Une patiente de 25 ans, sans antécédents pathologiques particuliers, consulte pour des dorsolombalgies mécaniques avec une irradiation intercostale, sans déficit moteur ou sensitif. L’examen clinique met en évidence une hypercyphose dorsale et une hyperlordose lombaire. Les scanners dorsolombaires (fig. 1 et 2) objectivent une division complète du corps vertébral D11 en hémivertèbre dite « en aile de papillon ». La patiente est mise sous traitement symptomatique associé au renforcement des muscles paravertébraux et respiratoires avec une bonne évolution.
Les vertèbres papillon sont secondaires à un défaut de fusion du corps vertébral plus ou moins étendu au cours de l’embryogenèse.1 Cette anomalie du développement, qui implique généralement une seule vertèbre, peut induire une division complète du corps vertébral en deux hémivertèbres de forme triangulaire. Elles sont souvent asymptomatiques et détectées accidentellement.1 La concomitance entre les vertèbres papillon et les maladies congénitales telles que les syndromes d’Alagille, de Jarcho-Levin, de Crouzon et de Pfeiffer, est parfois constatée. En raison de leur rareté, elles peuvent facilement être confondues à tort avec d’autres processus pathologiques, notamment une fracture vertébrale.
La malformation dite « vertèbre papillon » a été décrite pour la première fois chez un homme de 55 ans en 1850 par Rokitansky. Dans la plus grande série des vertèbres papillon, des anomalies des systèmes cardiaque, neurologique et génito-urinaire étaient associées respectivement dans 30 %, 27 % et 23 % des cas.2 L’association étroite entre le développement de la colonne vertébrale et du squelette appendiculaire explique le taux élevé de vertèbres papillon survenant avec d’autres défauts squelettiques : 43 % des patients ayant une vertèbre papillon ont une autre anomalie musculosquelettique associée.2 La géométrie de la vertèbre papillon est variable mais a tendance à être déficiente antérieurement, provoquant une forme de coin et une cyphose focale.3
Les deux moitiés sont généralement égales mais peuvent être asymétriques, avec un arc postérieur et des pédicules intacts.4,5 Dans certains cas, ils peuvent être reliés par un isthme osseux.6 L’anomalie de la statique vertébrale est associée dans 70 % des cas, la scoliose étant la découverte la plus courante.2
La colonne vertébrale thoracolombaire est le site le plus fréquent pour la formation des vertèbres papillon.4,7,8 Le siège préférentiel d’une vertèbre papillon unique est T1 et T11.2,7
Il est important de comprendre les caractéristiques radiographiques des vertèbres papillon pour les distinguer des autres processus pathologiques (fracture, métastase, syringomyélie et maladie de Charcot). Un examen attentif des vertèbres adjacentes montre des caractéristiques de déformation de longue date, telles qu’un allongement exagéré des marges antérieures et un disque intervertébral normal. De plus, les vertèbres papillon causent généralement moins de cyphose. Plusieurs publications ont établi un lien entre les vertèbres papillon et les lombalgies1,9,10 dont le traitement est généralement conservateur. La cause de la lombalgie chez un patient avec des vertèbres papillon peut être sans rapport avec l’anomalie structurale et nécessite donc des recherches supplémentaires. ­Cependant, le traitement de la lombalgie dans la plupart des cas est généralement conservateur.
Les vertèbres papillon peuvent également être associées à une hernie discale symptomatique, qui nécessite une décompression.1,3,10 L’évaluation des autres systèmes d’organes doit être réalisée : 89 % des cas avec plus d’une vertèbre papillon étaient associés à la présence d’un syndrome.2 Une évaluation spécifique des systèmes cardiaque et génito-urinaire par échographie serait une modalité pratique et non invasive pour évaluer toute autre malformation. Des tests génétiques doivent être envisagés chez les patients souffrant de vertèbres papillon associées à d’autres malformations du squelette ou des organes. 
Références
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