Immobilité d’un hémilarynx ou du larynx entier par atteinte des noyaux ou des fibres des nerfs vagues (Xe paire crânienne), ou laryngé inférieur (récurrent).
Chacune des 3 fonctions du larynx (phonation, déglutition, respiration) peut être altérée, avec un degré de sévérité qui dépend de l’étiologie et du terrain.
Symptômes très variables (car la corde vocale se fige dans une position imprévisible) :
– phonation : voix quasi habituelle à dysphonie « soufflée » presque inaudible, obligeant le patient à reprendre son souffle tous les 2 à 3 mots prononcés (paralysie en abduction) ;
– déglutition : de normale à impossible, avec des fausses routes pouvant être responsables de pneumopathies d’inhalation et nécessiter une gastrostomie et/ou une trachéotomie ;
– respiration : inchangée ou au pire dyspnée sévère en cas de paralysie bilatérale en adduction, requérant une trachéotomie.

Deux grands types de cause

Traumatiques : neurochirurgie, chirurgie de la base du crâne, cervicale ou médiastinale, traumatisme externe ou intubation oro- ou nasotrachéale (le ballonnet de la sonde comprime le point de pénétration du nerf récurrent dans le larynx, juste en dessous du plan glottique).
Non traumatiques : tumorales, vasculaires, neurologique… (encadré).
En France : 65 % de causes post-chirurgicales
dont 80 % d’interventions sur glandes thyroïdes et parathyroïdes ;
20 % d’origine médicale (dont 80 % de tumeurs malignes, principalement de topographie thoraco-médiastinale) ;
15 % sans cause retrouvée.1

Mener l’enquête étiologique et évaluer la sévérité.
En l’absence de cause évidente (en général traumatique récente, v. supra) : bilan clinique, biologique et radiologique.
Consultation ORL avec examen laryngé.
Bilan biologique selon la HAS (2007) :2
– systématique : NFS, CRP, glycémie à jeun, bilan rénal et hépatique, calcémie, TSH ;
– orienté par le contexte :
• suspicion de maladie de système : ANCA, anticorps anti-DNA natifs, anticorps anti- nucléaires fluorescents (FAN), cryoglobulinémie, électrophorèse des protéines plasmatiques, dosages des immunoglobulines plasmatiques, enzyme de conversion ;
• infectieux : maladie de Lyme, hépatites B et C, VIH, neurosyphilis et tuberculose ;
• carentiel : déficit en vitamines B9 et B12.
Imagerie :

– scanner cranio-cervico-thoracique injecté avec coupes adaptées selon le côté de la paralysie (trajet différent des nerfs laryngés inférieurs droits et gauches) +++ ; pas de supériorité diagnostique du TEP-scanner ;
– imagerie par résonance magnétique nucléaire : si on suspecte une atteinte neurologique intracrânienne.
Dans un tiers des cas, cause non retrouvée (paralysie idiopathique)2 => surveiller le patient pendant au moins 3 ans ; selon 2 grandes séries mondiales, en l’absence de récupération, une tumeur maligne apparaît sur le trajet du nerf paralysé dans 10 à 17 % des cas et une affection neurologique pouvant expliquer la paralysie est diagnostiquée dans 20 % des cas.3-5
Évaluer le degré de sévérité :

– paralysie laryngée unilatérale : risque lié aux troubles de la déglutition (fausses routes, pneumopathie d’inhalation) ;
– bilatérale : aux difficultés précédentes s’ajoutent les signes respiratoires.

