Rappels anatomiques
Les principaux stabilisateurs ligamentaires latéraux de la cheville sont : le ligament talo-fibulaire antérieur, le ligament calcanéo-fibulaire et le ligament talo-fibulaire postérieur. Le ligament talo-fibulaire antérieur, avec ses faisceaux supérieur et inférieur, est le plus couramment lésé (fig. 1).
En cas d’entorse du ligament collatéral latéral de cheville, la plus fréquente, le mécanisme est indirect en varus équin forcé (traumatisme en inversion). Facteurs de risque : pratique des sports de saut et de pivot (football, basket, rugby, volley-ball, course à pied), vieillissement, surcharge pondérale.
Faire le diagnostic
Après un traumatisme en torsion de cheville, la HAS recommande un parcours de soins selon les étapes indiquées sur la figure 2.
La première consultation avec un médecin généraliste ou un masseur-kinésithérapeute (exerçant dans le cadre de l’accès direct ou d’un protocole national de coopération) doit être réalisée idéalement dans les 24 heures suivant le traumatisme ; elle est suivie d’une réévaluation à J5 -J7.
Lors de l’évaluation initiale, on examine l’intégrité des ligaments latéraux de l’articulation de la cheville et de la syndesmose. En cas d’entorse latérale, à la palpation, il existe une douleur sur le trajet du ligament collatéral latéral. Il faut rechercher une laxité pathologique par rapport au côté controlatéral (difficile en phase aiguë) : varus forcé et tiroir antérieur (encadré 1 et figures 3 et 4).
La positivité d’un des critères d’Ottawa fait suspecter une fracture ou un syndrome de la syndesmose et impose une radiographie de face et de profil :
- âge < 18 ans ou > 55 ans ;
- douleur à la palpation postérieure d’une des malléoles sur 6 centimètres de hauteur ;
- douleur à la palpation de la base du 5e métatarsien ou de l’os naviculaire ;
- incapacité de se mettre en appui ou de faire 4 pas.
Lors de l’évaluation à J5 -J7, la présence d’un des critères d’Ottawa et Bernois, de douleur aux premiers pas lors de la marche, le maintien d’une impotence fonctionnelle (ex. : maintien de l’usage d’aides techniques lors de la marche) ou de la consommation d’antalgiques de palier II doivent faire adresser le patient au spécialiste. En cas de signes faisant suspecter un syndrome de la syndesmose (douleur à la palpation du ligament tibio-fibulaire antéro-inférieur), demander une échographie de la cheville et du pied. En cas de persistance d’une importante impotence fonctionnelle à la marche, demander une radiographie standard si elle n’a pas été réalisée antérieurement ou, dans le cas contraire, d’une tomodensitométrie et/ou une échographie.
Drapeaux rouges et diagnostics différentiels
Les drapeaux rouges à rechercher lors des différentes étapes sont indiqués dans les figures ci-contre :
- en phase aigüe dans les 24 h après le traumatisme : figure 5
- entre J5 et J7 : figure 6
- entre J7 et J21, et à J21 : figure 7
Las diagnostics différentiels d’une entorse de cheville, nécessitant une prise en charge spécifique, sont indiqués dans le document téléchargeable ici.
Prise en charge : la rééducation doit être la plus précoce possible
La rééducation est le traitement de première intention à proposer aux patients ayant un diagnostic d’une entorse du ligament collatéral latéral. La HAS recommande de la débuter la plus précocement possible, durant la première semaine suivant le traumatisme à l’origine de l’entorse. En effet, il a été montré que plus la rééducation était initiée tôt, plus la probabilité de récidive et les coûts médicaux étaient faibles. Compte tenu des données scientifiques actuelles, il est recommandé d’encourager la marche et/ou de remettre progressivement en charge le membre inférieur atteint, en adaptant la contrainte selon les symptômes ressentis, afin d’accélérer la récupération fonctionnelle. La mobilisation passive des articulations de la cheville est recommandée en phase aiguë, mais elle n’est pas suffisante (elle n’est donc pas recommandée en monothérapie).
Associée à une rééducation précoce, une attelle souple peut être proposée en phase aiguë. En cas d’indication d’une immobilisation avec attelle rigide (si entorse de grade III), le temps de maintien ne devrait pas excéder 10 jours.
