Malgré les interventions sur le mode de vie (diététique, exercice, comportement), moins de 15 % des patients en situation d’obésité parviennent à maintenir une perte de poids significative à long terme. Ceci explique l’émergence des traitements médicamenteux de l’obésité. Les anciens médicaments (amphétamines, orlistat…) sont quasiment tous retirés du marché ; en revanche, d’autres molécules sont commercialisées pour la prise en charge de l’obésité, qu’elle soit associée ou non au diabète de type 2. Les agonistes du récepteur GLP- 1 (sémaglutide, liraglutide) renforcent l’action intestinale de l’hormone incrétine par augmentation de la sécrétion d’insuline, réduction de la vidange gastrique et de l’appétit. De nouveaux traitements ont des résultats encore plus prometteurs, avec des pertes de poids allant jusqu’à 25 % (et des résultats qui se rapprochent de ceux de la chirurgie bariatrique) : double agoniste GLP- 1/GIP (tirzépatide) ; triple agoniste GLP- 1/GIP/ glucagon (retatrutide), agoniste amyline/ GLP- 1 (cagrilintide).Plus de 50 000 patients ont été inclus dans les études ; ces traitements ont également montré des bénéfices cardiovasculaires, hépatiques (stéato-hépatite non alcoolique [Nash]) et rénaux, en particulier chez les patients obèses avec des comorbidités, et une amélioration de la qualité de vie, une réduction des apnées du sommeil...Les effets indésirables, chez 20 à 30 % des patients, sont surtout à type de troubles digestifs. Un cas grave, léthal, de pancréatite médicamenteuse a été rapporté récemment.Ces nouveaux traitements ont une efficacité prouvée pour une majorité des patients mais certains sont « non » ou « faibles » répondeurs et il est impossible de prédire quel est le profil de chaque personne. De plus, cet espoir thérapeutique médicamenteux menace d’être contre-productif pour les messages de prévention, donnant l’illusion de pouvoir s’affranchir du prérequis d’une modification du mode de vie (habitudes alimentaires, exercice physique).La généralisation de ces traitements onéreux (4 000 € par an pour certains et à vie pour près de 10 millions d’obèses) risque d’être insoutenable sur le plan médico-économique.Les nouveaux médicaments posent aussi un problème de santé publique avec un paradoxe : une surmédicalisation des problèmes de poids qui ne retentissent pas sur la santé (demandes non médicales du point de vue somatique, prescriptions à visée cosmétique ou de conformité à une norme sociale), alors que la majorité des personnes qui ont une obésité maladie ne consultent pas.

Jacques Bringer, membre de l’Académie nationale de médecine, Montpellier, France

26 novembre 2024