Au restaurant
En France, depuis 2015, les restaurateurs ont l’obligation de fournir sur un document écrit la présence d’un ou plusieurs des 14 allergènes à déclaration obligatoire rentrant dans la composition des plats proposés au menu. Cette liste doit être mise systématiquement à disposition des clients.
Toutefois, les allergiques alimentaires qui désirent manger au restaurant s’exposent à certains risques, surtout en cas de multi-allergies. En effet, un grand nombre de restaurants rechigne à appliquer avec précision les mesures de précaution et d’information du consommateur. De nombreuses études pointent le manque de connaissance du personnel vis-à-vis des risques, ce sujet étant peu développé lors de leur formation en hygiène alimentaire.
En 2018, une enquête menée dans le Grand-Est auprès de 100 restaurateurs de Metz et Strasbourg met en évidence que seuls 8 % des établissements sélectionnés ont conscience du risque mortel des allergies alimentaires. Début 2024, un restaurateur est condamné en France pour homicide involontaire pour défaut d’étiquetage et non-respect de la législation, à cause du décès en 2019 d’une de ses clientes, allergique à l’arachide, qui avait consommé un plat contenant cette légumineuse.
Pour éviter au maximum les accidents, l’allergique doit prendre des précautions autant en France qu’en cas de déplacement à l’étranger (voir fiche pratique dans l’encadré 1 ci-dessous).
Dans l’avion
En 2017, un article évoque que plus de 2,75 milliards de passagers prennent l’avion chaque année. Toutes causes médicales confondues, le nombre d’urgences en vol avoisinent les 44 000 par an, avec 17 % d’hospitalisations et 4 % de décès. La cause allergique serait responsable de 2 à 4 % des problèmes médicaux observés durant le trajet aérien. L’allergie à l’arachide est signalée dans 9 % des cas. Entre 2002 et 2007, l’allergie est la septième cause d’accident dans le cadre d’un vol commercial. Les allergènes les plus souvent cités comme responsable sont l’arachide et les fruits à coque.
Dans une enquête récente menée au niveau mondial sur 4 704 passagers allergiques interrogés, 98 % d’entre eux reconnaissent avoir un trouble anxieux en prenant l’avion. Parfois, ils ont des attitudes inadaptées en cas de réaction dans le contexte d’une allergie alimentaire, comme le fait de s’injecter l’adrénaline dans les toilettes sans prévenir le personnel de bord. Dans 4,5 %, des cas, un détournement de l’avion vers un aéroport le plus proche est nécessaire pour évacuation sanitaire en raison de la sévérité de la réaction.
En ce qui concerne la conduite à tenir en cas d’allergie alimentaire, il n’existe pas d’attitude standardisée : les compagnies aériennes appliquent chacune leurs propres recommandations. Toutefois, aux États-Unis, la FAA (Federal Aviation Administration) exige la présence d’épinéphrine en flacon dans les trousses médicales d’urgence, accompagnée d’un flacon de salbutamol pour nébulisation, d’hydrocortisone et d’un antihistaminique. Il reste tout de même fortement recommandé aux allergiques alimentaires d’avoir à portée de main leurs deux stylos auto-injecteurs d’adrénaline durant le vol, accompagnés de l’ordonnance avec la conduite à tenir (les médicaments rédigés en DCI).
En 2020, 104 compagnies aériennes opérant en Allemagne ont été sollicitées par questionnaire pour donner leurs impressions sur les risques liés aux allergies alimentaires lors des trajets en avion, mais seules 4 d’entre elles y ont répondu. L’analyse des sites web de 115 compagnies a révélé que seuls 72 sites fournissent des informations (incomplètes) sur le sujet. Pour les 43 autres, le moteur de recherche n’évoque même pas le mot allergie. Uniquement 4 compagnies proposent des « zones tampons sans allergènes » dans l’avion.
On peut déplorer des accidents en vol, comme ce fut le cas cet été pour un DJ (Jack Fowler), allergique à la noix de cajou, qui a consommé durant le trajet (vol commercial) un plat à base de poulet agrémenté d’une sauce contenant ce fruit à coque. Il a été filmé s’injectant dans l’avion de l’adrénaline en raison d’une réaction anaphylactique. Le personnel de bord lui avait assuré à tort, à trois reprises, qu’il n’y avait aucune présence de noix de cajou dans le plat.
Afin d’éviter au maximum les réactions durant les trajets aériens, il est impératif que les allergiques prennent certaines précautions dès la réservation jusqu’à l’embarquement (voir fiche ci-dessous).
Voyage à l’étranger
Lors de l’achat des billets et des réservations hôtelières, il faut se renseigner : certaines chaînes hôtelières ou compagnies de croisières sont plus sensibilisées aux problèmes inhérents aux allergies alimentaires (fiche ci-dessous).
Attention aussi à l’étiquetage : le nombre d’allergènes à déclaration obligatoire varie selon les pays et continents.
1. Allergies alimentaires : précautions à prendre (fiche conseils pour les patients)
Une version téléchargeable de cette fiche est disponible sur ce lien suivant.
Au restaurant en France
- En cas de multi-allergies alimentaires, éviter au maximum les restaurants et surtout les buffets à volonté, où le risque de contamination croisée est majoré.
- En cas d’allergie à l’arachide, éviter les restaurants exotiques, notamment asiatiques où les plats sont plus susceptibles d’en contenir.
