Les biothérapies sont des traitements ciblés issus des biotechnologies, développés à partir de cellules ou molécules d’origine vivante (cellules, tissus, hormones, anticorps, etc.). Elles représentent une révolution thérapeutique en pédiatrie et transforment la prise en charge des maladies inflammatoires, allergiques et oncologiques de l’enfant.

Historiquement, l’insuline a été l’une des premières biothérapies. Plus récemment, en pédiatrie, l’immunisation passive avec l’anticorps monoclonal nirsévimab permet de réduire le nombre de bronchiolites sévères lors des épidémies saisonnières.

Leur essor récent repose sur les progrès technologiques, une meilleure compréhension des mécanismes physiopathologiques et des formes galéniques adaptées à l’ambulatoire.

Les anticorps monoclonaux, produits par la technique de l’hybridome (c’est-à-dire une production en masse d’anticorps issus de la fusion de lymphocytes B et de cellules myélomateuses), en sont l’exemple le plus emblématique. Leur nomenclature précise la cible et l’origine ; par exemple, l’infliximab est un anti-TNF utilisé dans plusieurs maladies inflammatoires : son préfixe (« inf ») est choisi par l’industrie mais les autres suffixes indiquent sa fonction ; il cible le système immunitaire (« li »), est chimérique (« xi ») et monoclonal (« mab »).

Chaque biothérapie a donc ses indications, mais leur progression a été majeure dans le domaine des molécules dirigées contre le système immunitaire. En pédiatrie, elles sont surtout prescrites en deuxième ou troisième ligne dans les maladies inflammatoires (telles que les MICI, les arthrites juvéniles, le psoriasis), les allergies (dont l’asthme ou l’eczéma sévère), les greffes (d’organes ou de moelle osseuse) et les cancers (leucémies, lymphomes, neuroblastomes...). Bien tolérées et compatibles avec la croissance et le développement de l’enfant, elles restent cependant coûteuses et peuvent entraîner des effets indésirables, notamment infectieux. Le médecin généraliste joue un rôle dans la surveillance, en dépistant les complications possibles et en en assurant la prévention.1

La tolérance globale des biothérapies est excellente chez l’enfant, mais ces traitements nécessitent une surveillance pour préserver leurs bénéfices tout en limitant leurs risques.

Complications dominées par le risque infectieux

L’immunosuppression induite constitue le principal risque, exposant à des infections bactériennes ou virales selon les voies de signalisation ciblées. Les complications allergiques ou auto-immunes, plus rares, peuvent survenir à moyen terme.

Utilisées en pédiatrie depuis les années 2000, les biothérapies font encore l’objet d’évaluations à long terme, notamment concernant les risques oncologiques.

Les infections découlent de l’immunosuppression engendrée par les biothérapies : selon la voie ciblée, les patients peuvent avoir une susceptibilité accrue à certains germes, justifiant un bilan préthérapeutique. Il est, par exemple, essentiel d’éliminer une tuberculose avant le début d’un traitement par anti-TNFα. Les spécificités en matière de complications sont précisées pour chaque classe dans le tableau. La prescription d’un traitement ciblé est toujours réalisée après un bilan préthérapeutique complet, permettant notamment la recherche de facteurs de risque et de complications infectieuses.

La survenue d’une infection sous biothérapie doit faire l’objet d’une gestion spécifique, décrite dans l’encadré 1.

Vaccinations, un enjeu majeur

L’immunodépression liée à la biothérapie impose une couverture vaccinale optimale pour prévenir le risque d’infections graves. Outre le calendrier vaccinal général,4 les vaccinations contre la grippe et les infections à pneumocoques sont recommandées.

Le statut sérologique pour le virus varicelle-zona doit être vérifié : en cas de primo-infection ou de cas contact chez un patient non immunisé, l’administration d’immunoglobulines est indiquée.

Les inquiétudes parentales concernant la tolérance ou d’éventuelles interactions avec la maladie (en plus des interrogations habituelles) expliquent une moindre couverture vaccinale par rapport à la population générale, d’où l’importance d’un échange avec le médecin (encadré 2).5

Situations particulières

Patient voyageur

Il n’y a aucune contre-indication au voyage sous biothérapie.

Le patient doit disposer d’un document mentionnant le traitement (nom en DCI, dose et dates) et connaître les modalités de conservation du médicament. Il convient de rappeler les motifs qui doivent faire consulter : fièvre, signes d’infection, altération de l’état général.

Enfin, il n’existe aucune contre-indication à la prophylaxie antipalustre.

Soins dentaires

Selon les situations, une antibioprophylaxie ou une adaptation du traitement peut être nécessaire, en concertation avec le pédiatre prescripteur.

Encadre

1. Grands principes de gestion d’une infection sous biothérapie

Évaluation clinique précoce : tout signe infectieux doit être pris au sérieux.

Identification de la prise en charge adaptée : ambulatoire ou hospitalière ?

Attitude thérapeutique adaptée : prélèvements microbiologiques selon la clinique, et discussion de l’indication d’un traitement antibiotique ou antiviral avec le médecin spécialiste.

Signes d’alerte : infection atypique ou altération de l’état général, nécessitant un adressage spécialisé urgent.

Gestion de la biothérapie : l’arrêt ou la poursuite de la biothérapie doit être discuté avec le pédiatre référent (prise en compte de la demi-vie du médicament, du risque de poussée de la maladie en cas d’arrêt, etc.).

Encadre

2. Vaccins et immunothérapie : trois principes fondamentaux

L’immunogénicité vaccinale persiste malgré l’immuno­dépression modérée liée à la biothérapie ; les vaccins inertes du calendrier vaccinal de la population générale doivent donc être administrés au patient sous biothérapie.

Il n’y a pas de risque de poussée inflammatoire après une vaccination. En revanche, le risque infectieux est réel et les infections peuvent déclencher des poussées de la maladie inflammatoire.

Les vaccins vivants sont contre-indiqués chez les sujets recevant une biothérapie et doivent être réalisés idéalement six semaines avant le début du traitement.

Références
1. Duclaux-Loras R, Belot A. Update on biotherapies in pediatrics. Perfection Pediatr 2022;5(3):193-201.
2. Centre de référence en infections (CRI). Fiches du CRI. https://cri-net.com/fiches-du-cri/dernieres-mises-a-jour
3. McAtee CL, Lubega J, Underbrink K, et al. Association of Rituximab Use With Adverse Events in Children, Adolescents, and Young Adults. JAMA Netw Open 2021;4(2):e2036321.
4. Ministère chargé de la Santé et de l’Accès au soins. Calendrier des vaccinations et recommandation vaccinales. Avril 2025.
5. Jansen MHA, Rondaan C, Legger GE, et al. EULAR/PRES recommendations for vaccination of paediatric patients with autoimmune inflammatory rheumatic diseases: Update 2021. Ann Rheum Dis 2023;82(1):35-47.

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