Face à la recrudescence d’infections à virus mpox dans un nombre croissant de pays d’Afrique, l’OMS a déclaré l’urgence de santé publique internationale. Pourquoi la situation est-elle préoccupante ? Quel risque en Europe ? Quelle conduite à tenir en MG selon les dernières recos ?

Un nouveau clade identifié

Il existe 2 clades d’orthopoxvirus simien (MPXV) : le clade I (ex-« bassin du Congo ») et le clade II (ex-« Afrique de l’Ouest », moins mortel) ; ce dernier est divisé en sous-clades IIa et IIb. Le clade IIb a été responsable de l’épidémie entre juillet 2022 et mai 2023, qui s’est propagée rapidement par contacts sexuels. Finalement peu meurtrière, elle avait donné lieu en France à la vaccination des sujets contacts et à une campagne de vaccination préventive des personnes à risque.

Quant au clade I, le sous-groupe Ia est endémique dans le bassin du Congo. Ce clade Ia, qui affecte majoritairement les enfants de moins de 15 ans, se transmet essentiellement par contacts rapprochés cutanés avec des animaux ou au sein du foyer via les lésions sur la peau. Récemment, une nouvelle souche virale (clade Ib) est apparue dans la République démocratique du Congo (RDC) depuis mai 2023, puis s’étend rapidement depuis peu au Burundi, au Kenya, au Rwanda et en Ouganda ; 96,3 % des cas se situent en RDC. Touchant surtout les personnes adultes, elle se transmet de manière privilégiée lors de contacts sexuels . Depuis le début de l’année 2024, l’OMS a rapporté des taux de létalité de 3,5 % sur l’ensemble des cas suspectés de contamination par les virus mpox de clade Ia et Ib en RDC : sa sévérité semble donc plus élevée que celle liée au clade IIb de 2022. Toutefois, ces chiffres sont difficiles à estimer avec exactitude car les données de surveillance sont peu fiables. Par ailleurs, nombre de questions restent à élucider sur le volet de la transmission : ce nouveau clade est-il plus transmissible que celui qui a circulé en 2022 ? Outre la contamination via des lésions au niveau des organes génitaux, est-il également transmissible par des fluides comme le lait, le sperme, les sécrétions vaginales ?

Quel risque en Europe ?

Selon l’ECDC, le risque d’infection pour la population générale est considéré comme faible en Europe. Pour les personnes ayant de multiples partenaires sans antécédent d’infection ou de vaccination, il est considéré comme modéré.

Bien que la gravité de la maladie soit dans la plupart des cas faible, les personnes immunodéprimées et celles atteintes d’une infection par le VIH non traitée pourraient présenter une gravité clinique modérée.

Quels symptômes ?

Les symptômes de mpox apparaissent 6 à 13 jours après le contage (extrêmes : 2 à 21 jours) : fièvre, céphalées, asthénie et adénopathies, suivis, dans les 3 jours, d’une éruption cutanée et d’ulcérations muqueuses. Les lésions, parfois extrêmement douloureuses, évoluent en macules, papules, vésicules, pustules, ombilication, puis croûtes et desquamation en 2 - 3 semaines. Une fiche d’aide au diagnostic dermatologique est à télécharger ici. Le diagnostic est fait par PCR sur des lésions.

Quels vaccins ?

Il n’y a pas de vaccin spécifique mais ceux contre la variole offrent une protection croisée contre le mpox. Aujourd’hui, compte tenu de sa bonne tolérance et de son efficacité, le vaccin de 3e génération MVA-BN (Imvanex ou Jynneos) est recommandé en France. Les données en vie réelle ont en effet montré que l’efficacité d’une dose unique ou de deux doses était de 76 % (IC95 % [64 ;88]) et 82 % [72 ;92] respectivement sur le clade IIb responsable de l’épidémie 2022 - 2023 (mais la vaccination post-exposition aurait une efficacité de seulement 20 %). Cependant, l’efficacité contre la nouvelle souche qui circule actuellement n’est pas connue.

L’OMS préconise aussi le recours à d’autres vaccins : un autre vaccin antivariolique de 3e génération développé au Japon, LC16m8, voire un vaccin de 2e génération si ceux de 3e génération ne sont pas disponibles. Le problème majeur, c’est le manque d’accès aux vaccins (et aux tests diagnostiques) en Afrique…

Quelle conduite à tenir en MG ?

Les recos de prévention, dépistage et prise en charge des cas et des contacts, ainsi qu’en matière de vaccination, ont été actualisées par la HAS et la DGS. La définition des cas et le diagnostic sont précisés dans le DGS-URGENT N°2024_14. En particulier :

  • le mpox est une maladie à DO dès le stade de « cas suspect » (symptômes compatibles, qu’il y ait ou non une exposition à risque) : tout cas suspect doit ainsi être signalé sans délai à l’Agence régionale de santé de votre région afin qu’elle mette en place les mesures nécessaires à la limitation du risque de propagation : isolement, contact-tracing pour identification des personnes contacts, rappel des mesures de prévention, organisation de la vaccination des contacts, etc. Une vaccination réactive autour des cas pourra être mise en place afin de limiter le risque de propagation ; de nombreux CEGIDD proposent cette vaccination ;
  • il est important, afin de caractériser les virus circulant sur le territoire et de mettre en évidence le plus précocement possible la survenue d’un cas de mpox de clade I, de transmettre systématiquement les prélèvements issus des cas confirmés au CNR Orthopoxvirus (IRBA : https ://irba.sante.defense.gouv.fr/cnr/#orthopoxvirus) pour analyses complémentaires dont réalisation d’un séquençage. 