- Lorsque l’on réserve une table, il est important que l’allergique signale au préalable la nature des aliments auxquels il réagit afin que le restaurateur puisse adapter le menu.
- En cas d’antécédents de réaction anaphylactique (grade 2 à 4 dans classification de Ring et Messner), le client allergique doit toujours avoir en sa possession ses deux stylos auto-injecteurs d’adrénaline.
- Demander systématiquement la composition des plats avant la commande et vérifier la présence d’informations au sujet des 14 allergènes à déclaration obligatoire.
- Ne pas utiliser plats, couverts et serviette de son voisin.
Séjour à l’étranger
- Respecter les mêmes mesures qu’en France.
- À savoir : le nombre d’allergènes à déclaration obligatoire varie selon les pays et continents (en Europe : 14 ADO ; aux États-Unis : 9 ADO), ce qui peut contribuer à la méconnaissance de la composition exacte d’un plat. L’intitulé peut également différer : le terme blé est utilisé dans certains pays alors qu’en Europe on trouve celui de « céréales contenant du gluten », impliquant donc le blé, l’orge, le seigle, l’avoine, l’épeautre, le kamut et ses souches hybridées.
- Avoir en sa possession une carte indiquant, dans la langue du pays ou en anglais les allergènes à risque (deux sites pour les produire : Eaqual Eats https ://equaleats.com et Select Wisley https ://www.selectwisely.com ).
- Connaitre les numéros d’urgence et l’hôpital le plus proche.
- Certaines chaînes hôtelières ou compagnies de croisières sont plus sensibilisées aux problèmes inhérents aux allergies alimentaires. Se renseigner lors de l’achat des billets et des réservations (l’application « Spokin – Manage Food Allergies » peut être utile pour les repérer).
Voyage en avion
Avant le voyage
- Effectuer sa réservation de vol par téléphone ou en agence plutôt qu’en ligne. Cela permet d’obtenir de nombreux renseignements.
- Au moment de l’achat du billet, signaler son allergie alimentaire à la compagnie aérienne.
- Consulter le médecin pour l’ordonnance rédigée en DCI et vérifier la trousse d’urgence et la date de péremption des médicaments.
- Souscrire une assurance annulation et rapatriement.
À l’aéroport
- Être vigilant lors de l’achat de nourriture dans les zones de pré-embarquement, le duty free (une adolescente est décédée en 2018 après avoir mangé un sandwich qui contenait du sésame non signalé sur l’emballage).
- Informer la compagnie aérienne avant l’enregistrement et l’embarquement.
Dans l’avion
- Demander un embarquement prioritaire avant les autres passagers. Nettoyer (ou si possible faire nettoyer par un accompagnant) la tablette, le rembourrage du siège et les accoudoirs avec une lingette.
- Éviter d’utiliser les couvertures et les oreillers des compagnies aériennes qui peuvent transporter des allergènes alimentaires déposés lors de vols précédents.
- Certaines compagnies mettent à disposition des zones tampons sans allergènes (au moins une rangée devant, derrière le siège et sur les côtés). Il faut en effet se méfier de l’ouverture de sachets de fruits à coque ou d’arachide à proximité d’un allergique pendant le vol (risque de diffusion des allergènes entre 50 cm et 2 m alentour après ouverture d’un sachet de cacahuètes).
- Si possible, commander un repas sans allergènes.
- Avoir en sa possession : une ordonnance avec la conduite à tenir et les médicaments rédigés en DCI, la trousse d’urgence avec les deux stylos auto-injecteurs d’adrénaline, la traduction du risque allergique et de l’allergène responsable dans la langue du pays où l’on se rend ou à défaut en anglais.
- Demander au préalable quels sont les aliments acceptés à bord pour pouvoir les consommer en dehors de tout contact allergénique. Attention : prendre au préalable connaissance de la législation de chaque pays (ils peuvent être retirés à la douane si non autorisés).
- Selon une étude britannique de 2024, les systèmes de ventilation HEPA des avions éviteraient la diffusion des allergènes d’arachide durant le vol, mais attention à la diffusion de proximité (cf. zones tampons).
- L’allergique peut demander qu’une annonce de non-consommation de fruits à coque ou d’arachide pendant le vol soit faite avant le décollage. Toutefois, l’équipage n’a aucune obligation d’accepter cette demande.
- En fonction du pays d’origine de la compagnie aérienne, la liste des ADO dans les menus peut varier.
2. Allergies : quelques sites et applications utiles
- Application Spokin – Manage Food Allergies : permet de personnaliser son profil avec ses allergies alimentaires, rechercher des restaurants susceptibles d’être « allergic friendly » et partager des avis sur des établissement de restauration dans 80 pays ; on y trouve le palmarès des 50 hôtels les mieux côtés dans la gestion des allergènes. Son site internet : https ://www.spokin.com
- Site Eaqual Eats https ://equaleats.com et son application : société produisant des cartes d’allergies en 50 langues en fonction des allergènes à risque (500 allergènes disponibles). La traduction est effectuée en fonction du pays où la personne se rend.
- Site Select Wisley https ://www.selectwisely.com : il propose le même système de cartes pour allergiques.
- Site répertoriant les différentes listes d’ADO à travers le monde : https ://farrp.unl.edu/IRChart .
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