Malgré sa forte incidence, le syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) ne dispose toujours pas de traitement médicamenteux, la ventilation nasale par pression positive continue (PPC) restant le standard. Si la FDA américaine a approuvé le 20 décembre dernier le tirzépatide comme premier traitement médicamenteux du SAHOS, c’est un traitement indirect qui s’adresse uniquement aux patients obèses en agissant sur la maladie par la réduction du poids, alors qu'un grand nombre de patients souffrant de cette maladie ne sont pas obèses.
Développer un médicament spécifique demande de s’attaquer aux principales causes physiologiques de la maladie, à savoir le blocage des voies aériennes supérieures en raison de l’hypotonie pendant le sommeil des muscles dilatateurs du pharynx, notamment le muscle génioglosse, innervé par le nerf hypoglosse. Deux neurotransmetteurs excitateurs de ce nerf jouent un rôle important dans ce processus : la noradrénaline – dont la diminution du niveau pendant le sommeil participe à la baisse de tonus des muscles dilatateurs du pharynx – et l’acétylcholine – qui inhibe le nerf génioglosse.
C’est pourquoi des chercheurs américains ont testé avec succès dès 2018 l’association de deux molécules contre le SAHOS : l’atomoxétine, qui inhibe la recapture de la noradrénaline, et la R-oxybutynine, qui bloque certains récepteurs de l’acétylcholine. Le candidat-médicament en résultant, AD109 (R-oxybutynine 2,5 mg-atomoxétine 75 mg), a déjà montré des résultats positifs lors d’un essai randomisé contrôlé par placebo de phase II sur 4 semaines publié en décembre 2023. À la suite de ces résultats, un essai randomisé de phase III en double aveugle contre placebo, SynAIRgy, avait été lancé. Ce sont les premiers résultats de cet essai qui ont été annoncés dans un communiqué le 19 mai par l’entreprise Apnimed, qui développe AD109.
Dans le communiqué, l’entreprise américaine indique que son candidat-médicament a été évalué contre placebo dans le cadre d’un essai à deux bras de 6 mois. Ce dernier a enrôlé 646 adultes de corpulence moyenne ou élevée dans 73 centres aux États-Unis et au Canada. Ces derniers souffraient de SAHOS (indice d’apnée-hypopnée [IAH] compris entre 10 et 45, soit des SAHOS légers, modérés et sévères), avec moins de 25 % d’apnées centrales ou mixtes, et ne toléraient pas ou refusaient la ventilation par PPC. Les patients ont été randomisés à parts égales entre prise d’un comprimé oral d’AD109 ou de placebo avant le coucher.
L’entreprise annonce qu’AD109 a atteint l’objectif de son critère de jugement principal, à savoir un changement significatif de l’indice IAH à 26 semaines (réduction moyenne de l’indice IAH de 55,6 % dans le bras AD109, p = 0,001). Par ailleurs, les patients du bras AD109 auraient atteint une amélioration significative de l’oxygénation, calculée par la charge hypoxique (p < 0,0001) et l’indice de désaturation en oxygène (p = 0,001). De plus, 51,2 % des patients du bras AD109 auraient pu passer dans une catégorie inférieure de sévérité de la maladie, et 22,3 % étaient considérés comme ayant une maladie sous contrôle (IAH < 5). Les résultats complets de l’étude devraient être dévoilés en congrès à l’automne. Toutefois, une étude sur 6 mois reste encore limitée pour évaluer certains effets secondaires ainsi que les effets à long terme du médicament, par exemple sur les événements cardiovasculaires ou sur les symptômes altérant la qualité de vie, comme la somnolence diurne.
Pour disposer de plus d’informations à ce sujet, un second essai de phase III d’AD109 sur une année entière, LunAIRo, est en cours. Ses premiers résultats devraient être annoncés au troisième trimestre 2025. Sur la base de ces études, Apnimed espère demander une autorisation à la FDA début 2026.