L’obésité est une maladie chronique définie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme un excès de masse grasse ayant un effet néfaste pour la santé avec, comme seuil, un indice de masse corporelle (IMC) supérieur ou égal à 30 kg/m², selon la Haute Autorité de santé (HAS).
La prévalence de cette maladie est en progression constante dans les populations adultes et pédiatriques, indépendamment des programmes de prévention.1 En France, 8,5 millions de personnes (17 % de la population) sont en situation d’obésité.2 Or l’obésité augmente la survenue de nombreux cancers (colorectal, prostatique, mammaire, utérin, biliaire, ovarien, etc.) de 7 à 41 % selon les séries.3 En outre, plusieurs anomalies métaboliques sont fortement associées à l’obésité, telles que le diabète de type 2 (DT2) et la stéatose hépatique, ainsi que des pathologies lithiasiques et endocriniennes. Plus de la moitié des patients en situation d’obésité ont une hypertension artérielle (HTA) et jusqu’à 35 % d’entre eux une insuffisance coronarienne. L’obésité augmente considérablement les risques d’insuffisance cardiaque, d’accident vasculaire cérébral et d’événements thromboemboliques artériels et veineux, ces derniers étant jusqu’à six fois plus élevés chez les patients en situation d’obésité de grade III. Les complications ostéo-articulaires (arthrose, lombalgies chroniques), respiratoires et le retentissement psychosocial sont également à prendre en compte dans l’augmentation de la mortalité globale des patients en situation d’obésité. La mortalité toutes causes confondues augmente en effet de façon linéaire avec l’IMC dès le stade de surpoids (IMC supérieur ou égal à 25 kg/m2). Ainsi, un homme et une femme dont l’IMC dépasse 40 kg/m² ont respectivement neuf et presque huit ans d’espérance de vie en moins par rapport à la population générale.4
Une chirurgie à double objectif
La chirurgie bariatrique est un traitement efficace de l’obésité en seconde intention, après un traitement médical bien conduit durant six à douze mois. Entre 2022 et 2024, la HAS a mis à jour ses recommandations concernant la chirurgie bariatrique, les précédentes datant de 2009. Plusieurs techniques ont fait la preuve de leur efficacité. Ces interventions chirurgicales peuvent être restrictives (anneau, sleeve gastrectomie) en réduisant la taille de l’estomac, ou peuvent associer de la malabsorption à des degrés divers selon la procédure (bypass ou duodenal switch) en modifiant l’anatomie du système digestif. Les pertes de poids obtenues grâce à ces interventions sont significatives et durables. Ainsi, près de 3 % de la population française a bénéficié d’une chirurgie bariatrique, avec un nombre croissant d’interventions (fig. 1).
La prévalence du DT2 augmente parallèlement à celle de l’obésité et concerne 3,5 millions de patients en France, dont près de la moitié n’atteignent pas leur objectif glycémique en dépit d’un arsenal thérapeutique toujours croissant. Devant la nécessité d’améliorer les soins du patient atteint de DT2, le concept de chirurgie métabolique a émergé ces dernières années.5 La chirurgie bariatrique, indiquée dans l’obésité sévère, a démontré des effets spectaculaires, supérieurs à ceux induits par une prise en charge médicale, sur le métabolisme glucidique, grâce à des mécanismes complexes. Elle permet, à moyen terme, de limiter les complications micro- et macroangiopathiques du DT2, sources de mortalité précoce dans cette population. D’après les résultats des essais randomisés, la HAS, dans son rapport d’octobre 2022, a émis un avis favorable pour proposer la chirurgie métabolique aux patients atteints de DT2 et d’obésité de grade I (IMC égal ou supérieur à 30 kg/m²) dont l’équilibre glycémique n’est pas à l’objectif – soit plus de 1,7 million de patients actuellement en France.6 La chirurgie métabolique peut ainsi être proposée aux patients atteints de DT2 et d’obésité de grade I dans le cadre du soin courant.
