Les traumatismes crâniens légers liés à une pratique sportive sont fréquents, notamment chez les enfants et jeunes adultes, avec des conséquences aiguës et chroniques potentiellement graves (maladies neurodégénératives, SLA…). Des recommandations de prévention, diagnostic, prise en charge et suivi ont été éditées par l’Académie de médecine, complétant les toutes récentes recos du ministère. Tour d’horizon pour le MG.

Une entité de mieux en mieux connue

La commotion cérébrale (CC) est un traumatisme crânien léger survenu au cours de la pratique sportive. Selon la définition du Concussion in Sport Group (2022), il s’agit d’une lésion :

  • due à la transmission d’une force d’impulsion externe générée par un impact soit direct à la tête (heurtée par un objet, une autre tête, une surface dure…) soit sur d’autres parties du corps entraînant des lésions d’impacts et d’inertie de la tête (accélération ou décélération lors d’une collision ou d’une chute, par exemple) ; cette force d’impulsion entraîne des déformations mécaniques dans le cerveau et des variations de pression ;
  • engendrant un dysfonctionnement cérébral immédiat et transitoire, secondaire à des modifications structurelles cérébrales microscopiques et à une cascade d’événements neurométaboliques avec de possibles lésions axonales, variations du débit sanguin cérébral et réaction inflammatoire.

Des impacts dits « sous-commotionnels » sont aussi possibles : il s’agit de chocs n’entraînant pas de symptômes, mais responsables d’un dysfonctionnement neuronal transitoire. Lorsqu’ils sont répétés, ils pourraient induire aussi des effets secondaires à long terme.

Depuis une vingtaine d’années, les conséquences des CC sur la santé à court et long termes font l’objet d’un intérêt croissant. Leur incidence au cours de la pratique sportive reste néanmoins assez mal documentée. Il est estimé qu’elles représentent 5 à 9 % de tous les traumatismes liés à la pratique du sport, mais cette proportion est très variable en fonction du type de sport – les sports de contact, ceux utilisant des objets projetés (ballons, balles…) ou des équipements spéciaux (crosses), ou mettant en jeu des vitesses de déplacement importantes étant les plus à risque.

Les enfants et adolescents, ainsi que les femmes, ont un risque accru de survenue et de sévérité des lésions. En effet, 30 % des CC touchent des sportifs d’entre 5 et 19 ans ; les enfants sont plus vulnérables à leurs conséquences, en raison notamment de l’immaturité de leur système nerveux central. Les femmes, quant à elles, ont un risque doublé de CC par rapport aux hommes au cours de la pratique du même sport, avec des effets délétères plus sévères, même exposées au même niveau d’impact (dysfonctions cognitives plus fréquentes, période de récupération des fonctions plus longue…). La répétition des CC est un autre facteur de risque de sévérité.

Leurs conséquences à long terme ont fait l’objet de plusieurs études. Il existe de nombreux arguments épidémiologiques en faveur du lien entre les CC et le développement de maladies neurodégénératives, encéphalopathie chronique traumatique, sclérose latérale amyotrophique ou maladie d’Alzheimer. Bien que les études disponibles aujourd’hui soient encore limitées et aient des biais méthodologiques (absence de quantification des épisodes, mauvais contrôle des facteurs confondants…), les conséquences des CC chez les sportifs de haut niveau sont de mieux en mieux documentées. Pour les sportifs amateurs et les pratiquants réguliers d’une activité physique, il n’existe en revanche que très peu de données.

En pratique : diagnostic, prise en charge aiguë, suivi

Le diagnostic de CC est complexe : il n’existe pas de test diagnostic objectif validé et les symptômes sont peu spécifiques (céphalées, cervicalgies, changements d’humeur, fatigue, vertiges, altérations de la vision…). De plus, ces signes peuvent survenir à distance de l’impact initial ou ne pas être reconnus par le patient. Pour aider le diagnostic, de nouvelles méthodes (neuro-imagerie, biomarqueurs) sont à l’étude mais ne sont pas validées actuellement.

La démarche diagnostique a été codifiée dans des recommandations françaises de 2024, qui reprennent les critères américains et internationaux. Ainsi, quand un sportif souffre d’un impact selon les caractéristiques précédemment décrites, le diagnostic de CC peut être confirmé en présence :

  • d’un seul des signes détaillés dans le tableau 1 ci-contre, observés ou rapportés après l’impact et non expliqués par une autre cause ;
  • au moins deux des signes du tableau 2 ci-contre, inhabituels ou exacerbés, observés ou rapportés moins de 72 h après l’impact, non expliqués par une autre cause, et associés à l’une des anomalies consignées dans le tableau 3.

L’arrêt de l’activité sportive et une orientation aux urgences s’imposent en présence des critères consignés dans l’encadré ci-dessous (rappelés par la couleur grise dans les tableaux ci-contre).

