Le Mpox est un orthopoxvirus, famille de virus comprenant notamment la variole humaine. Sa découverte, remontant aux années 1960 chez des singes en captivité importés de Singapour dans un laboratoire danois, a donné naissance au terme anglais Monkeypox, abandonné depuis novembre 2022 par la communauté médicale et scientifique du fait d’une connotation stigmatisante. Les données scientifiques actuelles suggèrent que le singe n’est qu’un hôte accidentel du virus, le réservoir semblant être constitué de petits rongeurs d’Afrique centrale et de l’Ouest. Le virus Mpox est historiquement endémique dans les régions d’Afrique centrale, telles que la République démocratique du Congo, la Centrafrique et le Soudan du Sud, où la majeure partie des cas est liée à son clade 1. En Afrique de l’Ouest (Nigeria, Libéria, Sierra Leone et Côte d’Ivoire), le clade 2 du virus domine.1
Histoire épidémiologique
Depuis les années 1980, des épidémies sporadiques surviennent en Afrique centrale et en Afrique de l’Ouest. Elles restent limitées en nombre de cas secondaires du fait d’une transmission essentiellement intrafamiliale ou plus rarement via le système de soins. En effet, le virus circule parmi les populations animales et humaines, posant un défi sanitaire récurrent dans ces régions.
En 2022, l’épidémie internationale de Mpox a entraîné une augmentation marquée de cas en dehors des zones historiquement touchées, avec une forte concentration en Europe et en Amérique du Nord, liée au clade 2 du virus. Cette épidémie de Mpox a principalement touché les personnes multipartenaires au sein de la communauté LGBTQIA+.
Depuis le début de l’année 2022, plus de 100 000 cas confirmés de Mpox ont été répertoriés dans le monde. En France, on compte un peu plus de 5 000 cas depuis le début de l’épidémie.
L’infection à Mpox a longtemps été considérée comme une zoonose, sa transmission est désormais majoritairement interhumaine, et en particulier sexuelle. Les symptômes se manifestent de plus en plus fréquemment au niveau des zones anogénitales du fait du mode de transmission. Cette évolution souligne la nécessaire adaptation continue des stratégies de prévention et de prise en charge afin de mieux répondre à ces nouvelles dynamiques de transmission et de présentation clinique.
En France, une baisse marquée du nombre de cas a été observée dès septembre 2022, notamment grâce aux changements de comportements et à la vaccination, avec des niveaux restant relativement faibles en 2023 par rapport au pic de l’épidémie.
Cependant, en 2024, une reprise des infections est constatée : 222 cas ont été déclarés entre le 1er janvier 2024 et le 8 janvier 2025, majoritairement chez des hommes multipartenaires ayant des rapports avec d’autres hommes et parfois doublement vaccinés. En effet, un tiers des nouvelles infections surviennent chez des personnes immunocompétentes ayant reçu un schéma vaccinal complet.2
Le virus continue donc de circuler à bas bruit en France, faisant craindre une éventuelle résurgence, d’autant plus que la répartition géographique des différents clades évolue au fil de l’épidémie : des cas liés au clade 1, auparavant majoritairement localisés en Afrique centrale, ont été signalés en Europe depuis août 2024 et plus récemment en Bretagne, en janvier 2025.
Cette situation appelle à une vigilance accrue pour renforcer la surveillance épidémiologique, prévenir de nouvelles flambées par des campagnes de sensibilisation et mettre en place des stratégies de vaccination ciblées pour les populations les plus à risque.
Quand évoquer une infection à Mpox ?
Les principales manifestations cliniques devant faire évoquer une infection à Mpox, a fortiori dans un groupe à risque, sont les suivantes : lésions cutanées varicelle-like, vésiculeuses, ulcérées ou croûteuses, parfois ombiliquées touchant la sphère anogénitale (fig. 1 et 2), le visage, la paume des mains (fig. 3) et la plante des pieds, ainsi que le tronc et les membres (fig. 4 et 5) dans les formes profuses ; lésions muqueuses de la sphère ORL (fig. 6) ou anogénitale ; lésions cutanées dermohypodermite-like, plus rarement.
Ces lésions – qui surviennent en une seule floraison, contrairement à celles de la varicelle – peuvent, comme dans nombre d’autres viroses, s’accompagner de fièvre, adénopathies, céphalées et myalgies.3
En cas de manifestations cliniques évocatrices, un contage doit être recherché dans les sept à dix jours précédant l’apparition des symptômes.
De nombreux diagnostics différentiels
Lorsqu’une suspicion de Mpox est évoquée, il est essentiel d’éliminer les diagnostics différentiels variés incluant des maladies éruptives sexuellement transmissibles, des affections virales bénignes, des dermatoses inflammatoires ou des toxidermies médicamenteuses. Parmi les diagnostics à considérer figurent :4
- la syphilis secondaire ;
- la varicelle ;
- le syndrome pieds-mains-bouche (virus Coxsackie) ;
- l’herpès ;
- les dermatoses auto-immunes (pemphigoïde bulleuse chez l’adulte ou dermatose à IgA) ;
- les toxidermies bulleuses.
De façon générale devant une éruption cutanée chez l’adulte, il est pertinent de proposer un dépistage des infections sexuellement transmissibles, incluant des sérologies (VIH, VHB, VHC, syphilis) et des PCR (Chlamydia et gonocoque). Il est recommandé d’attendre, si possible, un diagnostic négatif de Mpox avant envoi de ces échantillons.
Évolution le plus souvent favorable
La complication la plus fréquente de ces lésions est la surinfection bactérienne. À court ou moyen terme, des séquelles esthétiques peuvent également apparaître, comme des cicatrices chéloïdes ou hypertrophiques ou des plaques alopéciques si les zones pileuses sont affectées.