Pour la prise en charge des cas de mpox, les fiches pratiques élaborées par la COREB en 2022 (fiche pour les soignants, fiche à remettre au patient, fiche d’aide au diagnostic dermatologique, procédure opérationnelle de prélèvement) ont été actualisées et sont disponibles sur le site web de la COREB.

Les recommandations pour les voyageurs sont précisées dans l’encadré ci-dessous.

Nouvelles recommandations vaccinales de la HAS

La prévention repose sur deux stratégies :

  • la vaccination préventive pour les personnes à haut risque d’exposition au virus :
    • hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) et personnes trans rapportant des partenaires sexuels multiples ;
    • personnes en situation de prostitution ;
    • professionnels des lieux de rencontre sexuelle, quel que soit le statut de ces lieux ;
    • partenaires ou personnes partageant le même lieu de vie que les personnes mentionnées ci-dessus.
  • la vaccination réactive autour des cas identifiés chez les personnes ayant eu un contact à risque, telles qu’elles sont définies par Santé publique France, ainsi que les personnes immunodéprimées ayant eu un contact étroit avec une personne contact à risque. Cette vaccination réactive doit idéalement être administrée dans les 4 jours suivant le premier contact, et au plus tard dans les 14 jours.

Quelles modalités de vaccination ?

Pour rappel, la primovaccination avec le vaccin MVA-BN (Imvanex ou Jynneos) repose sur l’administration de 2 doses espacées au minimum de 28 jours, ou d’une dose unique pour les personnes ayant reçu une vaccination contre la variole avec un vaccin de première génération avant 1980. 

Pour les personnes immunodéprimées : 2 doses complétées d’une 3e au minimum 28 jours après la 2e dose, quels que soient les antécédents de vaccination antivariolique. 

Selon le nouvel avis de la HAS, compte tenu de l’immunité naturelle conférée par l’infection passée, il n’est pas recommandé de vacciner les personnes ayant contracté le mpox en 2022 ou dans les années suivantes. En revanche, l’administration d’une dose de rappel est recommandée chez les personnes ayant reçu une primo-vaccination (2 doses) en 2022. 

Les schémas de vaccination des personnes éligibles varient ainsi selon qu’elles sont ou non immunodéprimées et en fonction de leurs antécédents d’infection et de vaccination, comme récapitulé dans le tableau ci-contre.

Encadre

Mpox : recommandations pour les voyageurs

Le Haut conseil de la santé publique (HCSP) a émis le 2 septembre 2024 des recommandations de prévention et de vaccination contre le mpox pour les personnes se rendant dans une zone de circulation active du mpox de clade I.

Vaccination

Le HCSP recommande de vacciner (avec un vaccin de 3e génération) seulement les voyageurs les plus à risque de mpox, c’est-à-dire :

  • les personnes ayant des pratiques sexuelles à risque indépendamment de la destination ;
  • les professionnels de santé et les travailleurs humanitaires se rendant dans une zone de circulation active du virus mpox (MPXV) de clade I (a et/ou b), en particulier la République démocratique du Congo et les pays limitrophes de la région des grands lacs ;
  • les personnes originaires des zones de circulation active du MPXV de clade I (a et/ou b) partant rendre visite à la famille et à leurs connaissances ;
  • les personnes immunodéprimées se rendant dans les zones de circulation active du MPXV de clade I (a et/ou b).

Conseils

Pour les personnes voyageant à destination des zones où circule le MPXV, le HCSP recommande :

  • avant le départ, d’informer les voyageurs de l’existence d’une épidémie de mpox, de ses modes de transmission, du risque pour le voyageur et de l’importance de respecter les mesures d’hygiène standard et les mesures barrières au cours du voyage :
    • éviter les contacts directs ou rapprochés avec des personnes malades ou susceptibles d’être infectées par le MPXV ou des objets ou des linges susceptibles d’avoir été contaminés ;
    • se laver régulièrement les mains à l’eau et au savon ou utiliser du gel hydroalcoolique ;
    • ne pas partager la literie ou les serviettes avec des personnes qui pourraient être infectées par le MPXV.
    • l’efficacité de la vaccination n’étant pas de 100 %, le respect des mesures barrière est essentiel même pour les personnes vaccinées.
  • d’aider les voyageurs à identifier les correspondants médicaux susceptibles d’être sollicités en cas de survenue de symptômes au cours du voyage (service de santé du pays de destination, médecine du travail, etc.) ;
  • de les informer sur la conduite à tenir en cas de symptômes apparaissant dans les 21 jours suivant le retour de zone d’endémie (isolement à domicile et appel du 15 en notifiant précisément la ou les zones de voyage) ;
  • de déconseiller le voyage aux immunodéprimés, enfants et femmes enceintes ou allaitantes (mais les autorités n’ont pas prononcé de restriction de voyage).

Pour en savoir plus : Mpox : recommandations pour les voyageurs (avis HCSP), 5 septembre 2024.

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