Les syndromes neurologiques paranéoplasiques (SNP) sont des maladies auto-immunes rares (1 à 3 cas par million d’habitants et par an) touchant le système nerveux en réponse à un cancer. Ils sont provoqués par une réaction immunitaire antitumorale anormale au cours de laquelle les lymphocytes B produisent des auto-anticorps dirigés contre des antigènes partagés entre les cellules tumorales et neuronales (antigènes onconeuronaux). Ce mécanisme entraîne une atteinte neurologique souvent sévère (encéphalites, ataxies, neuropathies…) qui précède la découverte de la tumeur dans 80 % des cas. Les auto-anticorps constituent d’excellents biomarqueurs, sont essentiels au diagnostic et orientent la recherche tumorale. Chaque auto-anticorps est associé à un type de cancer spécifique et à un tableau neurologique particulier.Pourtant, bien que les cancers en cause soient fréquents (poumon, sein, ovaire), les SNP restent exceptionnels (moins de 0,01 % des cas), ce qui suggère que d’autres facteurs interviennent. La simple expression tumorale de l’antigène onconeuronal ne suffit pas à déclencher un SNP. D’autres anomalies comme la surexpression du transcrit et de la protéine, des mutations, ou des modifications post-traductionnelles de ces antigènes semblent nécessaires.Par exemple, les protéines CDR2 et CDR2L sont fortement surexprimées et mutées dans les cancers associés au SNP anti-Yo, mais pas dans les mêmes cancers sans SNP.Le rôle des ganglions lymphatiques est aussi suspecté, ces derniers pouvant héberger une réponse immunitaire intense, avec production locale d’auto-anticorps.Par ailleurs, certaines particularités du patient (prédisposition auto-immune, traitement par immunothérapie, contexte génétique) pourraient favoriser la rupture de tolérance immunitaire. Néanmoins, les mécanismes restent en grande partie mal compris, variables selon les SNP et les auto-anticorps impliqués.Ainsi, certains critères et plusieurs étapes sont nécessaires pour déclencher un SNP, et le processus n’est pas aussi simple que le passage cérébral des auto-anticorps. Les mécanismes en cause nécessitent un type de tumeur particulier comportant des modifications moléculaires spécifiques conduisant à la production d’autoanticorps ainsi qu’une activation des cellules T, des caractéristiques particulières du système immunitaire de l’hôte et un événement déclenchant la réaction contre le système nerveux.La recherche sur les SNP, bien que concernant des maladies rares, éclaire de façon précieuse les liens entre immunité, cancer et auto-immunité et pourrait ouvrir de nouvelles perspectives en immunothérapie anticancéreuse et en neurologie autoimmune.

Jérôme Honnorat, neuro-oncologie, hôpital Pierre-Wertheimer, Hospices civils de Lyon, France

6 mai 2025