C’est paru dans Nature : une étude suggère que le vaccin à ARNm contre le SARS-CoV- 2 améliore significativement la survie de patients atteints de cancers solides peu sensibles à l’immunothérapie.

Les inhibiteurs de points de contrôle immunitaire (« immune checkpoint inhibitors » [ICI]) ont transformé la prise en charge de nombreux cancers, mais demeurent inefficaces chez une proportion importante de patients dépourvus d’immunité antitumorale préexistante. Bien que les vaccins anticancéreux personnalisés à ARNm puissent renforcer l’efficacité des ICI, leur mise au point est limitée par d’importantes contraintes logistiques et temporelles.

Une expérimentation animale a été menée sur des souris chez lesquelles des tumeurs de différents types ont été implantées : cancers bronchiques non à petites cellules (CBNPC), mélanomes et tumeurs solides diverses (ex. : mélanomes B16F0 et B16F10‑OVA ; carcinome pulmonaire de Lewis). Les souris ont ensuite été réparties en 2 groupes : traitées par vaccins ARNm ciblant le SARS-CoV- 2 disponibles en pratique courante ou contrôles (non vaccinées ou « traitées » par placébo). L’évolution des tumeurs était monitorée 3 fois par semaine à partir du 8e jour postimplantation, et ce jusqu’à ce que les souris atteignent les seuils prédéfinis chez l’humain (soit environ 3 semaines, avec un pic d’analyses entre J17 et J22).

Les résultats, publiés en octobre 2025 dans Nature 1, démontrent que les vaccins à ARNm ont suscité une production importante d’interférons de type I, activant ainsi le système immunitaire inné et stimulant la réponse des lymphocytes T CD8⁺ dirigés contre des antigènes associés aux tumeurs. L’administration concomitante d’ICI a permis de traiter efficacement les tumeurs « froides » (non-infiltrées par les cellules immunitaires, peu sensibles à l'immunothérapie) en augmentant l’expression de PD-L1.

Afin de mieux comprendre les effets de cette vaccination chez l’humain, les chercheurs ont réalisé une étude rétrospective sur de larges cohortes de patients cancéreux qui avaient reçu les vaccins à ARNm anti-SARS-CoV- 2 (BNT162b2 et mRNA‑1273). Les résultats ont également montré une augmentation des interférons de type I, l’activation coordonnée des compartiments myéloïdes et lymphocytaires ainsi qu’une augmentation de l’expression de PD-L1 dans les tumeurs.

De plus, l’administration du vaccin dans les 100 jours suivant le début du traitement par ICI était associée à une amélioration significative de la survie globale médiane et de la survie à 3 ans (réduction d’environ 50 % du risque de décès après ajustement sur de nombreux facteurs cliniques : stade, comorbidités, traitements concomitants) chez les patients atteints de CBNPC et de mélanomes.

Des analyses comparatives n’ont révélé aucune association comparable entre vaccins antigrippaux ou antipneumococciques et survie sous ICI, renforçant l’hypothèse d’un mécanisme immunologique particulier aux vaccins à ARNm.

En pratique, cette étude suggère que le vaccin à ARNm ciblant le SARS-CoV- 2, lorsqu’il est administré à proximité d’un traitement par immunothérapie, pourrait améliorer significativement le pronostic de certains patients atteints de cancers à tumeurs solides, y compris ceux habituellement peu sensibles à l’immunothérapie.

L’effet observé concernait une vaccination standard, administrée pour une indication non oncologique, sans modification du schéma de traitement anticancéreux, ce qui suggère une interaction thérapeutique indirecte, mais cliniquement significative.

Ces résultats indiquent que les vaccins à ARNm ciblant des antigènes non tumoraux peuvent agir comme de puissants modulateurs de l’immunité antitumorale et améliorer l’efficacité des inhibiteurs de points de contrôle immunitaire.

Référence
1. Grippin AJ, Marconi C, Copling S, et al. SARS-CoV-2 mRNA vaccines sensitize tumours to immune checkpoint blockade.  Nature 2025;647(8089):488-97.

Une question, un commentaire ?