La HAS a actualisé ses recos sur la prophylaxie préexposition contre le VIH (PrEP), en introduisant une nouvelle molécule injectable à action prolongée. Patients éligibles, contre-indications et modalités de prescription, de suivi et d’arrêt à lire dans cette fiche.

La prophylaxie préexposition contre le VIH (PrEP), qui peut être prescrite par tout médecin en ville depuis 2021, était jusqu’ici disponible uniquement par voie orale (ténofovir disoproxil fumarate-emtricitabine [TDF/FTC]). Cette forme galénique reste le traitement de 1re intention, mais une forme injectable (cabotégravir d’action prolongée (CAB-LP) est désormais disponible, en 2e intention en raison du risque de sélection de virus résistants aux inhibiteurs de l’intégrase en cas d’échec, des difficultés du diagnostic en cas d’infection incidente et de la différence de coût.

Indications et contre-indications

La PrEP est indiquée chez toute personne ayant un haut risque d’exposition au VIH.

Elle est fortement recommandée chez :

  • les HSH et personnes transgenres ayant plusieurs partenaires et ayant des relations anales non protégées par le préservatif, passées ou présentes ;
  • les partenaires séronégatifs de patients infectés par le VIH dans l’attente que leur charge virale soit indétectable (en cas de relations sexuelles non protégées par préservatif) ;
  • les personnes s’injectant des drogues intraveineuses avec échange de matériel d’injection.

Le TDF/FTC peut être prescrit chez les sujets porteurs chroniques du VHB (schéma continu uniquement), en tenant compte du risque d’hépatite aiguë grave à l’arrêt du traitement, ainsi que chez la femme enceinte, allaitante ou sous contraception hormonale.

Contre-indications à la PrEP :

  • séropositivité au VIH ou suspicion de primo-infection ;
  • pour le TDF/FTC : insuffisance rénale avec DFG < 50 mL/min/1,73m2.

Le CAB-LP injectable peut être proposé en alternative en cas d’insuffisance rénale notamment, ou quand la PrEP orale ne peut être utilisée dans de bonnes conditions.

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Bilan avant la prescription

La PrEP ne doit être initiée qu’après un bilan initial systématique permettant :

  • d’écarter une infection VIH :
    • sérologie VIH datant de moins de 15 jours (pour le TDF/FTC),
    • quantification de la charge virale en cas de doute sur une primo-infection, obligatoire pour le CAB-LP dans les 7 jours précédant l’initiation ;
  • de s’assurer de l’absence d’insuffisance rénale : évaluation du DFG ;
  • de définir le statut vis-à-vis des hépatites : ALAT.

Ce bilan est complété, selon les résultats biologiques antérieurs, l’anamnèse vaccinale et le type d’exposition par :

  • sérologie VHB (Ag HBs, Ac anti-HBs, Ac anti-HBc) ;
  • sérologie VHC (ou ARN VHC si sérologie antérieure positive) ;
  • sérologie VHA (IgG) ;
  • sérologie syphilis ;
  • PCR gonocoque et Chlamydia trachomatis (sites pharyngé, anal, urinaire ou vaginal en fonction des pratiques) ;
  • b-hCG chez la femme en l’absence de contraception.

Outre le dépistage des IST, cette consultation initiale permet aussi de proposer un bilan global de santé sexuelle :

  • évaluation de la demande de contraception chez les femmes ;
  • évaluation de la santé mentale et de l’exposition aux violences sexuelles, orientation en addictologie en cas de chemsex ;
  • pour mieux accompagner les patients, un entretien communautaire avec un membre d’une association impliquée dans le conseil aux personnes sous PrEP peut être proposé.

Il est recommandé aussi de proposer certaines vaccinations :

  • en l’absence de marqueurs d’infection ancienne : vaccination contre le VHB chez toute personne, et contre le VHA chez les HSH ;
  • vaccination contre les HPV ;
  • contre les poxvirus avec un vaccin de 3e génération (Imvanex, Jynneos).

