À la suite de messages alertant sur la dangerosité des AINS en cas d’infection par le Covid-19, nombre de patients atteints de pathologies chroniques s’inquiètent : peuvent-ils on non poursuivre leur traitement ? Plus largement, les inquiétudes se sont étendues à l’ensemble des traitements par corticoïdes, immunosuppresseurs et biothérapies. Quelques réponses pratiques, avec l’expertise du Pr Olivier Fain, chef de service de médecine interne à l’hôpital Saint-Antoine, Paris.

Des recommandations claires pour les AINS !

Des formes sévères de Covid-19 avec pneumonie grave ont été rapportées chez des sujets jeunes ayant pris des AINS. Ces constations ont rapidement donné lieu à des messages relayés par les autorités sanitaires, contre-indiquant leur prescription en cas de fièvre ou de douleurs. Le paracétamol doit être privilégié, sans dépasser la dose de 3 g/jour.

Néanmoins, se pose l’épineuse question des patients traités au long cours, en particulier pour des rhumatismes inflammatoires chroniques. La Société française de rhumatologie (SFR) préconise de ne prendre des AINS que si le contrôle des symptômes de la maladie rhumatologique le nécessite.

 

Qu’en est-il pour les corticoïdes ?

«Il ne faut surtout pas arrêter les corticoïdes brutalement », alerte le Pr O. Fain. « Le risque d’insuffisance surrénale aiguë est important chez des patients traités au long cours, sans parler du risque de rebond de la maladie. Plusieurs cas de figure se posent :

– en cas de corticothérapie au long cours à faible dose, moins de 10 mg/j, il ne faut rien changer ;

– en cas de dose journalière supérieure à 10 mg/j, la question ne doit se poser que si, et seulement si, le patient est symptomatique ! (fièvre et/ou signes respiratoires). Mais dans ce cas, il ne faut pas interrompre brutalement les corticoïdes, il faut alors s’en référer au médecin spécialiste qui suit le patient pour qu’il adapte le traitement ».

 

Et pour les corticoïdes inhalés ? 

« Il ne faut surtout pas les interrompre », comme le rappelle la Fédération française d’allergologie, car le risque est grand pour le patient de faire une crise d’asthme à l’arrêt de son traitement. Alors qu’un asthme stable ne semble pas être un facteur de risque d’infection par le SARS-CoV-2, la survenue d’une crise d’asthme sévère le fragiliserait dans ce contexte infectieux.

 

Et les immunosuppresseurs, les biothérapies….

L’ensemble des sociétés savantes fait consensus pour dire qu’il n’y a actuellement pas de données suggérant que les traitement immunosuppresseurs et/ou les biothérapies utilisés augmenteraient le risque d’infection Covid-19, ni même sa gravité ou sa durée. Il n’est donc pas recommandé d’interrompre le traitement de manière préventive chez un patient asymptomatique.

En cas de symptômes évocateurs (fièvre, toux, difficulté à respirer), un arrêt temporaire du traitement doit être discuté au cas par cas avec le médecin spécialiste référent, en fonction de la sévérité de la pathologie sous-jacente et du risque de poussée de la maladie.

Les autres mesures barrière doivent bien sûr être respectées comme pour n’importe quel patient, pour prévenir l’infection par le coronavirus.

Il est rappelé l’importance pour les patients sous immunosuppresseurs d’avoir toutes leurs vaccinations à jour, la gravité de l’infection à Covid-19 pouvant être liée à des infections secondaires bactériennes.

Une cohorte observationnelle prospective française a été mise en place sous l’égide de l’Inserm pour mieux connaître les risques liés au SARS-CoV-2 chez les patients immunodéprimés, notamment ceux traités par immunosuppresseurs.

 

Alexandra Karsenty, La Revue du Praticien

 

Pour en savoir plus :

Société nationale française de gastro-entérologie, Information Covid-19 : malades traités par corticoïdes, immunosuppresseurs (azathioprine, methotrexate, inhibiteurs de JAK), biothérapies pour des maladies intestinales, dermatologiques, rhumatologiques ou auto-immunes, 9 mars 2020.

Société française de rhumatologie, Information sur l’épidémie de coronavirus (Covid-19) destinée aux patients recevant un traitement immunosuppresseur pour une maladie rhumatologique inflammatoire ou auto-immune, 5 mars 2020.

FAI2R – Filière de santé des maladies auto-immunes et auto-inflammatoires rares, Recommandations Covid-19 : patients atteints de maladies auto-immunes ou auto-inflammatoires (mise à jour du jeudi 19 mars 2020).

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