Techniques chirurgicales recommandées par la Haute autorité de santé
Quatre techniques sont actuellement recommandées par la HAS : la sleeve gastrectomie, le bypass gastrique, l’anneau gastrique et le duodenal switch.
La gastrectomie longitudinale, ou sleeve gastrectomie (SG), est la plus fréquemment réalisée et représente plus de la moitié des interventions en France.7
Le duodenal switch est une intervention très efficace mais associée à une morbidité supérieure aux autres interventions, raison pour laquelle elle est peu réalisée et ne sera pas abordée dans cet article. De nombreuses autres techniques sont en cours d’évaluation et ne peuvent être réalisées que dans le cadre d’essais cliniques.8
Sleeve gastrectomie
La SG est une procédure restrictive qui consiste à retirer une grande partie de l’estomac dans sa portion longitudinale afin de réduire sa capacité d’environ deux tiers (fig. 2). Cette intervention est irréversible et est le plus souvent réalisée par laparoscopie (cœlioscopie). L’intervention est de courte durée (environ une heure) et nécessite vingt-quatre à quarante-huit heures d’hospitalisation. Le mécanisme principal à l’origine de la perte de poids est fondé sur une satiété plus précoce. Les patients doivent être informés que la prise alimentaire doit être adaptée en conséquence : fractionnée et de durée allongée.
Bypass gastrique de Roux-en-Y
Le bypass gastrique de Roux-en-Y (ou Roux-en-Y gastric bypass [RYGB]) est une intervention restrictive et malabsorptive qui crée une petite poche gastrique avec un montage en Y (fig. 3). Un court-circuit de la partie initiale de l’intestin grêle (anse biliaire) est effectué ; les aliments passent directement dans l’anse alimentaire et sont digérés au moment où ils se mêlent aux sécrétions biliaires et pancréatiques, créant ainsi une malabsorption, responsable de la perte de poids. Cette technique est le plus souvent réalisée par laparoscopie et nécessite une courte hospitalisation de vingt-quatre à quarante-huit heures. L’alimentation peut être reprise précocement après l’intervention.
Anneau gastrique ajustable
L’anneau gastrique ajustable (AGA) est une intervention qui consiste à placer un anneau ajustable autour de la partie supérieure de l’estomac pour limiter l’apport alimentaire (fig. 4). Cette technique est aujourd’hui quasiment abandonnée et trouve ses dernières indications chez les patients ne tolérant pas la malabsorption et/ou nécessitant une technique facilement réversible.
Indications et contre-indications de la chirurgie bariatrique et métabolique
Les indications opératoires ont fait l’objet de recommandations de la HAS, publiées en 2022 et complétées en février 2024.9 C’est à cette occasion que la chirurgie métabolique a été distinguée de la chirurgie bariatrique : la chirurgie métabolique s’adresse aux patients diabétiques de type 2 avec un IMC supérieur ou égal à 30 kg/m² et chez lesquels un équilibre glycémique n’a pas pu être atteint malgré une prise en charge médicale bien conduite d’au moins douze mois.
Le choix de la technique chirurgicale est fait à l’occasion d’une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) dédiée et en fonction des antécédents de chaque patient. Il n’est pas opportun d’orienter davantage vers une technique qu’une autre avant l’avis de la RCP obésité.
