L’intrusion des technologies de l’information et de la communication dans la pratique de la médecine a généré plusieurs impacts qui donnent lieu à des réflexions juridiques et éthiques dont les premières applications sont analysées à travers le déploiement de la télémédecine, télémédecine dont la pratique répond à un caractère réglementaire spécifique. Les principaux impacts sont : 1) la redéfinition spatiotemporelle de la relation de soins : en effet, cette prise en charge sort géographiquement du cabinet du médecin, qui suit à distance son patient ; quid de la responsabilité juridique du médecin s’il s’est « déconnecté » de cette télésurveillance ? ; 2) un changement de paradigme dans l’appréciation des responsabilités. Ce changement est notamment en lien avec l’intrusion du tiers technologique dans le colloque singulier : en cas de défaut de prise en charge médicale, est-ce le médecin ou l’objet connecté qui est en cause ? ; en particulier le télémédecin doit s’assurer du caractère sécurisé de sa messagerie afin de garantir le secret professionnel. La responsabilisation du patient doit aussi être prise en compte dans la mesure où un problème de prise en charge peut aussi être en rapport avec une incapacité du patient à suivre son traitement ou avec un manquement de sa part dans le cadre de son suivi. Quant aux experts judiciaires, ils doivent être formés aux nouveaux types de contentieux liés à cette pratique médicale. Le télémédecin, de son côté, doit, avant de s’engager dans la pratique de téléconsultation, veiller au sérieux des fournisseurs d’outils et surtout doit informer le patient de ce que la téléconsultation suppose en termes de respect de ses droits afin que le patient puisse consentir de manière éclairée.

Lina Williatte-Pellitteri, professeur de droit, faculté de l’Université catholique de Lille, vice-présidente de la Société française de la santé digitale, avocat au barreau de Lille

11 février 2020

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