Survenant lors des expositions au froid et régressant en moins de deux heures après éviction de la source froide, ce type d’urticaire peut avoir un retentissement important sur la qualité de vie et être responsable de réactions systémiques graves. Sa prise en charge étant mal codifiée, les dermatologues français ont élaboré des recos pour les praticiens, avec un algorithme de prise en charge.

L’urticaire au froid se manifeste par une éruption papuleuse, érythémateuse et prurigineuse survenant lors des expositions au froid et régressant en moins de 2 heures après réchauffement, sans laisser de cicatrice ni de pigmentation. Elle peut être superficielle (œdème dermique) ou profonde (œdème dermo-hypodermique ou angiœdème).

Elle appartient au spectre des urticaires chroniques inductibles pour lesquelles un ou plusieurs facteurs déclenchants peuvent être déterminés, contrairement à l’urticaire chronique dite « spontanée ». Sa prévalence serait proche de 0,05 % en Europe centrale. Il n’existait pas de consensus en France parmi les praticiens sur la définition de la maladie et les facteurs de risque de formes sévères, sur la place des explorations paracliniques utiles, ni sur la stratégie thérapeutique adaptée, rendant les pratiques hétérogènes. D’où ces nouvelles recommandations, fruit du travail du Centre de preuves en dermatologie et du Groupe urticaire de la Société française de dermatologie. Elles ont été publiées dans le British Journal of Dermatology et dans les Annales de dermatologie – FMC en 2024.

Diagnostic et bilan

L’urticaire au froid est une affection d’évolution chronique, et la guérison survient spontanément après plusieurs mois ou années dans la grande majorité des cas. Elle peut concerner tous les âges de la vie, avec une prédominance féminine nette chez l’adulte. L’association à un terrain atopique est observée chez un peu plus de la moitié des malades adultes et deux tiers des enfants. Une autre forme d’urticaire, notamment inductible, est souvent associée.

On distingue 3 degrés de sévérité :

  • Type I : urticaire et/ou angiœdème localisé à la zone de contact au froid ;
  • Type II : urticaire et/ou angiœdème généralisé sans hypotension ;
  • Type III : réaction systémique sévère ou œdème pharyngo-laryngé asphyxiant.

Pour le diagnostic, le groupe de travail recommande de réaliser systématiquement un test au glaçon (dans un sac en plastique) pendant 5 minutes au niveau de la face antérieure de l’avant-bras ; un délai de 10 minutes après ablation de la source froide doit être respecté pour lecture du test. En cas de négativité, le glaçon peut être appliqué à nouveau jusqu’à 10 voire 20 minutes, en conservant le délai de 10 minutes après ablation de la source froide pour la lecture. Le test d’immersion diagnostique d’un avant-bras dans l’eau froide n’est pas recommandé car il expose au risque de réactions systémiques.

Concernant les examens complémentaires, une NFS et un dosage de la CRP sont conseillés, compte tenu de l’association fréquente à d’autres types d’urticaire. En cas de signes cliniques évocateurs de purpura, arthralgies ou neuropathie périphérique, il faut considérer la recherche des cryoglobulines et des agglutinines froides.

L’urticaire au froid est considérée comme sévère en cas d’antécédent :

  • d’anaphylaxie au froid (hypotension ou symptômes suggestifs d’hypotension) ;
  • de symptômes pharyngés ou laryngés après une exposition au froid (y compris après l’ingestion d’aliments froids).

La prescription d’adrénaline est indispensable dans ces situations (stylos d’adrénaline auto-injectable).

Quelle prise en charge ?

L’indication à un traitement de fond est à considérer en fonction des signes de sévérité, de la fréquence des crises et du retentissement sur la qualité de vie.

Les anti-H1 de seconde génération à posologie conventionnelle (simple dose, conforme à l’AMM), efficaces et bien tolérés, sont le traitement de première intention. Il n’y a pas d’argument pour privilégier une molécule par rapport à une autre.

En cas d’échec, le groupe de travail recommande une augmentation de posologie jusqu’à quatre fois la dose, en précisant que les anti-H1 étudiés à quadruple dose dans l’urticaire au froid sont la rupatadine, la bilastine et la desloratadine (et seulement cette dernière chez l’enfant). En 3e intention, l’omalizumab est associé, à la dose de 150 mg toutes les 4 semaines (en cas d’échec à 12 semaines, la posologie peut être augmentée à 300 mg toutes les 4 semaines). La désensibilisation au froid n’est pas recommandée.

L’éducation des patients est cruciale. Une fiche à leur remettre, récapitulant les principales mesures d’éviction au froid, est disponible sur : https ://centredepreuves.sfdermato.org/. En cas d’opération chirurgicale, il est important de prévenir l’anesthésiste et de limiter au maximum les différences de températures (réchauffer la salle d’opération, réchauffer les solutés de perfusion et les matériaux en contact avec le patient…). Lorsque l’urticaire au froid survient dans un contexte professionnel, il est important de prendre contact avec son médecin du travail.

Un algorithme résumant la prise en charge est téléchargeable ici :https ://document.sfdermato.org/reco/urticaire-au-froid/algorithme.pdf

Pour en savoir plus
Centre de preuves en dermatologie. Les recommandations du CDP : urticaire au froid. 2023.
Bréhon A, Bensefa-Colas L, D’Andrea C, et al. Guidelines for cold urticaria management established by the Centre of Evidence of Dermatology and the Urticaria Group of the French Society of Dermatology. Inserm 23 avril 2024.
Bréhon A, Bensefa-Colas L, D’Andrea C, et al. Urticaire au froid.  Ann Dermatol Vénéréol 17 juillet 2024.
Soria A. Urticaires aiguës et chroniques.  Rev Prat Med Gen 2022;36(1070);379-86.

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