Les complications graves du Mpox restent très rares (pneumonie, myocardite, encéphalite, kératite) et surviennent essentiellement en cas de retard diagnostique chez des patients immunodéprimés. Cependant, dans la majorité des cas, l’infection à Mpox évolue vers une guérison sans séquelles.
Miser sur la prévention
En 2022, la Haute Autorité de santé a recommandé une vaccination préventive pour les personnes ayant un risque élevé d’exposition. Les indications à la vaccination sont les suivantes :4
- hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes et personnes trans ayant des partenaires sexuels multiples ;
- travailleurs et travailleuses du sexe ;
- professionnels exerçant dans des lieux de rencontre sexuelle, quel que soit le statut de ces lieux ;
- partenaires ou personnes partageant le même lieu de vie que les personnes mentionnées ci-avant.
Le vaccin utilisé est un vaccin antivariolique de troisième génération formulé à partir de virus modifiés de la vaccine d’Ankara, ayant les mêmes antigènes que la variole historique.
Les deux spécialités disponibles en France, Jynneos et Imvanex, disposent d’un schéma de vaccination qui varie selon les vaccinations reçues dans l’enfance (avant 1980) et du statut d’immunosuppression du receveur (tableau).5
La nouveauté introduite en septembre 2024 est la nécessité d’une dose de rappel chez les personnes vaccinées deux ans (ou plus) auparavant.
La vaccination peut être proposée en post-exposition chez un patient non efficacement immunisé ayant eu un contact à risque avec une personne infectée, au mieux dans les quatre jours et au plus tard dans les quatorze jours.
Conduite à tenir devant un cas présumé de Mpox
Il convient, en premier lieu, d’orienter le patient vers un centre référent (centre gratuit d’information, de dépistage et de diagnostic [CeGIDD] ou service habilité en maladies infectieuses). En attendant la consultation, il est indispensable de recommander de limiter, autant que possible, les contacts avec d’autres personnes – en particulier les plus vulnérables – et de veiller à porter un masque chirurgical et à couvrir les lésions cutanées afin de prévenir la transmission secondaire du virus.
Après consultation en milieu spécialisé, le diagnostic est, le plus souvent, confirmé par RT-PCR sur écouvillonnage des lésions. En cas de confirmation diagnostique, l’isolement est poursuivi jusqu’à vingt et un jours, ou prolongé au-delà si les lésions ne sont pas complètement cicatrisées.6
Par ailleurs, il est recommandé aux personnes contacts à risque – c’est-à-dire contacts d’un cas probable ou confirmé de Mpox – de surveiller deux fois par jour leur température durant trois semaines après le dernier contact à risque et de se diriger vers un centre de santé en cas de fièvre ou d’éruption.
Détection d’un nouveau variant en France
Nous assistons actuellement à une expansion récente des cas de clade 1 en dehors du continent africain. En effet, des cas ont été signalés en Suède et en Thaïlande en août 2024, en Allemagne en octobre et décembre 2024, aux États-Unis et au Canada en novembre 2024 et en France en janvier 2025.
Ces cas sont souvent associés à des voyages : Afrique centrale, Oman, Pakistan, Inde. Des transmissions secondaires de Mpox clade 1b ont été signalées au Royaume-Uni et en Allemagne.
Il reste difficile de tirer des conclusions claires sur d’éventuelles différences de tableau clinique, de contagiosité ou de létalité entre les clades, en raison de données cliniques et épidémiologiques encore incomplètes. Le clade 1 est potentiellement plus contagieux, mais ces données doivent être interprétées avec prudence.
Les vaccins actuellement disponibles sont supposés efficaces contre le clade 1b, bien que des essais soient encore en cours pour le démontrer. Cette situation ne justifie donc pas de modifier la stratégie vaccinale actuelle, dans la mesure où les cas liés au clade 2 restent très majoritaires ; la prévention reste la pierre angulaire de la lutte contre le Mpox, essentielle pour freiner sa propagation.
Que dire à vos patients ?
Depuis le début de l’année 2024, plus de 220 cas de Mpox ont été recensés en France.
La maladie peut être prévenue grâce à la vaccination, qui est préconisée pour les groupes à risque : hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, personnes trans avec partenaires multiples, travailleurs et travailleuses du sexe, professionnels exerçant dans des lieux de rencontre sexuelle, proches partageant le même lieu de vie que les personnes mentionnées.
L’isolement strict des cas confirmés et la surveillance active des cas contacts sont des mesures indispensables pour contenir l’épidémie.
Ressources
Des fiches synthétiques à destination des soignants et des patients sont disponibles sur le site de la mission de Coordination opérationnelle risque épidémique et biologique (COREB) nationale : https ://www.coreb.infectiologie.com/fr/fiches-pratiques.html
2. Rahi M, Fouere S, Gilbert M, et al. Monkeypox clade IIb in France in 2023-2024. Lancet Reg Health Eur 2024;47:101114.
3. Mailhe M, Beaumont AL, Thy M, et al. Clinical characteristics of ambulatory and hospitalized patients with monkeypox virus infection: An observational cohort study. Clin Microbiol Infect 2023;29(2):233-9.
4. COREB Mission nationale. fichedermatomkp-v9-juin22.pdf
5. Avis n° 2024.0058/AC/SESPEV du 29 août 2024 du collège de la Haute Autorité de santé relatif à la stratégie de vaccination contre le mpox.
6. Haut Conseil de la santé publique. Conduite à tenir autour d’un cas suspect, probable ou confirmé d’infection à Monkeypox virus. 2022 (consulté en décembre 2024).