Ces médicaments, utilisés dans le traitement de l’alopécie androgénétique et de l’hypertrophie bénigne de la prostate, sont en cours de réévaluation par l’EMA, en raison de leurs effets indésirables psychiatriques graves. L’ANSM rappelle la conduite à tenir pour les prescripteurs et les conseils à donner aux patients, en attendant une possible révision de leur AMM.

Une nouvelle évaluation européenne du risque d’idées et conduites suicidaires lié à la prise de médicaments contenant du finastéride ou du dutastéride vient d’être annoncée par le comité de pharmacovigilance de l’Agence européenne du médicament (PRAC). À l’issue de cette évaluation de l’ensemble des données disponibles, l’agence décidera si l’AMM de ces médicaments doit être retirée ou modifiée.

Déjà connu pour le finastéride, cet effet indésirable psychiatrique est listé dans les RCP des spécialités Propecia 1 mg et Chibro-Proscar 5 mg comme un EI de fréquence indéterminée (le dutastéride appartient à la même classe pharmacologique, d’où son inclusion dans l’évaluation du PRAC). Il s’ajoute à d’autres effets indésirables parfois sévères liés à la prise de finastéride, sur lesquels l’ANSM a émis plusieurs avertissements ces derniers temps.

Dans ce contexte, elle alerte sur le fait que, malgré ces actions (dont l'apposition de messages d’alerte sur les boîtes de ces médicaments), des cas graves de troubles psychiatriques et de troubles sexuels (pouvant parfois perdurer longtemps après l’arrêt du traitement) continuent de lui être rapportés.

La réévaluation conduite par l’EMA est particulièrement importante pour le finastéride 1 mg, étant donné son indication uniquement dans l’alopécie, une affection sans danger pour la santé touchant des hommes jeunes.

Troubles psychiques, sexuels et réactions allergiques

Le finastéride 1 mg (Propecia et génériques) est indiqué uniquement dans le traitement des stades peu évolués d’alopécie androgénétique, chez l’homme de 18 à 41 ans (contre-indiqué chez la femme). Le finastéride 5 mg est indiqué dans le traitement de l’hypertrophie bénigne de la prostate (le dutastéride 0,5 mg correspond aussi à cette indication).

L’action hormonale (anti-androgène) du finastéride peut donc être à l’origine d’effets indésirables parfois sévères, qu’il faut connaître :

  • psychiques : anxiété, dépression, pensées suicidaires ;
  • sexuels : trouble de l’érection, trouble de l’éjaculation, douleurs testiculaires, diminution de la libido, problèmes d’infertilité masculine et/ou de mauvaise qualité du sperme ;
  • réactions allergiques.

Le finastéride peut également entraîner l’apparition de sang dans le sperme (hématospermie), une gynécomastie, un écoulement du mamelon. Les patients doivent rapidement consulter car ces symptômes peuvent être le signe d’un cancer du sein.

Conduite à tenir pour les prescripteurs

Tout d’abord : écarter les causes d’alopécie qui ne seraient pas d’origine androgénétique pour limiter les prescriptions inadaptées de finastéride 1 mg.

Si sa prescription est envisagée, les points suivants sont à prendre en compte.

Lors de l’initiation du traitement

Respecter les conditions d’utilisation de l’AMM :

  • prescription uniquement chez l’homme (CI chez la femme) ;
  • pas de prescription avant 18 ans et arrêt du traitement au-delà de 41 ans.

En l’absence de données, l’association finastéride + minoxidil topique n’est pas recommandée.

Interroger le patient sur ses antécédents en particulier psychologiques, et sur d’éventuels troubles sexuels.

Sensibiliser le patient aux effets indésirables possibles (v. encadré) et l’inviter à arrêter le traitement et à consulter rapidement s’ils apparaissent. Il est utile de lui remettre la fiche d’information à son intention.

L’informer sur :

  • le possible impact sur la fertilité et sur la nécessité d’anticiper un projet de parentalité ;
  • le fait qu’en général 3 à 6 mois de traitement sont nécessaires pour observer une stabilisation de la chute des cheveux ;
  • le fait qu’il est inutile d’augmenter la dose dans l’espoir d’une efficacité plus rapide ou plus importante, mais aussi qu’il est inutile de la diminuer pour éviter l’apparition d’effets indésirables.

Programmer une consultation de suivi dans les 3 mois après l’instauration du traitement pour évaluer sa bonne tolérance, puis de façon régulière (par exemple tous les 6 mois) afin de réévaluer la balance bénéfices/risques de la prescription.

Proposer un temps de réflexion.

En cours de traitement

Réévaluer systématiquement la pertinence de la poursuite du traitement lors de chaque consultation de suivi.

Si le traitement est mal toléré, l’arrêter et envisager, si nécessaire, une prise en charge pluridisciplinaire selon la nature des effets indésirables observés.

Déclarer tout effet indésirable : https ://signalement.social-sante.gouv.fr

Encadre

Effets indésirables du finastéride : que dire à vos patients ?

Restez vigilant sur l’apparition de signes inquiétants ou inhabituels, y compris s’ils vous paraissent anodins ou que vous êtes gêné pour en parler. N’hésitez pas à en discuter avec votre médecin à chaque consultation de suivi de votre traitement, il pourra vous apporter de précieux conseils ou vous orienter vers un médecin spécialiste s’il le juge utile.

Informez vos proches de la prise de finastéride et des effets indésirables possibles, demandez-leur de vous alerter s’ils observent des modifications de votre comportement.

Arrêtez le traitement :

  • immédiatement, si vous avez les symptômes suivants : gonflement des lèvres, du visage, de la langue ou de la gorge ; difficulté à avaler ou à respirer. Contacter immédiatement les services d’urgence, car il peut s’agir d’une réaction allergique grave.
  • en cas de modification de votre humeur (sentiment de tristesse, d’anxiété, de fatigue, de difficulté à se concentrer…), et consultez votre médecin.

En cas d’apparition de troubles sexuels ou de tout autre effet indésirable, signalez-le rapidement à votre médecin. À cette occasion, vous pourrez rediscuter avec lui du maintien ou de l’arrêt du traitement.

Il n’y a pas de risque à arrêter le traitement de votre propre initiative.

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