L’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) est une infection chronique caractérisée par une déplétion progressive en lymphocytes T CD4 + pouvant conduire à la survenue d’infections opportunistes définissant le stade sida (syndrome d’immuno­déficience acquise).

Selon Santé publique France, à ce jour, environ 200 000 personnes vivent avec une infection par le VIH en France, et le nombre de personnes ayant découvert leur séropositivité VIH en 2022 est estimé entre 4 200 et 5 700. Ce nombre est de nouveau en aug­mentation depuis la forte diminution observée en 2020 en lien avec l’épidémie de Covid- 19.1 

Il existe trois modes principaux de transmission du VIH  :

  • la transmission par voie sexuelle (sperme, sécrétions vaginales), essentiellement lors des rapports sexuels avec pénétration. Le risque de transmission varie selon le type de rapport sexuel (vaginal, anal, oral) et l’existence de facteurs de risque associés ­(lésion génitale, saignement génital, co-infection sexuellement transmissible, charge virale plasmatique élevée…)  ;
  • la transmission par voie sanguine à la suite du partage de matériel d’injection souillé (usage de drogues intraveineuses) ou d’une blessure professionnelle accidentelle (accident d’exposition au sang). Depuis la mise en place des dépistages systématiques dans les procédures de don du sang ou d’organes, le risque de contamination lors de transfusions ou de transplantations est considéré comme nul en France  ;
 

la transmission de la mère à l’enfant, pendant la grossesse ou l’allaitement.2

Le préservatif, masculin ou féminin, correctement utilisé (systématiquement, dès le début du rapport sexuel, une seule fois, sans rupture ni glissement) est la seule contraception qui assure également une protection contre l’infection par le VIH mais aussi contre les autres infections sexuellement trans­missibles (IST) telles que les hépatites, la syphilis, les infections à Chlamydia, etc.

Choix de la contraception en cas d’infection par le VIH

La grossesse doit être programmée chez les femmes vivant avec le VIH car des adaptations, notamment thérapeutiques, peuvent être nécessaires avant la conception (choix d’un traitement antirétroviral compatible avec la grossesse, réduction du risque de transmission de la mère à l’enfant, réduction du risque de transmission au conjoint, modalités de procréation…). L’utilisation d’une contraception efficace, bien tolérée et adaptée à la situation clinique de chaque femme est donc indispensable afin d’encadrer au mieux un projet de grossesse.3

Des éléments reposant sur les mécanismes physiopathologiques de l’infection par le VIH ou les caractéristiques pharmacologiques des molécules utilisées dans le traitement antirétroviral sont à considérer pour guider le choix de la contraception. En effet, l’immunodépression conduit à une majoration du risque infectieux, de même que la présence de saignements gynécologiques pouvant favoriser la transmission du VIH et des autres IST. Certains antirétroviraux sont associés à la survenue d’un syndrome métabolique (modifications de la répartition des graisses, anomalies du bilan glucido-lipidique…) pouvant augmenter le risque de développer des maladies cardiovas­culaires. Enfin, des interactions médicamenteuses existent, et leur principal risque est la diminution de l’efficacité contraceptive.

Interactions médicamenteuses avec les traitements antirétroviraux

D’une manière générale, il existe deux principaux types d’interactions médicamenteuses  :

  • les interactions pharmacodynamiques, définies par une modification de la réponse pharmacologique ou des effets indésirables de médicaments agissant sur la même cible ou la même fonction physiologique  ;
  • les interactions pharmacocinétiques, définies par l’atteinte d’une ou plusieurs étapes de la pharmacocinétique des médicaments (absorption, distribution, métabolisme, élimination) ayant pour conséquence une variation des concentrations plasmatiques.
 

Les interactions médicamenteuses entre les traitements antirétroviraux et la contraception hormonale sont principalement de nature pharmacocinétique et à risque d’inefficacité contraceptive. En effet, une majorité des molécules antirétrovirales agissent comme inducteurs enzymatiques, c’est-à-dire qu’elles provoquent une augmentation de l’activité des enzymes du métabolisme hépatique et ainsi favorisent le métabolisme des contraceptifs, quelle que soit leur voie d’administration (voie orale, vaginale, transdermique, sous-cutanée). Il s’agit notamment des inhibiteurs de protéase associés au ritonavir, de l’éfavirenz et de la névirapine.4 - 6 

Deux outils d’aide à la prescription, accessibles en ligne, sont particulièrement utiles en pratique clinique : le Thésaurus des interactions médicamenteuses, élaboré par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), et le site internet de l’université de Liverpool comportant une interface facile d’utilisation qui permet de rechercher l’existence d’interactions médicamenteuses entre les traitements antirétroviraux et les différentes méthodes contraceptives.7,8

En pratique

Quelle contraception proposer en cas d’infection par le VIH  ?