Modalités d’administration de la PrEP

Pour la PrEP orale par TDF/FTC, deux schémas sont possibles (prise continue ou discontinue), détaillés dans les figures ci-contre. La forme discontinue est indiquée uniquement chez les hommes cisgenres ou les personnes transgenres ayant des relations anales exclusives, et hors infection chronique par le VHB ; pour les personnes transgenres ayant des rapports vaginaux et celles sous traitement hormonal féminisant, le schéma continu est recommandé préférentiellement.

Pour la PrEP injectable par CAB-LP : dose de charge avec 2 injections IM à 1 mois d’intervalle (M0, M1) et ensuite tous les 2 mois (M3, M5, M7…) avec une marge de +/- 7 jours pour les dates d’injections.

Modalités d’arrêt et de reprise de la PrEP

Pour la PrEP orale par TDF/FTC :

  • Arrêt :
    • Prendre un comprimé de TDF/FTC par jour pendant les 2 jours qui suivent le dernier rapport sexuel, pour les hommes cisgenres et personnes transgenres ayant des rapports anaux) ; pendant 7 jours pour les autres populations.
    • En cas de portage du VHB, un avis spécialisé est nécessaire avant l’arrêt de la PrEP, avec une surveillance des transaminases. Le patient doit être informé du risque d’hépatite aiguë grave.
    • Tout arrêt doit s’accompagner d’une mise en garde, avec rappel de l’importance des autres moyens de prévention (préservatif). La poursuite des consultations de santé sexuelle et de dépistage est recommandée.
  • Reprise : mêmes modalités que lors de la prescription initiale :
    • contrôle préalable du statut sérologique, avec charge virale VIH en cas de risque de primo-infection en cours,
    • la reprise se fait avec une dose de charge de 2 comprimés pour la 1re prise.

Pour la PrEP injectable par CAB-LP :

  • Arrêt : mettre en place une autre modalité de prévention de l’infection VIH (relais par PrEP orale par TDF/FTC en l’absence de contre-indication, ou préservatifs) du fait de la très longue demi-vie du CAB-LP (pouvant être détecté jusqu’à 12 mois après arrêt) et du risque de sélection d’un virus résistant aux inhibiteurs de l’intégrase en cas d’infection intercurrrente.
  • Reprise : refaire une dose de charge avec 2 injections à 1 mois d’intervalle si le délai depuis la dernière injection est > 3 mois.

Suivi

Un mois après l’initiation de la PrEP, vérifier :

  • la tolérance clinique et biologique du traitement (créatininémie/clairance) ;
  • la bonne compréhension du schéma de prise ou du calendrier des injections ;
  • la sérologie VIH, car une séroconversion a pu échapper au bilan initial ; charge virale VIH si CAB-LP (v. ci-dessous).

Puis des consultations régulières (tous les 2 à 6 mois en fonction des besoins du patient et des modalités de PrEP) sont recommandées pour :

  • évaluer la tolérance et l’efficacité de la PrEP (avec sérologie VHC et protéinurie/créatininurie sur échantillon une fois/an) ;
  • rechercher des IST ;
  • évaluer avec la personne ses expositions sexuelles (VIH et autres IST).

Pour le CAB-LP, un suivi systématique avec charge virale VIH est proposé à M1, puis tous les 2 mois jusqu’à la 5e injection (M7), et ensuite tous les 4 mois.

En cas de découverte d’une sérologie VIH positive chez une personne sous PrEP, confirmer l’infection au plus vite avec (2e sérologie ELISA, Western-blot (ou immunoblot), quantification de l’ARN VIH plasmatique +/- ADN VIH) et orienter dans un service spécialisé.

Pour en savoir plus
HAS. Traitement préventif pré-exposition de l’infection par le VIH. 6 août 2024.
Prescription de la PrEP en ville : comment faire, en pratique ?  Rev Prat (en ligne) 24 novembre 2023.
Martin Agudelo L. Bien prescrire la PrEP en ville.  Rev Prat (en ligne) 1er décembre 2023.

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