Indications
En cas d’échec d’une prise en charge pluridisciplinaire bien conduite durant six à douze mois impliquant diététiciens, pharmaciens, infirmiers, infirmiers en pratique avancée, sages-femmes, psychologues, psychiatres, médecins du travail, enseignants en activité physique adaptée, masseurs-kinésithérapeutes, ergothérapeutes, éducateurs sportifs, travailleurs sociaux, la chirurgie bariatrique est indiquée dans les situations suivantes :
- IMC supérieur ou égal à 40 kg/m² (IMC maximal atteint et observé lors d’une consultation) ;
- IMC entre 35 et 40 kg/m², associé à au moins une comorbidité susceptible d’être améliorée par la chirurgie, dont :
- DT2 ;
- HTA bien traitée ;
- hypertriglycéridémie résistante supérieure à 5 g/L ;
- stéatohépatite non alcoolique (NASH) ou fibrose hépatique (la stéatose hépatique isolée n’est pas une comorbidité retenue pour indiquer la chirurgie bariatrique) ;
- syndrome des ovaires polykystiques chez la patiente en âge de procréer ;
- hypofertilité chez l’homme ou la femme avec un projet d’assistance médicale à la procréation (AMP), sur proposition de l’équipe d’AMP ;
- maladie rénale chronique (jusqu’au stade d’insuffisance rénale chronique modérée : stade 3A ou 3B) après avis du néphrologue (grade C), voire insuffisance rénale sévère ou terminale avec un projet de transplantation rénale ;
- cirrhose classée Child A, après accord avec l’hépatologue ;
- syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) avec un indice d’apnées-hypopnées supérieur ou égal à 15/h ;
- asthme sévère en lien avec l’obésité, après avis d’un spécialiste ;
- lombalgies chroniques, coxarthrose, gonarthrose invalidantes documentées, après avis d’un spécialiste confirmant les bénéfices attendus par la perte de poids ;
- incontinence urinaire invalidante, résistante aux traitements spécifiques bien conduits, après confirmation par un spécialiste que la perte de poids post-chirurgie bariatrique pourrait améliorer les troubles urinaires ;
- hernie pariétale ou éventration symptomatique ou complexe, dont le traitement chirurgical impose une perte de poids avant la chirurgie dédiée ;
- hypertension intracrânienne idiopathique résistante à une prise en charge neurologique bien conduite ;
- présence d’un handicap moteur avec ou sans paraplégie. La discussion se fait alors au cas par cas avec les spécialistes impliqués, et après avis d’une RCP spécifique confirmant l’amélioration potentielle de ces troubles par la chirurgie bariatrique.
La chirurgie est réalisable entre l’âge de 18 et 60 ans. Entre 60 et 70 ans, une évaluation est recommandée en fonction de la balance bénéfices-risques. Elle ne doit pas être envisagée au-delà de 70 ans.
Contre-indications
Les contre-indications regroupent :
- les troubles psychiatriques graves ;
- les troubles du comportement alimentaire non traités ;
- la toxicomanie ;
- les contre-indications anesthésiques ;
- les maladies incurables (pour un cancer datant de moins de cinq ans, un avis oncologique circonstancié est nécessaire).
Les handicaps moteurs et les obésités génétiques avec ou sans déficience intellectuelle ne constituent pas une contre-indication par eux-mêmes, mais ces situations doivent être discutées en RCP spécialisées.
Bénéfices et résultats escomptés
La chirurgie bariatrique peut entraîner une perte de poids significative et durable, ce qui peut améliorer considérablement la santé et la qualité de vie des patients en situation d’obésité. Outre la perte de poids, de nombreux patients bénéficient d’une amélioration ou d’une rémission des comorbidités associées à l’obésité, telles que DT2, HTA, dyslipidémie, SAHOS ou pathologies rhumatologiques.
Pas de perte de poids sans mesures hygiénodiététiques
Les patients ne perdent du poids que s’ils suivent des mesures hygiénodiététiques strictes en parallèle de la chirurgie. Il est illusoire d’espérer une perte de poids efficace et durable sans modification profonde des habitudes alimentaires. Il faut bien expliquer aux patients qu’une perte de poids initiale est ensuite suivie d’une légère reprise n’excédant pas 10 % du poids perdu.10 La perte de poids initiale dépend de l’intervention pratiquée et de l’observance des modifications diététiques et du mode de vie, avec un maximum atteint à un an postopératoire.
La perte pondérale moyenne rapportée un an après anneau, SG ou RYGB est respectivement d’environ 15 %, 25 % et 35 %.