La mise au repos est de rigueur dans le reste des cas : arrêt de l’activité physique, sans reprise le même jour (maintien possible d’une activité légère telle que la marche), et évitement pendant 48 h au minimum de toute activité demandant une attention ou concentration soutenue (conduite, scolarité, travail, lecture ou écrans…). La prise de médicaments interférant avec la conscience est à bannir (somnifères, antalgiques de palier 2 ou 3, etc.). Enfin, l’athlète doit rester accompagné dans la soirée et la nuit suivant l’événement pour détecter toute anomalie (dormir dans la même chambre ou la porte ouverte, réveiller la personne une heure après le coucher et dans la nuit en cas de ronflements inhabituels).

Si l’examen clinique initial relève principalement des professionnels de santé présents sur le terrain et que le diagnostic est confirmé lors d’une consultation spécialisée, le médecin traitant a un rôle à jouer à distance de l’accident pour détecter l’apparition éventuelle de nouveaux symptômes et suivre la récupération des déficits fonctionnels.

Un outil spécifique est disponible pour ce suivi : le SCOAT6 (Sport Concussion Office Assessment Tool 6), disponible en français sur ce lien (avec un supplément explicatif ici). Utilisable du 3e au 30e jour après l’événement, il comprend des tests de rappel de la mémoire épisodique, une évaluation du contrôle orthostatique, un examen du rachis cervical, un examen neurologique classique, un test de marche avec double tâche et un rappel de mémoire différée.

Un syndrome post-commotionnel (symptômes persistant au-delà de 4 semaines) est possible, bien que dans 80 à 90 % les signes disparaissent dans les 10 à 14 jours qui suivent l’accident. Le risque de deuxième commotion est alors multiplié par 2 à 6, et celui de blessures de l’appareil locomoteur par 1,5 à 3. En fonction des symptômes, le patient est orienté vers les spécialistes correspondants.

Le retour progressif à l’activité sportive doit ensuite être personnalisé en fonction du risque : âge (pas avant 10 jours pour les adultes et 14 jours pour les enfants), antécédents de CC qui prolongent le délai… Le retour à la compétition ne peut être autorisé que par des médecins formés, après disparition de la symptomatologie et récupération des fonctions neurologiques altérées, notamment cognitives.

Prévention

L’Académie de médecine recommande la mise en place de stratégies de prévention primaire et secondaire à destination non seulement des sportifs de haut niveau, mais aussi des amateurs et de la population générale et des professionnels de santé :

  • la prévention des lésions repose sur une meilleure utilisation des équipements individuels de protection (casques, protections faciales, protège-dents…), mais aussi une préparation physique (renforcement des muscles sterno-cléido-mastoïdiens et des trapèzes, gestes techniques pour réduire le risque de lésions) ;
  • la prévention des conséquences à long terme des CC passe par une sensibilisation des professionnels de santé pour améliorer la détection précoce des lésions – notamment pour les sportifs amateurs qui ne côtoient pas des professionnels de santé spécialisés dans le sport –, le suivi et la récupération des patients atteints ;
  • l’adaptation des règlements sportifs permettrait aussi de prévenir les CC : arrêt du combat au bon moment en boxe, protocoles de détection à la sortie des matchs de rugby, limitation de « jeux de tête » dans le football notamment pour les enfants…

Encadre

Commotion cérébrale du sportif : critères de recours aux urgences sans délai

  1. Cervicalgie importante (une commotion cérébrale est associée à un traumatisme cervical jusqu’à preuve du contraire)
  2. Diplopie
  3. Déficit moteur ou paresthésies
  4. Céphalée importante ou croissante
  5. Vomissements (plus d’un épisode)
  6. Convulsions
  7. Perte de connaissance ou détérioration de l’état de conscience
  8. Nervosité, agitation ou agressivité croissantes
  9. Amnésie > 30 min autour du moment de la blessure
  10. Score de Glasgow < 15
  11. Signes de fractures de la base du crâne (écoulement clair par le nez ou l’oreille, hématome derrière l’oreille ou en lunettes), déformation du crâne
  12. Troubles de la coagulation sanguine connus, traitements anticoagulants
  13. Âge > 65 ans avec traitement par agent antiplaquettaire

Source : Ministère des Sports, 2024.

Pour en savoir plus
Bigard X, Vital JM. Les effets néfastes retardés du sport intensif. Partie 1 – Les commotions cérébrales dans le sport.  Académie nationale de médecine 4 février 2025.
Groupe de travail du ministère des sports et des JOP. Prise en charge de la commotion cérébrale. Recommandations générales pour la pratique sportive en France. Mars 2024.
Beauchamp M, Soligon CA, Frémont O. Les outils d’évaluation des commotions cérébrales dans le sport : CRT6, SCAT6®, Child SCAT6®, SCOAT6 et Child SCOAT6.  J Traumatol Sport 2024;41(1):216-7.

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