La SEP, qui touche environ 120 000 personnes en France, démarre généralement par un syndrome clinique isolé (SCI) – épisode aigu impliquant le système nerveux central (névrite optique, myélite transverse) qui ne répond pas aux critères diagnostiques de la SEP. Mais un SCI n’évolue pas toujours en SEP. Parmi les facteurs de risque de progression, des bas niveaux de vitamine D sont suspectés. En effet, depuis les années 1960, les scientifiques ont observé une corrélation entre l’exposition au soleil et la fréquence de la sclérose en plaques, sa prévalence suivant un gradient nord-sud (élevée en Amérique du Nord et en Europe, faible en Asie de l’Est et en Afrique subsaharienne). Cependant, les essais randomisés évaluant l’effet d’une supplémentation de cholécalciférol (vitamine D3) dans la SEP ont été décevants, de même que des méta-analyses.
Afin d’évaluer l’effet de la vitamine D, des chercheurs du CHU de Nîmes ont mené un large essai randomisé multicentrique (36 centres impliqués) contre placebo en double aveugle. Les inclusions ont eu lieu de 2013 à 2020. Les patients devaient être âgés de 18 à 55 ans, avoir un taux sérique initial de vitamine D < 100 nmol/L, avoir subi dans les 90 jours un SCI diagnostiqué par IRM cérébrale et ne pas recevoir un traitement ayant un effet sur la SEP.
Les patients recevaient soit une ampoule de cholécalciférol 100 000 UI toutes les 2 semaines pendant 24 mois (ou jusqu’à une nouvelle activité de la maladie confirmée par IRM), soit un placebo. Des visites médicales ont eu lieu à l’inclusion, à 3, 12, 24 mois, et à la rechute le cas échéant. Le critère de jugement principal était une maladie active observée à l’IRM dans les 24 mois, correspondant à la conversion du SCI en SEP-RR. Les critères secondaires comprenaient dix critères cliniques et trois radiologiques (activité IRM, nouvelles lésions, lésions avec prise de contraste).
Les résultats sont parus dans le JAMA ; 163 personnes ont été randomisées dans le groupe traité et 153 dans le groupe placebo, soit 316 participants en tout (âge médian = 34 ans ; 70 % de femmes), dont 91,1 % ont participé jusqu’au bout à l’essai. Une maladie active a été observée chez 60,3 % des patients du groupe traité contre 74,1 % des patients du groupe placebo, soit une différence significative (hazard ratio [HR] = 0,66 ; IC95 % = [0,50 ; 0,87] ; p-value = 0,004).
De même, le temps médian jusqu’à la maladie active était significativement plus long dans le groupe sous vitamine D : 432 jours, versus 224 jours dans le groupe placebo.
Les trois critères secondaires IRM étaient en faveur de la supplémentation, tandis que les dix critères cliniques ne différaient pas entre les deux groupes. Des événements indésirables graves ont eu lieu à la même fréquence dans les deux groupes, et aucun n’était lié au cholécalciférol.
Pour les auteurs, ces résultats indiquent que la prise orale de cholécalciférol 100 000 UI toutes les deux semaines réduit significativement l’activité du SCI et sa transition en SEP-RR.
Ces résultats appellent de nouvelles investigations pour déterminer le rôle éventuel de la vitamine D comme traitement adjuvant dans la SEP.