Toutes les interventions exposent à une reprise pondérale, qui semble cependant moins marquée à dix ans d’un RYGB.11
Efficace contre le diabète de type 2 et l’HTA
La chirurgie bariatrique a également des effets très bénéfiques sur le DT2. Une quinzaine d’essais cliniques randomisés ont démontré la supériorité du traitement chirurgical par rapport aux traitements médicamenteux pour traiter le DT2. Les résultats de ces essais indiquent des taux de rémission allant jusqu’à 75 %, 37 % et 25 % à deux, cinq et dix ans après RYGB contre 0 % dans le groupe thérapie médicale intensive.
La récidive de DT2 a été chiffrée à 30 % dans des cohortes de patients suivis durant huit ans après chirurgie bariatrique. Toutes ces études montrent néanmoins une amélioration importante du contrôle glycémique (- 0,8 % d’hémoglobine glyquée [HbA1c]) après chirurgie bariatrique, avec une réelle diminution du nombre de médicaments nécessaires au contrôle glycémique, bénéfice majeur.
Les complications du diabète (micro- et macroangiopathies) répondent également très bien à la chirurgie bariatrique, diminuant ainsi la mortalité liée au DT2.
À noter qu’il a bien été montré que plus le diabète est récent et moins il est sévère, meilleures sont les chances d’obtenir une rémission précoce et durable.
Les taux de rémission de l’HTA varient de 20 à 40 % après chirurgie bariatrique.
Ces bénéfices ont un impact direct avec une augmentation significative de l’espérance de vie de trois à cinq ans pour les patients opérés, comparée aux seules mesures médicamenteuses et diététiques.12 Cet effet est à relier à une diminution du risque de cancer et d’événements cardiovasculaires. Cette augmentation est même de neuf ans chez les patients atteints de DT2.
Des risques et complications à ne pas négliger
Les études de cohorte affichent des taux de mortalité postopératoire compris entre 0,09 et 0,2 % après RYGB et SG.13,14 La morbidité postopératoire globale moyenne varie de 10 à 17 %. Les taux moyens de réintervention sont compris entre 3 et 7 % pour la SG et le RYGB. Les motifs les plus fréquents de réadmission après quatre-vingt-dix jours, pour le RYGB et la SG, sont la lithiase biliaire symptomatique (30 %) et les douleurs abdominales d’origine indéterminée (30 %). La chirurgie bariatrique comporte des risques et des complications qui doivent être dépistées par le médecin généraliste.
Complications postopératoires précoces
Quatre types principaux de complications précoces sont à connaître :
- les fuites au niveau des sutures ou des anastomoses gastro-intestinales peuvent survenir dans environ 1 % des cas, entraînant péritonite, abcès ou fistules. Les symptômes incluent la tachycardie, la fièvre et une douleur abdominale intense ;
- une hémorragie postopératoire (1 à 4 %) peut nécessiter une reprise chirurgicale précoce ;
- les patients en situation d’obésité ont un risque accru d’événements thromboemboliques (0,5 à 1 %). Une anticoagulation prophylactique par héparine de bas poids moléculaire en deux injections journalières sans dépasser 10 000 UI anti-Xa est prescrite durant la période postopératoire pour une période minimale de dix jours ;
- les patients peuvent développer des complications respiratoires telles qu’atélectasie, pneumonie ou embolie pulmonaire.
Complications à moyen et long termes
Risque de carences nutritionnelles
Toutes les procédures chirurgicales comportent un risque de carences vitaminiques, principalement en raison d’apports insuffisants initialement ou en cas de complication, et a fortiori après une procédure malabsorptive (RYGB). Les patients opérés doivent recevoir une supplémentation en multivitamines, en fer et en calcium pendant la phase de perte de poids après SG, ou à vie après RYGB.15 À noter qu’un non-respect de cette supplémentation peut entraîner des complications sévères et irréversibles (conséquences neurologiques si carence en vitamine B, par exemple).
