C’est paru dans The Lancet : la gépotidacine, antibiotique d’une nouvelle classe ayant un mécanisme d’action novateur, a fait ses preuves dans la gonorrhée urogénitale non compliquée, offrant enfin une alternative aux céphalosporines de troisième génération pour lesquelles l’antibiorésistance est en forte hausse.

Le taux d’incidence de la gonorrhée augmente en France depuis quelques années, dans les deux sexes et toutes les classes d’âge (v. figure ci-contre). Pourtant, son traitement a peu évolué depuis trois décennies, aucun nouvel antibiotique n’ayant fait ses preuves dans cette indication depuis l’arrivée des céphalosporines de troisième génération (ceftriaxone et céfixime) dans les années 1990. Or ces dernières font face à une antibiorésistance – tout comme les antibiotiques précédemment utilisés – qui augmente depuis les années 2000. Plus d’un quart des patients sont résistants à la ceftriaxone dans certaines régions asiatiques !

Un nouvel espoir est apparu récemment : en 2024, un antibiotique pionnier dans sa classe, la gépotidacine, a été testé avec succès contre les infections urinaires non compliquées dans deux larges essais randomisés contrôlés de phase III. Ce produit bactéricide est un triazaacénaphthylène, une molécule qui empêche la réplication bactérienne par un mécanisme d’action unique inhibant la gyrase et la topo-isomérase IV. Il a été autorisé par la Food and Drug Administration américaine fin mars pour des infections urinaires excluant celles par Neisseria gonorrhoeae.

Pour tester l’efficacité de ce nouvel antibiotique dans la gonorrhée, des chercheurs américains ont donc monté un essai de phase III multicentrique, ouvert et de non-infériorité, afin de comparer la gépotidacine à un traitement standard de la gonorrhée (ceftriaxone + azithromycine). L’essai a eu lieu dans 49 centres de six pays (Australie, Allemagne, Mexique, Espagne, États-Unis et Royaume-Uni). Les patients éligibles devaient être âgés de plus de 12 ans, peser plus de 45 kg et avoir un test positif pour N. gonorrhoeae ou bien une suspicion de gonorrhée urogénitale non compliquée.

Entre octobre 2019 et octobre 2023, 628 participants ont été randomisés suivant un ratio 1 :1 – et après stratification par sexe à la naissance, orientation sexuelle et groupe d’âge – dans deux groupes : gépotidacine orale (2 × 3 000 mg à 10 - 12 h d’intervalle) ou 500 mg de ceftriaxone en intramusculaire + 1 g d’azithromycine orale. Le critère de jugement principal était l’éradication confirmée par culture de N. gonorrhoeae de la zone urogénitale 4 à 8 jours après l’antibiothérapie, évaluée chez les patients ayant une infection confirmée à N. gonorrhoeae sensible à la ceftriaxone.

Les résultats sont parus mi-avril dans The Lancet : 406 des 628 participants faisaient partie de la population ayant une infection confirmée par N. gonorrhoeae sensible à la ceftriaxone (202 personnes dans le bras gépotidacine, 204 dans l’autre bras). Parmi ces 406 personnes, 92 % étaient des hommes (dont 71 % avaient des relations sexuelles avec d’autres hommes [HSH]), 74 % étaient Blancs et 15 % étaient Noirs. Le test d’éradication quelques jours après l’antibiothérapie a donné des résultats non-inférieurs dans le groupe gépotidacine par rapport à l’autre groupe. Le bras gépotidacine avait un taux d’effets indésirables plus élevés, mais ils étaient surtout de nature gastro-intestinale et d’intensité faible à modérée.

D’après les auteurs, ces résultats montrent que la gépotidacine est une nouvelle option thérapeutique pour la gonorrhée urogénitale non compliquée.