Traitement : symptomatique

Vitaminothérapie B1-B6, anti-inflammatoires stéroïdiens, antiviraux, antibiotiques ; acupuncture : pas d’efficacité démontrée.
Paralysie laryngée unilatérale :

– rééducation orthophonique : d’autant plus efficace qu’elle est précoce et que l’atteinte vocale n’est pas sévère ;
– chirurgie, avec 3 techniques possibles :
• injection intracordale sous anesthésie (locale ou générale) de divers matériaux plus ou moins résorbables (graisse, hydroxylapatite, acide hyaluronique, collagène) pour médialiser la corde vocale paralysée en abduction : licite si une récupération de la mobilité laryngée est envisageable, surtout en cas de troubles de la déglutition, si le pronostic vital n’est pas en jeu à court terme, et si le délai par rapport au traumatisme initial est court ;
• thyroplastie, dans le même but (médialisation) ; insertion sous anesthésie locale d’un implant non résorbable (silicone, silastic, titane) par cervicotomie (contre-indiquée si trouble de coagulation car risque d’hématome intralaryngé) : particulièrement adaptée si la paralysie est liée à une section, une résection ou une compression tumorale maligne ou ancienne ; en cas de dysphonie sévère et/ou de « besoins vocaux » particuliers (professionnels) ; de contre-indication à l’anesthésie générale ;
• réinnervation laryngée.
Paralysie bilatérale en adduction :

– objectifs : rétablir la filière aérienne et protéger les voies aériennes inférieures des fausse routes alimentaires et/ou salivaires ;
– 3 options : trachéotomie avec canule parlante, agrandissement endolaryngé avec ou sans laser ou réinnervation laryngée.
Encadre

Causes non traumatiques

 Tumeurs :

. Cérébrales

. Basi-crâniennes

. Cervicales

. Thyroïdiennes

. Œsophagiennes

. Médiastinales

. Pulmonaires



Affections vasculaires :

. Accident vasculaire du tronc cérébral

. Anévrisme artériel (aorte thoracique, carotide, sous-clavière)

. Myxome de l’oreillette gauche

. Syndrome d’Ortner (paralysie du nerf récurrent laryngé gauche d’origine cardio- vasculaire)

Autres :

. Sarcoïdose

. Lupus

. Polyarthrite rhumatoïde

. Maladie de Lyme (borréliose)

. Infections : grippe, herpès, varicelle, CMV, VIH…

. Affections neurologiques : SLA, SEP, myasthénie, syringomyélie, Arnold-Chiari, Guillain-Barré

. Thyroïdite

. Radiothérapie

. Diabète

. Carence en vitamine B9 et B12 (Biermer)

. Intoxications (plomb, vincristine)

. Chimiothérapie (vincristine et cisplatine)

. Congénitale

Encadre

Points clés

Tout d’abord, éliminer une cause neurologique ou tumorale maligne.

Démarrer le plus tôt possible une rééducation orthophonique.

En dehors d’une cause évidente, le bilan étiologique est systématique.

En cas de paralysie idiopathique : risque important d’apparition d’un cancer sur le trajet du nerf vague ou du nerf récurrent, ou d’une affection neurologique, dans les 5 ans.

Références
1. Laccourreye O, Delas B, Bonfils P, Malinvaud D. Paralysies laryngées unilatérales isolées de l’adulte : analyse d’une cohorte de 591 patients pris en charge en centre hospitalo-universitaire. Bull Acad Natl Med 2010;194:805-17.

2. HAS. Recommandations professionnelles. Prise en charge diagnostique des neuropathies périphériques (polyneuropathies et mononeuropathies multiples. Mai 2007. https://bit.ly/2NxpKp8

3. Rubin, F, Villeneuve F, Alciato L, Slaim L, Bonfils P, Laccourreye O. Paralysie laryngée unilatérale idiopathique de l’adulte. Eur Ann Otorhinolaryngol Head Heck Dis 2018;135:171-4.

4. Noel JE, Jeffery CC, Damrose E. Repeat imaging in idiopathic unilateral vocal fold paralysis: is it necessary? Ann Otol Rhinol Laryngol 2016;125:1010-4.

5. Urquhart AC. St Louis EK. Idiopathic vocal cord palsies and associated neurological conditions. Arch Otolaryngol Head Neck Surg 2005;131:1086-9.

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