Autres complications
Des rétrécissements ou des occlusions peuvent se développer au niveau des anastomoses, provoquant nausées, vomissements et dysphagie. Dilatations endoscopiques ou révisions chirurgicales peuvent alors être nécessaires.
Le syndrome de dumping est un phénomène qui concerne 5 à 10 % des patients ; il se produit souvent après un bypass gastrique, en raison d’une vidange rapide du contenu gastrique dans l’intestin grêle, provoquant des symptômes tels que tachycardie, sueurs, nausées et crampes abdominales.
Les ulcères anastomotiques entraînent des douleurs abdominales et épigastriques modifiant la prise alimentaire. En cas d’échec du traitement médical, l’évolution naturelle se fait vers la sténose ou la perforation.
La perte de poids rapide peut entraîner la formation de calculs biliaires. Un traitement par acide urso-désoxycholique est prescrit dans la période postopératoire afin de prévenir la survenue de lithiases symptomatiques. La cholécystectomie est réalisée seulement en cas de calculs vésiculaires symptomatiques, comme dans la population générale.
Les patients peuvent développer des hernies internes, en particulier après un RYGB, entraînant des douleurs abdominales récurrentes et des occlusions intestinales intermittentes. L’apparition de douleurs abdominales, même intermittentes, après un bypass relève d’un avis chirurgical systématique, en urgence.
Le reflux gastro-œsophagien (RGO) est une complication fréquente après une SG : 20 à 30 % de nouveaux cas ; persistance ou aggravation des symptômes chez plus de 80 % des patients qui avaient des symptômes de pyrosis en préopératoire. Si le traitement médical et les modifications alimentaires (fractionnement des repas) ne permettent pas de contrôler les symptômes, le RGO doit être documenté par des examens complémentaires afin de discuter la balance bénéfices-risques d’une conversion en RYGB.
Rôle du médecin généraliste
En 2020, 7,6 % des Français avaient consulté un médecin au cours des douze derniers mois pour un problème de poids, soit 3,8 millions de personnes. Le rôle du médecin généraliste commence lorsqu’il doit aborder la question de l’excès pondéral et informer le patient. La HAS recommande de demander l’accord du patient pour aborder un problème pondéral lorsqu’il existe. Il est conseillé de ne plus parler de « patient obèse » ou d’« obèse » mais de « patient en situation d’obésité » afin de ne pas réduire le patient à son état pondéral.
Il existe plus de 50 % de perdus de vue à cinq ans. La reconnaissance et la formation des médecins généralistes pour le suivi sont donc des éléments majeurs étant donné le nombre de patients opérés en France (environ 3 % de la population).
Il revient au médecin généraliste de connaître les comorbidités liées à l’obésité et de savoir les prendre en charge ou orienter vers le spécialiste ad hoc. Le médecin généraliste doit aiguiller le patient demandeur vers un nutritionniste, un diététicien ou un chirurgien pour débuter une prise en charge de l’obésité lorsqu’il estime que cela est nécessaire, et si le patient le souhaite.
Avant une intervention chirurgicale, les médecins peuvent aider à évaluer l’éligibilité du patient, fournir un soutien émotionnel et assurer la coordination du parcours de soins avec l’équipe spécialisée.
Les médecins généralistes jouent également un rôle crucial dans la prise en charge des patients après la chirurgie bariatrique dans le cadre de la surveillance postopératoire : ils sont impliqués dans le suivi et la bonne observance des recommandations à long terme ; ils fournissent un soutien continu pour favoriser le respect des mesures hygiénodiététiques en lien avec l’équipe pluridisciplinaire.
