En France, environ 5 % de la population suivrait un régime végétarien (sans chair animale) et 3 % un régime végétalien (excluant tout produit d’origine animale) en 2024, selon des données recueillies par le site Statista. Cette proportion est beaucoup plus importante que celles des personnes ayant déclaré suivre de tels régimes en 2020 : 1 % de la population, d’après une enquête conduite par l’Ifop.
Compte tenu de la multiplication des études sur les bienfaits de ces régimes, l’Anses a réalisé une revue de la littérature sur les effets de ces régimes sur la santé, pour bien analyser la balance bénéfices/risques.
De plus, étant donné que le programme national nutrition santé (PNNS) de 2016 ne concernait que la population générale, il manquait des repères pour les populations pratiquant ce type de régimes d’exclusion qui engendrent des besoins différents.
Deux catégories principales sont concernées par ces rapports d’expertise. En effet, le terme « végétarien » englobe tous les régimes excluant toute chair animale (viandes, poissons, mollusques, crustacés, etc.), mais cette catégorie inclut notamment :
- les lacto-ovovégétariens, qui consomment certains produits d’origine animale comme les œufs, les produits laitiers et lu miel ;
- et les végétaliens, qui excluent tous les aliments d’origine animale (voir ci-dessus).
Régimes végétariens : quels effets sur la santé ?
La revue de littérature de l’Anses a inclus 131 études explorant les liens entre régimes végétariens et plusieurs paramètres de santé (statut nutritionnel, risque cardiométabolique, cancers, fertilité, maladies gastro-intestinales, neurovasculaires, etc.), ainsi que sur la mortalité.
Tout d’abord, concernant le poids corporel chez l’adulte, l’Anses a conclu, à partir de 4 études prospectives, que, comparé à un régime incluant de la chair animale, un régime végétalien est associé à un gain de poids plus faible au cours du temps, tandis qu’une telle association n’a pas été retrouvée pour le régime végétarien en général (mais le niveau des preuves est faible).
La revue de littérature a ensuite montré que, par rapport aux personnes dont le régime inclut des produits d’origine animale, celles ayant un régime végétarien ont un risque plus faible de développer plusieurs maladies chroniques :
- pour le diabète de type 2 (4 études, niveau de preuve modéré) : selon les études, les végétariens avaient entre 35 % et 38 % moins de risque d’avoir un DT2 ; dans une autre, où le comparateur était le régime végétarien, la consommation de viande était associée à un risque jusqu’à 74 % plus élevé de DT2 ; dans certaines d’entre elles, le bénéfice du régime végétarien était atténué après ajustement pour le poids corporel ;
- pour les cardiopathies ischémiques (2 études, niveau de preuve faible) : le risque était réduit de 32 % à 37 % chez les végétariens par rapport aux non-végétariens indépendamment de l’IMC (dans l’une des études, ce bénéfice ne concernait que les hommes) ;
- pour le cancer de la prostate (6 études, niveau de preuve faible) : risque réduit d’environ un tiers dans les études montrant des résultats significatifs.
- pour les cancers de l’estomac et les cancers hématologiques (2 études sur la même cohorte, niveau de preuve faible) : réduction du risque d’environ 60 % pour les premiers, de plus de 70 % pour le myélome multiple et d’un tiers pour les cancers des tissus lymphatiques et hématopoïétiques ;
- un risque plus faible était aussi retrouvé dans certaines études pour les troubles ovulatoires, les cataractes et la maladie diverticulaire, avec un faible niveau de preuve.
En revanche, un risque plus élevé a été observé pour :
- les fractures osseuses (niveau de preuve faible) ;
- et d’hypospadias chez les enfants des mères végétariennes (niveau de preuve faible).
Quant à l’effet sur la mortalité (toutes causes ou spécifique), les résultats des 16 études incluses dans la revue sont contradictoires : certaines suggèrent une association entre la consommation d’un régime végétarien et un moindre risque de mortalité (par rapport aux régimes carnés) ; d’autres ne retrouvent pas cette association. À cet égard, le régime méditerranéen reste donc indétrônable : plusieurs études ont montré de façon cohérente que suivre ce régime est associé à un moindre risque de mortalité, notamment cardiovasculaire mais aussi toutes causes ; un bénéfice spécifiquement sur la réduction de la mortalité toutes causes chez les femmes asymptomatiques a aussi été montré récemment.
Enfin, sur le statut nutritionnel, les études épidémiologiques ont montré que les végétariens ont des niveaux de fer, iode, vitamine B12, vitamine D et un équilibre phosphocalcique moins favorables que les non-végétariens. Quant aux végétaliens, ils ont un statut nutritionnel moins favorable en vitamine B2.
Recommandations alimentaires pour les végétariens
Un second rapport de l’Anses s’est attaché à définir les repères alimentaires spécifiquement dédiés aux personnes qui pratiquent ces régimes. L’enjeu : mieux couvrir leurs besoins nutritionnels en restant proches de leurs pratiques alimentaires, tout en limitant leur exposition aux contaminants (ce dernier enjeu concerne aussi toutes les populations, quel que soit leur régime alimentaire).
Ces nouveaux repères nutritionnels sont destinés aux adultes suivant un régime végétarien, qu’il s’agisse de lacto-ovovégétariens ou de végétaliens. Pour les élaborer, l’Anses a combiné les données de consommation des personnes végétariennes issues de la cohorte prospective française NutriNet-Santé, les références nutritionnelles et les données de contamination de plusieurs types d’aliments (échantillon représentatif couvrant environ 90 % du régime alimentaire en France).
Ce travail a confirmé la difficulté de ces régimes à couvrir les besoins nutritionnels :
- en certains acides gras oméga- 3 (EPA, DHA) et en vitamine D, pour tous les végétariens en général ;
- pour les végétaliens, s’y ajoutent : vitamine B12 et zinc chez les hommes.
Le tableau ci-contre résume les repères alimentaires établis par l’Anses grâce aux modélisations visant un apport optimisé des vitamines et minéraux nécessaires tout en réduisant l’exposition aux contaminants.
Concernant la complémentation, l’Anses ne se prononce pas pour le moment, mais les experts recommandant généralement de complémenter : systématique en vitamine B12 les végétariens et végétaliens ; en iode les végétaliens, mais aussi les végétariens consommant très peu de produits laitiers ; en DHA végétal et en fer la femme enceinte.
Des travaux européens sont en cours sur les compléments alimentaires et l’enrichissement des aliments, incluant les résultats de ces rapports.