Une étude publiée dans le Lancet par une équipe de l’Institut Curie nuance l’utilité de la chimiothérapie adjuvante après chirurgie, en démontrant qu’elle n’apporte pas de bénéfice significatif de survie chez les femmes de 70 ans et plus atteintes d’un cancer du sein.

Alors que l’hormonothérapie est un traitement adjuvant standard pour les femmes âgées atteintes d’un cancer du sein hormonosensible positif aux récepteurs des œstrogènes (ER+) et HER2 négatif, le rôle de la chimiothérapie est débattu.

Des chercheurs de l’Institut Curie ont donc évalué l’impact d’une chimiothérapie adjuvante sur le taux de survie global de patientes souffrant d’une tumeur de ce type à haut risque, selon le Genomic grade index (GGI). Un essai de supériorité randomisé de phase III (ASTER 70) a été mené sur 1 089 patientes de ≥ 70 ans (âge médian : 75,1 ans ; IQR 72,5 – 78,7) avec des tumeurs à haut risque GGI, parmi 84 centres en France et en Belgique. Les patientes avaient subi une chirurgie pour un cancer du sein ER+ primaire ou en rechute (forme localisée). 40 % de la cohorte (N = 437) avait une fragilité gériatrique (score du questionnaire gériatrique G8 ≤ 14). Les patientes ont été réparties suivant un ratio 1 :1 en 2 groupes de manière aléatoire : le 1er (N = 541) a reçu 4 cycles de chimiothérapie à base de taxane ou d’anthracycline toutes les 3 semaines suivis d’une hormonothérapie, le 2e (N = 548) a reçu une hormonothérapie seule.

Les résultats sont parus en août 2025 dans le Lancet.1 Après un suivi médian de 7,8 ans (IC 95 % = 7,5 - 7,8), les résultats montrent que l’ajout de la chimiothérapie en complément à l’hormonothérapie n’apporte pas de bénéfice significatif en termes de survie globale. À 4 ans, le taux de survie était de 90,5 % (IC 95 % = 87,6 – 92,8) dans le groupe avec chimiothérapie contre 89,3 % (86,2 - 91,6) dans le groupe sans. À 8 ans, les taux étaient de 72,7 % (67,8 - 77,0) et 68,3 % (63,3 - 72,7), respectivement, sans différence significative entre les deux groupes. Sur le plan de la tolérance, la chimiothérapie s’est révélée nettement plus toxique que l’hormonothérapie. Des effets indésirables de grade ≥ 3 ont été observés chez 34 % (N = 183) des patientes du groupe avec chimiothérapie contre 9 % (N = 52) dans le groupe sans. Une détérioration significative de la qualité de vie des patientes du 1er groupe a également été observée avec différents effets indésirables : fatigue, chute des globules blancs, anémie, fièvre, troubles digestifs et baisse d’autonomie.

Selon les auteurs, ces résultats incitent à privilégier une stratégie de désescalade thérapeutique raisonnée chez ces patientes âgées, en réservant la chimiothérapie adjuvante à des cas spécifiques.