Cas particulier de l’enfant
Chez l’adulte, l’IMC est utilisé comme seul critère pour repérer et évaluer l’excès pondéral. Chez l’enfant, les normes d’IMC doivent être interprétées en fonction de l’âge et du stade de croissance au moyen des courbes d’IMC pour l’âge. En 2020, 37 % des enfants de 2 à 7 ans étaient en surpoids et 18 % en situation d’obésité. Chez les enfants de 8 à 17 ans, 15 % étaient en surpoids et 6 % en situation d’obésité.2
Retentissement majoré des complications de l’obésité
Chez l’enfant et l’adolescent, les complications de l’obésité sont multiples et similaires à celles de l’adulte, mais leur retentissement est plus important : elles ont un impact hormonal influant sur la puberté, soit en l’avançant, soit en la retardant. Les complications orthopédiques peuvent s’aggraver durant la croissance osseuse. Les conséquences psychopathologiques peuvent être délétères car elles surviennent dans une période complexe durant laquelle l’enfant ou l’adolescent est en pleine construction.
Chirurgie bariatrique chez l’enfant : encadrée et en dernier recours !
Chez l’enfant ou l’adolescent, l’objectif est le ralentissement de la prise de poids plutôt que la perte, pour permettre à la taille de « rattraper » le poids sur la courbe et donc de retrouver un IMC normal.
Des recommandations concernant la chirurgie bariatrique chez les mineurs ont été publiées par la HAS en 2016.16
La HAS recommande une prise en charge médicale de l’obésité en première intention, faisant intervenir les mêmes mesures hygiénodiététiques que pour l’adulte, en complément d’une éducation thérapeutique renforcée et d’un accompagnement psychologique. La chirurgie chez les enfants et adolescents ne doit s’envisager qu’en dernier recours. Elle n’est efficace qu’en cas de modifications des habitudes alimentaires. Les techniques recommandées sont les mêmes que chez l’adulte.
L’adolescent doit remplir quatre critères pour qu’une chirurgie bariatrique soit indiquée :
- être âgé de 15 ans minimum (au cas par cas entre 13 et 15 ans) ;
- avoir atteint un stade de puberté et de croissance suffisant ;
- avoir un IMC supérieur à 35 kg/m2 avec au moins une comorbidité sévère ou un IMC supérieur ou égal à 40 kg/m2 avec une altération majeure de la qualité de vie (physique ou psychologique) ;
- avoir une maturité psychologique permettant une pleine compréhension des tenants et aboutissants d’une telle chirurgie (suivi à vie, changements du mode de vie).
Dans tous les cas, la prise en charge doit être réalisée dans un centre spécialisé de l’obésité (CSO) à composante pédiatrique, et les indications sont discutées au cas par cas lors d’une RCP par une équipe pluridisciplinaire formée et expérimentée.
Que dire à vos patients ?
Le patient ne se réduit pas à son état pondéral. On ne parle pas d’obèse mais de patient en situation d’obésité.
L’obésité est une maladie chronique qui nécessite une prise en charge globale multidisciplinaire à vie.
La chirurgie fait désormais partie de l’algorithme thérapeutique du diabète de type 2, elle est alors dite « chirurgie métabolique ».
La chirurgie bariatrique ne répond pas à un désir de perdre du poids dans un but esthétique mais vise à faire sortir le patient de la zone rouge de l’obésité sévère, synonyme de surmorbidité médicale et de mortalité précoce.
La chirurgie bariatrique s’envisage dans des indications bien précises, pour des patients suivis et traités.
Une perte de poids importante et durable passe avant tout par une modification pérenne du mode de vie et des habitudes alimentaires ainsi que le maintien du suivi durant toute la vie.
Il existe des associations de patients en situation d’obésité qui peuvent apporter un soutien.
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16. Haute Autorité de santé. Chirurgie de l’obésité pour les moins de 18 ans : à n’envisager que dans des cas très particuliers. 2021. https://bit.ly/4crZNys
Dans cet article
- Une chirurgie à double objectif
- Techniques chirurgicales recommandées par la Haute autorité de santé
- Indications et contre-indications de la chirurgie bariatrique et métabolique
- Bénéfices et résultats escomptés
- Des risques et complications à ne pas négliger
- Rôle du médecin généraliste
- Cas particulier de l’enfant