire, provenant du pool transplanté de cellules organoïdes.Les applications actuelles sont nombreuses : modélisation et nouvelles approches thérapeutiques de l’hypothyroïdie congénitale avec dysgénésie thyroïdienne, modélisation du cancer de la thyroïde et de la résistance à la TSH, investigation des effets de perturbateurs endocriniens, développement de thyroïde sur puce (thyroid-on-a-chip)...

Sabine Costagliola, Institut de recherche en biologie humaine et moléculaire, faculté de médecine de l’Université libre de Bruxelles, Belgique

14 janvier 2025