L’acupuncture, les ondes de choc, les ultrasons, la stimulation électrique neuromusculaire et le laser n’apportent pas d’effets supplémentaires aux mesures précédentes.
Après la phase aiguë, il est recommandé de poursuivre la rééducation avec des exercices de mobilité de cheville dans tous les plans de l’espace, d’équilibration et de performance neuromusculaire lors d’activités fonctionnelles (course, saut, réception). Cependant, l’état des connaissances est insuffisant pour recommander un type d’exercice ou une association d’exercices pour améliorer la récupération fonctionnelle.
Les critères de reprise de l’activité physique ou sportive sont :
- absence de douleur à la marche et lors de l’activité physique ou sportive souhaitée ;
- envie du sportif de reprendre l’activité antérieure ;
- score supérieur à 11 points à l’Ankle-GO.
Les critères d’arrêt de la rééducation sont indiqués dans l’encadré 2 ci-dessous.
Prévenir les récidives
La mesure la plus efficace pour réduire les risques de récidive d’entorse du ligament collatéral latéral de cheville et d’instabilité chronique est la rééducation basée sur des exercices. Le port d’une attelle souple ou d’un bandage (strap) peut être proposé pendant l’activité physique, en prévention d’une récidive.
Selon l’HAS, l’état des connaissances est insuffisant pour recommander le port d’orthèses ou de chaussures modifiées ou adaptées, en prévention d’un premier épisode d’entorse latérale, d’une récidive ou d’une instabilité chronique de cheville.
Outils pratiques et arbre décisionnels
Parcours de soins résumant ces recos : figure 8 (version détaillée de l'algorithme en p. 112 de ce document).
Fiche pour les patients à télécharger ici.
Tests cliniques à télécharger ici.
1. Tests cliniques pour le diagnostic de lésion du ligament collatéral latéral
Test du tiroir antérieur : patient en décubitus dorsal, genou fléchi à 90°, pied maintenu sur la table par l’examinateur ; ce dernier saisit le tiers inférieur de la jambe et le pousse vers l’arrière ; plus sensible et spécifique si pratiqué 5 jours après le traumatisme (Se = 96 % / Sp = 84 %, fig. 3) ;
Manœuvre du varus forcé : patient en décubitus dorsal, genou fléchi ; l’examinateur empaume d’une main le talon par sa face externe, en sous-malléolaire, et de l’autre main le quart inférieur de la jambe par sa face interne ; il porte le talon en varus tentant de faire bailler l’articulation de la cheville (Se = 88 % ; fig. 4).
2. Critères d’aide à la décision de fin de rééducation
Absence de douleur à l’Échelle Visuelle Analogique ;
Absence de reproduction de symptômes à l’examen de l’intégrité des ligaments de la cheville et du pied ;
Absence d’œdème lors de la réalisation de la « figure en huit » ;
Récupération complète des amplitudes (particulièrement la flexion dorsale de cheville) ;
Absence de différence de force musculaire globale de la cheville et du pied au dynamomètre ;
Absence de différence d’équilibre bipodal entre membres inférieurs au Modified Star Excursion Balance Test ;
Absence de différence d’équilibres unipodaux au Foot Lift Test ;
Score supérieur à 24 au Cumberland Ankle Instability Tool ;
Atteinte des objectifs et des préférences du patient ;
Scoredel’Ankle-Go au FAAM supérieur à 90 % pour les activités de la vie quotidienne et à 80 % pour les activités sportives.
HAS. Recommandation – Entorse du ligament collatéral latéral (ligament latéral externe) de cheville : diagnostic, rééducation et reprise de l’activité physique et de la pratique sportive. 3 avril 2025.
HAS. Argumentaire – Entorse du ligament collatéral latéral (ligament latéral externe) de cheville : diagnostic, rééducation et reprise de l’activité physique et de la pratique sportive. 3 avril 2025.
HAS. Fiche – Entorse du ligament collatéral latéral (ligament latéral externe) de cheville : diagnostic, rééducation et reprise de l’activité physique et de la pratique sportive. 3 avril 2025.