Par la suite, les résultats des essais ACCORD, ADVANCE et VADT, réalisés chez des patients plus avancés dans leur maladie, étaient moins univoques mais ont confirmé l’impact favorable d’un contrôle glycémique rigoureux pour réduire le risque d’événements microvasculaires. Pour autant, dès cette époque, à la suite des résultats du versant « contrôle intensif de la pression artérielle » des essais UKPDS et ADVANCE puis de ceux d’études comme STENO- 2, il ne faisait déjà aucun doute que la prévention des complications vasculaires du DT2 exigeait également une prise en charge optimale de l’ensemble des facteurs de risque associés. Dès lors, ce double impératif a guidé la pratique clinique, structuré les recommandations et façonné les parcours de soins jusqu’au milieu des années 2010.
Cependant, depuis quelques années, une nouvelle transition s’est opérée : il ne s’agit plus seulement de viser des valeurs cibles pour l’HbA1c, la pression artérielle ou le LDL-cholestérol en additionnant des traitements, mais de proposer désormais des stratégies thérapeutiques sur mesure. À partir de 2015, l’avènement des agonistes des récepteurs du GLP- 1 (aGLP- 1) et des inhibiteurs de SGLT2 (iSGLT2) et la démonstration de leurs bénéfices sur le plan cardiovasculaire et rénal, largement indépendants de leur effet sur l’HbA1c ou les autres critères intermédiaires, ont profondément rebattu les cartes. De plus, l’efficacité des aGLP- 1 et des doubles aGIP/GLP- 1 sur le poids a également conduit à revoir leur place dans les arbres décisionnels de prise en charge dans une population particulièrement touchée par le problème.
Désormais, le clinicien est invité à adapter et individualiser la prise en charge du patient vivant avec un DT2, que ce soit en termes d’objectifs et de stratégies thérapeutiques, à partir d’une évaluation plus globale : âge (physiologique), espérance de vie, antécédents cardiovasculaires et rénaux, statut pondéral, niveau de risque cardiovasculaire, stéatose ou stéato-hépatite métabolique, comorbidités, fragilité, facteurs psychosociaux, capacités d’autogestion... Cette approche centrée sur le patient, respectant ses préférences et ses choix dans le cadre de la décision médicale partagée, invite à intégrer pleinement les dimensions cliniques, biologiques, psychologiques, sociales ou comportementales de cette maladie chronique. On est donc passé peu à peu d’une approche « glucocentrée » à une approche « holistique », intégrant toujours l’optimisation du contrôle glycémique pour réduire le risque de complications microvasculaires mais ne se résumant pas à ce seul objectif. Ce tournant peut sembler relever de la sémantique mais il constitue un véritable changement de paradigme qui se retrouve désormais au cœur de toutes les recommandations nationales et internationales de prise en charge du DT2. Celles-ci plaident aujourd’hui pour une hiérarchisation thérapeutique plaçant les bénéfices cardiovasculaires et rénaux ainsi que l’impact sur le poids au cœur des choix médicamenteux, et offrent donc, de fait, une place privilégiée aux aGLP- 1 et aux iSGLT2. Cette approche novatrice est par exemple illustrée par le changement de titre de la prise de position de la Société francophone du diabète sur le traitement du DT2. En 2021, le terme de « prise en charge médicamenteuse de l’hyperglycémie » a été remplacé par celui de « stratégies d’utilisation des traitements anti-hyperglycémiants ». Ce changement reflète le fait que la prescription d’un aGLP- 1 et/ou d’un iSGLT2 est désormais recommandée chez de nombreux patients, même lorsque la cible d’HbA1c est déjà atteinte.
Ce virage appelle à une diffusion très large des nouvelles recommandations de prise en charge du DT2 auprès de tous les acteurs de soins, en particulier auprès des médecins généralistes qui suivent seuls environ 85 % des patients vivant avec un DT2 dans notre pays. Ce travail de formation doit aussi s’accompagner d’une réorganisation plus profonde des soins : approche pluridisciplinaire et pluriprofessionnelle, montée en puissance de l’éducation thérapeutique, coordination ville-hôpital, recours au numérique…
Le passage d’une logique de « contrôle » à celle d’une « prise en charge globale » du patient vivant avec un DT2 ne constitue pas une simple évolution : c’est une véritable bascule de notre regard, un engagement vers une médecine plus personnalisée, plus intégrée et plus humaine.
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