Le virus Oropouche est un arbovirus responsable d’importantes épidémies en Amérique centrale et du Sud, dont la Guyane française. Bien que l’infection soit souvent bénigne, l’augmentation du nombre de cas depuis 2024, et le risque de malformations fœtales associé, inquiète. En soins primaires, il faut savoir l’évoquer en cas de symptômes au retour de zone d’épidémie et bien adresser les patients.

Le virus Oropouche (OROV)est transmis à l’homme par un moucheron piqueur du genre Culicoides, et probablement aussi par des moustiques du genre Culex et Aedes . Depuis le début de l’année 2024, on observe des épidémies importantes en Amérique latine avec une circulation active du virus au Brésil, en Bolivie, en Colombie, en Équateur, au Guyana, au Pérou, en République dominicaine et pour la première fois à Cuba. Plusieurs cas ont été importés en Amérique du Nord et en Europe (y compris en France).

Quand l’évoquer ?

Il faut l’évoquer devant des signes cliniques compatibles et la notion de retour de zone d’épidémie d’OROV dans les 14 jours précédant les signes cliniques. 

Après une période d'incubation de 3 à 8 jours (voire à 12 jours), l’évolution de la maladie est classiquement biphasique.

La phase aiguë (2 - 4 jours) est caractérisée par les symptômes suivants : 

  • le plus souvent : fièvre (> 90 %), céphalées (> 80 %), photophobie, douleurs rétro-orbitaires, myalgies, arthralgies, asthénie, conjonctivite, nausées, vomissements, diarrhées, douleurs abdominales, exanthème maculo-papuleux ;
  • plus rarement : syndrome hémorragique (pétéchies, épistaxis, gingivorragies, méléna…) et forme neuro-invasive (5 %) : encéphalite, méningite et possiblement syndrome de Guillain-Barré.

Une transmission verticale mère-enfant est décrite, avec risque de fœtopathie (FCS, mort fœtale in utero, malformations : microcéphalie, arthrogrypose…) mais encore mal documentée en matière de fréquence, formes cliniques ou facteurs de risque. 

La phase de rémission est suivie classiquement d’une recrudescence des symptômes à J7 -J10 de la rémission initiale (forme biphasique). La létalité est faible.

La CAT selon les recos du COREB est indiquée ci-dessous.

Diagnostic 

Le diagnostic clinique est complexe au vu des symptômes aspécifiques et communs à la plupart des arboviroses. Le diagnostic virologique est nécessaire, par RT-PCR quantitative ou par sérologie. La présence d’OROV a été rapportée dans le sang, le LCS, l’urine et le sperme. 

Selon les recommandations HCSP 2024 : 

  • prescrire un test de RT-PCR OROV dans les 7 jours suivant le début des symptômes et/ou une sérologie OROV à compter du 5e jour suivant le début des symptômes ;
  • associer systématiquement la recherche de paludisme pour les zones d’endémie palustre, de leptospirose et des autres arboviroses (RT-PCR pour les virus de la dengue, du chikungunya, du Zika et du virus Mayaro et/ou sérologie arboviroses selon le délai depuis le début des symptômes et le lieu du voyage) ;
  • envisager et rechercher systématiquement une infection communautaire comme diagnostic différentiel ;
  • en cas de symptômes neuro-méningés, en l’absence de diagnostic différentiel, faire pratiquer une ponction lombaire avec test de RT-PCR OROV sur le LCS, en plus de ceux habituellement recommandés ;
  • quand le bilan est réalisé une semaine ou plus après le début des symptômes, recourir uniquement à la sérologique (une infection récente est suggérée par la présence d’anticorps anti-OROV de classe IgM ou par une augmentation du titre des anticorps d’un facteur 4 ou plus entre 2 échantillons prélevés en phases aiguë et convalescente).

Un algorithme décisionnel pour le diagnostic d’infection à virus Oropouche en période d’épidémie de dengue est indiqué en figure 1.

Spécificités chez la femme enceinte (fig. 2) :

  • Symptomatique et ayant voyagé dans une zone d’épidémie d’OROV : faire tests virologiques d’OROV et échographie fœtale ;
  • Asymptomatique et ayant voyagé dans une zone d’épidémie d’OROV : faire échographie fœtale et discuter la réalisation des tests virologiques d’OROV ;
  • Si infection à OROV confirmée et/ou présence d’anomalies fœtales échographiques : suivi par un centre de diagnostic prénatal nécessaire.

Prendre en charge 

Traitement symptomatique adapté à la situation clinique du patient. Pas de traitement antiviral spécifique. 

Ne pas prendre d’acide acétylsalicylique (aspirine) ni d’autres AINS. 

Signalement à l’ARS des patients suspects et/ou cas confirmés.

Protéger

Devant l’excrétion possible d’OROV dans le sperme : port de préservatifs recommandés en zone à risque et jusqu’à 6 semaines chez les hommes cas confirmés. 

La prévention repose sur la protection individuelle – vêtements couvrants, moustiquaire imprégnée à mailles fines (phlébotomaire), répulsifs – et collective contre les vecteurs en zone épidémique. Il n’y a pas de vaccin. 

Informer les personnes ayant co-voyagé dans la/les même(s) zone(s) géographique(s) en cas d’apparition de symptômes dans la période d’incubation.

Pour les femmes enceintes (fig. 2) : en cas de voyage à destination d’une zone où une épidémie d’OROV est avérée, reporter le voyage dans la mesure du possible ; en cas de voyage impératif, adopter les mesures de protection personnelle antivectorielle habituelles, idéalement associées à l’utilisation d’une moustiquaire imprégnée à mailles fines la nuit ou aux heures de sieste (ou, à défaut, d’une moustiquaire imprégnée à mailles habituelles).

Pour en savoir plus
HCSP. Mesures de prévention pour les voyageurs vis-à-vis de la maladie à virus Oropouche. 10 décembre 2024.

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