Ces plantes sauvages gagnent en popularité, au point d’être vendues sur les marchés et en supermarché, alors que leur consommation peut entraîner des intoxications parfois graves. Que faut-il savoir ?

L’asperge des bois, ou aspergette, est une plante sauvage de la famille des Asparagacées, qui pousse entre avril et juin dans les prairies, talus et bois de presque toute la France hexagonale et la Corse (v. figure). Elle est aussi vendue depuis quelques années sur les marchés ou dans certains supermarchés, et ses graines sont également commercialisées pour les jardins potagers particuliers.

Des intoxications parfois graves avec des symptômes ORL mettant en jeu le pronostic vital

Depuis quelques années, les Centres antipoison (CAP) enregistrent de plus en plus de cas d’intoxications rapportés par des personnes qui en ont consommé :

  • entre janvier 2010 et juin 2020, les CAP ont recensé 48 cas d’intoxication liés à des repas contenant des aspergettes : les symptômes étaient majoritairement des douleurs oropharyngées intenses, une sensation de gonflement dans la bouche ou la gorge et des difficultés pour avaler. Ces signes étaient retardés de 3 heures en moyenne par rapport au moment du repas ;
  • 1 cas d’intoxication grave mettant en jeu le pronostic vital a été rapporté au CAP de Nancy en mai 2019 : il s’agissait d’un patient ayant eu un œdème de Quincke associé à une urticaire généralisée 2 heures après le repas en question ; la personne ayant partagé ce repas a eu aussi ce type de symptômes, mais d’intensité plus faible ;
  • entre 2022 et 2023, 8 intoxications alimentaires collectives par des asperges des bois ont été rapportées aux CAP, touchant certains (mais pas tous) les convives des repas, tous sans antécédent d’allergie alimentaire. L’apparition des symptômes était aussi retardée, en moyenne 4 heures après le repas, et ils étaient majoritairement ORL (difficulté à avaler parfois intense, sensation d’œdème pharyngé ou de la bouche, voire œdème de Quincke), mais aussi digestifs, cutanés et respiratoires.

Les caractéristiques de ces cas, notamment le délai de survenue des symptômes, ne font pas suspecter un mécanisme allergique ou d’irritation immédiate.

Les cristaux d’oxalate de calcium suspectés

Pour identifier les causes de ces intoxications, le CAP de Nancy et la Faculté de pharmacie de Paris ont donc réalisé une étude entre 2022 à 2023 avec le soutien de l’Anses. Ils ont analysé des échantillons d’asperges des bois collectés auprès des personnes intoxiquées et d’autres achetés sur des marchés.

Ces analyses ont mis en évidence la présence abondante de raphides d’oxalate de calcium, des cristaux microscopiques en forme de fines aiguilles. L’hypothèse la plus probable est donc que ces cristaux pourraient léser la peau et les muqueuses et faciliter le passage de substances inflammatoires ou toxiques, provoquant un œdème local. Elle est renforcée par la présence connue de ces cristaux dans d’autres plantes dont le caractère irritant au contact de la peau et des muqueuses est avéré (arum, dieffenbachia…).

La survenue retardée des symptômes pourrait s’expliquer par la présence de mucilages dans les aspergettes qui, étant donné leur viscosité, pourraient jouer un rôle facilitateur pour les raphides (les « emprisonnant » initialement puis les libérant progressivement au cours de la digestion).

Recommandations de l’Anses

En raison de la présence accrue des asperges des bois dans les commerces, une augmentation des cas d’intoxication est possible. L’Anses a donc recommandé :

  • dans l’immédiat : d’informer le public et les professionnels de santé sur les risques liés à leur consommation, afin notamment d’améliorer le signalement et la documentation de nouvelles intoxications ;
  • à plus long terme : elle incite les pouvoirs publics à envisager des mesures spécifiques pouvant aller jusqu’à l’interdiction de vente de ces plantes.

En cas de symptômes après consommation d’asperges des bois :

  • en cas de détresse vitale, appeler le 15 ou le 112 ou le 114 pour les personnes malentendantes, en mentionnant la consommation d’asperges des bois ;
  • appeler un Centre antipoison ou consulter un médecin ;
  • une photographie des plantes prise avant cuisson peut aider à l’identification en cas d’intoxication ;
  • des restes du repas pourront aussi être analysés à la recherche de substances toxiques.

Pour en savoir plus
Anses. Vigilance lors de la consommation d’asperges des bois. 3 avril 2025.
Vigil’Anses. Asperges des bois : sont-elles vraiment comestibles ? 16 décembre 2024.

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