La spirométrie a une place centrale dans le diagnostic, la prise en charge et le suivi de l’asthme et de la BPCO. Elle est simple et rentable à condition que soient maîtrisés choix et appropriation du matériel, technique d’utilisation et interprétation des mesures.

Comment choisir ?

La spirométrie (ou courbe débit-volume) fournit des renseignements sur les volumes de gaz pulmonaire qu’un sujet est capable de mobiliser et sur les débits gazeux qu’il peut générer. Volumes et débits sont mesurés « à la bouche », via un embout buccal, les narines étant obstruées par un pince-nez. Le patient souffle dans un spiromètre dont 4 types sont disponibles (pneumotachographe, à turbine, à ultrasons, à filament thermique).
Le choix du matériel dépend d’un compromis entre son prix, le coût des consommables, sa robustesse, le service après-vente et les contraintes (fréquence des calibrations par exemple). Un autre paramètre important est la qualité du logiciel dédié, qui doit montrer volumes et débits lors de l’examen ; afficher la courbe volume-temps (fig. 1) ; les courbes débit-volumes afin de sélectionner les examens valables et enfin choisir les équations de référence (cf. infra).
Une calibration quotidienne avec une seringue de volume connu (2 ou 3 L) est particulièrement indispensable pour certains spiromètres (pneumotachographe). Une vérification supplémentaire est nécessaire lorsqu’il est déplacé, s’il tombe ou si une valeur paraît aberrante. Une calibration « biologique » régulière, tous les mois par exemple, est très utile : elle consiste à répéter les mesures chez 2 ou 3 sujets normaux afin de s’assurer de la stabilité de l’appareil. Les dispositifs à ultrasons, robustes et ne réquérant pas d’étalonnage trop fréquent, sont un bon compromis en médecine générale.

Conditions d’exécution

En France, on ne demande aucune formation spécifique au soignant. Néanmoins, un apprentissage « de base » suivi de séances pédagogiques itératives sont indispensables. En effet, la technique et en particulier les instructions données au patient conditionnent la qualité de l’examen. Idéalement, le soignant doit lui montrer la manœuvre et l’encourager tout au long de l’exécution.
Principales étapes :
– renseigner dans le logiciel les caractéristiques du patient (sexe, date de naissance, taille, poids, groupe ethnique), la taille et le poids étant mesurés au moment de l’examen ;
– le faire asseoir ;
– appliquer un pince-nez et positionner l’embout dans la bouche ;
– demander une inspiration maximale ;
– aussitôt atteinte (sans pause précédant le début de l’expiration), demander une expiration d’emblée maximale, la plus forte et la plus longue possible, en fermant la bouche autour de l’embout pour éviter les fuites, sans l’obstruer avec la langue ;
– une fois l’expiration terminée, resolli­citer une inspiration maximale.

Que mesure-t-elle ?

La spirométrie enregistre le débit généré lors d’une expiration et d’une inspiration « forcées » lorsqu’un sujet mobilise sa capacité vitale (CV). Ces mesures informent sur le diamètre des voies respiratoires. En effet, ce dernier dépend directement du volume pulmonaire (les bronches sont d’autant plus ouvertes que les poumons sont « gonflés »). Lors d’une expiration forcée, la baisse du débit en fonction de la diminution du volume dépend donc surtout du diamètre des bronches.
La CV « forcée » (CVF) est censée être très proche de la CV « lente » (CVL) ; c’est le cas si le sujet inspire jusqu’à sa capacité pulmonaire totale (CPT) et expire jusqu’à son volume résiduel (VR). Une CVF anormalement basse peut être due :
– à une technique inappropriée (inspiration insuffisante, le sujet n’atteignant pas sa CPT et/ou expiration insuffisante, il n’expire pas jusqu’à son VR) ;
– à un trouble ventilatoire restrictif (obésité, fibrose pulmonaire, maladie neuro­musculaire) ;
– parfois, à un trouble ventilatoire obstructif (TVO) : chez un patient obèse avec TVO, le VR peut être normal mais la CPT abaissée, diminuant donc la CVF ; en cas d’emphysème avec TVO sévère, la CPT peut être augmentée, mais le VR l’est bien plus encore (la CVF est diminuée).
Le VEMS, même s’il s’exprime en unité de volume, est le débit moyen lors de la premièreseconde de l’expiration forcée. Pour qu’il soit réellement maximal, il est important que l’expiration forcée débute à la CPT. En effet, en cas d’inspiration incomplète, on « perd du haut débit », ce qui par conséquent diminue inévitablement le VEMS. En revanche, une expiration incomplète, tant qu’elle dure plus de 1 seconde et est précédée d’une inspiration complète, n’a pas d’influence.
La spirométrie mesure le débit expiratoire de pointe (DEP), les débits à 25, 50 et 75 % de la CVF et le débit moyen entre 25 et 75 % de la CVF (DEM 25-75). Le DEP, utilisé pour le suivi de l’asthme et parfois pour détecter la BPCO, est un paramètre certes spécifique mais peu sensible pour identifier un TVO. Même s’il est volontiers utilisé en épidémiologie, le DEM 25-75 est extrêmement dépendant du volume pulmonaire et ne saurait définir un TVO.

Interprétation

La comparaison des mesures à des valeurs de référence permet de conclure à leur caractère normal (ou typique) ou anormal (atypique). L’identification d’un TVO à l’aide du rapport VEMS/CV est l’objectif principal. Pour certains experts, il y a TVO si VEMS/CVF < 0,7, même si ce seuil fixe entraîne un défaut de diagnostic chez les sujets jeunes (dont la limite inférieure de normale [LIN] de ce rapport est > 0,7) et par excès chez les personnes âgées (dont la LIN est < 0,7). Une alternative est d’utiliser une LIN qui dépend de l’âge, grâce des équations « modernes » à installer sur le logiciel dédié.
Même en l’absence de TVO, la spirométrie peut objectiver des anomalies fortement évocatrices d’une pathologie.
Une CV basse avec un VEMS/CV normal évoque un trouble ventilatoire restrictif consécutif à une anomalie « du contenant » (obésité, cyphoscoliose, myopathie débutante).
Une CV basse avec un VEMS/CV élevé évoque une fibrose pulmonaire.
Des débits inspiratoires et expiratoires forcés « en plateau » font suspecter une sténose trachéale… Il est probablement raisonnable, lorsqu’une spirométrie correcte ne montre pas de TVO mais n’est pas normale, d’en discuter avec un pneumologue.
Pour en savoir plus
Soumagne T, Guillien A, Degano B. Explorations fonctionnelles respiratoires. Rev Prat Med Gen 2017; 31:287-91.
Soumagne T, Guillien A, Roux P, et al. Quantitative and qualitative evaluation of spirometry, for COPD screening in general practice. Resp Med Res 2019 (in press). Doi : 10.1016/j.resmer.2019.07.004
Guillien A, Soumagne T, Regnard J, Degano B; Groupe fonction de la SPLF. Les nouvelles équations de référence du Global Lung Function Initiative (GLI) pour les explorations fonctionnelles respiratoires. Rev Mal Respir 2018;35:1020-7.

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essentiel

La spirométrie est indiquée devant des symptômes respiratoires pour confirmer le diagnostic de BPCO ou d’asthme (et aussi dans son suivi).

dûment formé.

(entretien, contrôles de qualité), pratique (formation initiale et continue) et interprétation requièrent de la rigueur, et une collaboration multidisciplinaire.