La gale – parasitose due à un acarien, Sarcoptes scabiei variété hominis – est essentiellement transmise par contact « peau à peau » rapproché et prolongé ou, plus rarement, par contact indirect via les vêtements ou la literie contaminés (notamment dans les gales profuses ou hyperkératosiques). Elle toucherait 100 à 130 millions de personnes chaque année dans le monde, sans distinction de sexe ni d’ethnie, et survient par épidémies cycliques, en particulier dans les collectivités.
Le diagnostic est essentiellement clinique. Le prurit est évocateur, d’autant qu’il existe souvent une notion de contage et de prurit familial ; il est souvent intense, généralisé, à recrudescence nocturne. Les lésions sont des vésicules, des sillons ou des nodules au niveau des espaces interdigitaux, la face antérieure des poignets, les coudes, les zones axillaires antérieures, les fesses... Chez les enfants, les vésicules ou les pustules palmoplantaires, les nodules axillaires et les lésions du visage sont fréquents.
Le traitement repose sur l’utilisation d’acaricides neurotoxiques pour le sarcopte. On dispose en France de deux traitements topiques et d’une seule molécule orale, l’ivermectine. Cependant, chez le jeune enfant (< 15 kg) et les femmes enceintes ou allaitantes, le traitement est peu codifié compte tenu des incertitudes sur la sécurité d’emploi des produits.
Un groupe de travail du Centre de preuves en dermatologie et du groupe de recherche de la société française de dermatologie pédiatrique (GRSFDP) et a rédigé les premières recommandations spécifiques à ces populations dans un article publié dans le British Journal of Dermatology .
Quels traitements chez le jeune enfant, selon l’âge ?
Chez l’enfant de plus de 2 ans, même dont le poids est inférieur à 15 kg, le traitement de première intention peut être local (perméthrine 5 % ou benzoate de benzyle 10 % émulsion) ou oral (ivermectine 200 µg/kg). L’ivermectine doit être privilégié en cas de doute sur l’observance, de peau lésée ou de cas groupés.
Chez le nourrisson entre 2 et 24 mois, les topiques sont à utiliser en 1re intention. La perméthrine, mieux tolérée que le benzoate de benzyle, doit être privilégiée chez l’enfant < 1 an ou en cas de peau lésée ou d’atteinte du visage. En 2e intention, les deux options sont envisageables. Mais avant d’administrer un second traitement, il faut confirmer l’échec et en rechercher les causes : recontamination, mauvaise observance, mauvaise tolérance ou utilisation, absence de prise en charge des sujets contacts…
Avant l’âge de 2 mois, la perméthrine est préférée au benzoate de benzyle car mieux tolérée, même si elle n’a une AMM qu’à partir de 2 mois.
Un algorithme synthétisant le traitement de la gale commune de l’enfant < 15 kg est représenté en figure 1.
Comment administrer les traitements chez l’enfant ?
Ivermectine
L’ivermectine n’étant pas disponible en sirop en France, il faut couper et écraser les comprimés ou faire préparer des gélules par les pharmaciens voir dissoudre les comprimés et administrer la quantité souhaitée. Pour en améliorer l’absorption, la prise doit être effectuée au cours d’un repas. Les modalités pratiques pour la préparation sont décrites en figure 2.
Les topiques
La perméthrine s’applique en une couche unique le soir, pour être rincée le lendemain matin alors que le benzoate de benzyle nécessite deux badigeons successifs à 10 - 15 minutes d’intervalle, le second à laisser en place 24 h ; chez les moins de 2 ans, on emploie un seul badigeon, à laisser poser 12 h (voire 6 h chez les moins de 1 an ; irritant +++). Chez l’enfant, il faut appliquer le topique sur tout le corps, y compris le visage et le cuir chevelu (ne pas oublier paumes des mains, plantes des pieds et ongles). Les modalités détaillées d’administration des topiques sont indiquées dans la figure 3.
Le traitement anti scabieux, qu’il soit topique ou par ivermectine, est à renouveler une fois entre J8 et J14, car son efficacité est moindre sur les œufs du sarcopte.
Traitement chez la femme enceinte ou allaitante
Peu de données étant disponibles pour les femmes enceintes, les choix thérapeutiques sont principalement guidés par les données de tolérance.
En 1re intention, la perméthrine, le benzoate de benzyle ou l’ivermectine peuvent être prescrits au cours des 2e et 3e trimestres et durant l’allaitement. L’ivermectine n’est proposée qu’en seconde intention au premier trimestre.
En cas de contact avec un cas de gale, un traitement est fortement recommandé, en particulier au 3e trimestre de grossesse, pour éviter la contamination du nouveau-né (traitement local ou ivermectine ; une surveillance clinique rapprochée peut être une alternative possible au 1er ou au 2e trimestre).
Comme pour l’enfant, une gale profuse et/ou hyperkératosique nécessite un traitement au cas par cas (hospitalisation traitements combinés répétés).
Un algorithme synthétisant le traitement en cas de grossesse ou allaitement est représenté en figure 4.
Mesures associées : essentielles
L’information des familles est indispensable, notamment face à des critères de vulnérabilité (précarité, difficultés de langage ou difficultés d’observance). Il faut traiter systématiquement et simultanément les cas contacts et l’environnement : le lendemain de la prise de l’ivermectine, ou le jour même en cas d’utilisation d’un topique. Les mesures pour décontaminer le linge sont indiquées en figure 5.
Enfin, voici la conduite à tenir en cas de gale en milieu préscolaire ou en crèche :
- Un seul cas de gale classique : ne traiter que les personnes ayant des contacts cutanés prolongés et étroits.
- Deux cas ou plus de gale classique : traiter l’entourage proche et les personnes travaillant dans l’institution selon les caractéristiques de la structure (dortoirs…) ; les visiteurs occasionnels ne sont pas concernés.
- Gale sévère : le traitement des personnes fréquentant occasionnellement l’institution ou visitant le domicile du patient doit être discuté.
- Suivi : de 6 à 12 semaines, en fonction de l’étendue de l’épidémie.
Outils pour la prescription
Des outils pratiques sont accessibles sur le site du Centre de preuves en dermatologie, en particulier :
- Un algorithme interactif avec la prise en charge de l’enfant et de la femme enceinte ou allaitante : https ://reco.sfdermato.org/fr/recommandations-gale-commune_chez-l-enfant,-la-femme-enceinte-ou-allaitante ;
- Une l’ordonnance type à télécharger : https ://document.sfdermato.org/reco/gale/ordonnance-type-gale.doc.