Quelques études ont suggéré une augmentation de la charge virale du VIH dans les sécrétions vaginales en cas d’utilisation d’une contraception hormonale œstroprogestative, mais ce risque théorique n’a pas été retenu par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dans ses dernières recommandations et il n’a pas été confirmé dans un essai randomisé s’intéressant aux dispositifs intra-utérins (au cuivre et au lévonorgestrel).9

De plus, une revue systématique récente ne retrouve pas d’augmentation du risque d’infection par le VIH quelle que soit la contraception utilisée.10 

Ainsi, selon l’OMS, toutes les méthodes contraceptives sont autorisées en cas d’infection par le VIH, dans le respect des règles de prescription habituelles.11

Une vigilance particulière est de mise pour les moyens contraceptifs suivants  :

  • la contraception microprogestative par voie orale ­(désogestrel, par exemple) ou sous-cutanée (implant à l’étonogestrel) comporte un risque d’inefficacité du fait d’interactions avec certains antirétroviraux (diminution des concentrations sériques du progestatif) et un risque de spottings et/ou de métrorragies pouvant favoriser la transmission du VIH  ;
  • la contraception œstroprogestative, en raison d’un risque vasculaire augmenté quelle que soit la voie d’administration (orale, patch, anneau vaginal), n’est souvent pas le premier choix contraceptif en cas d’infection par le VIH, ce d’autant qu’il existe également un risque d’interactions médicamenteuses pouvant entraîner une inefficacité contraceptive  ;
  • le DIU (au cuivre ou au lévonorgestrel) impose la réalisation d’un dépistage systématique des autres IST (Chlamydia…) avant sa mise en place.12 En cas de traitement antirétroviral inducteur enzymatique, il s’agit de la contraception à privilégier, si la situation clinique le permet  ;5
  • la contraception progestative injectable par acétate de médroxyprogestérone est peu utilisée en France ; son profil de tolérance (augmentation du risque métabolique) limite son utilisation dans ce contexte.

Adapter la contraception d’urgence

En cas de prise d’un traitement antirétroviral inducteur enzymatique, la contraception d’urgence à privilégier est la mise en place d’un DIU au cuivre dans les cinq jours suivant le rapport sexuel non protégé ou bien la prise d’une double dose de lévonorgestrel (3 mg au lieu de 1,5 mg).13

Cas particulier de la prophylaxie préexposition

La prophylaxie préexposition (PrEP) est proposée aux personnes non infectées par le VIH dans un contexte de forte exposition au VIH. Il s’agit d’un traitement prophylactique associant du ténofovir et de l’emtricitabine dont l’objectif est de diminuer le risque de contami­nation par le VIH. Ces deux molécules ne sont pas pourvoyeuses d’interactions médicamenteuses avec les contraceptifs hormonaux.7,8

Pas de contre-indication particulière liée au VIH

En cas d’infection par le VIH, toutes les contraceptions peuvent être utilisées, sous réserve de la situation clinique de chaque patiente (existence de facteurs de risque associés, interactions médicamenteuses potentielles, profil de tolérance, acceptabilité…).

Références 
1. Dossier thématique VIH/sida : données. Santé publique France. 12 Décembre 2023. https://urls.fr/0BSRK8 
2. Collège des universitaires de maladies infectieuses et tropicales (CMIT). PILLY Etudiant. 2e édition. 2023. Item 169-Infections à VIH. 203-217.
3. Rapport Morlat 2018. Conseil national du sida et des hépatites virales. Prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH. Recommandations du groupe d’experts sous la direction du Pr Philippe Morlat et sous l’égide du CNS et de l’ANRS. Désir d’enfant et grossesse. Mai 2018. https://urls.fr/lWb9GM 
4. Rapport Morlat 2018. Conseil national du sida et des hépatites virales. Prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH. Recommandations du groupe d’experts sous la direction du Pr Philippe Morlat et sous l’égide du CNS et de l’ANRS. Annexe pharmacologique. Mars 2018. https://urls.fr/rIivIF 
5. Bernier M, Jonville-Bera AP. Interactions avec les contraceptifs. RPC Contraception CNGOF. Gynécologie Obstétrique Fertilité & Sénologie 2018;46(12):786‑91.
6. Recommandation de bonne pratique.. Grossesse et VIH : désir d’enfant, soins de la femme enceinte et prévention de la transmission mère-enfant. Haute Autorité de santé. https://urls.fr/PJx8gA 
7. Thésaurus des interactions médicamenteuses de l’ANSM. Septembre 2023. https://urls.fr/GvPzI4 
8. University of Liverpool. Interaction Checkers. https://www.hiv-druginteractions.org/ 
9. Ahmed K, Baeten JM, Beksinska M, et al. HIV incidence among women using intramuscular depot medroxyprogesterone acetate, a copper intrauterine device, or a levonorgestrel implant for contraception: A randomised, multicentre, open-label trial. The Lancet 2019;394(10195):303‑13.
10. Curtis KM, Hannaford PC, Rodriguez MI, et al. Hormonal contraception and HIV acquisition among women: An updated systematic review. BMJ Sex Reprod Health 2020;46(1):8‑16.
11. Contraceptifs appropriés pour les femmes à risque élevé d’infection par le VIH. Manuel d’orientation : recommandations concernant l’utilisation de méthodes contraceptives par les femmes exposées à un risque élevé d’infection par le VIH. Organisation mondiale de la santé  2019. Licence : CC BY-NC-SA 3.0 IGO.
12. Une sélection de recommandations pratiques relatives à l’utilisation de méthodes contraceptives. 3e édition. Organisation mondiale de la santé 2017. Licence : CC BY-NC-SA 3.0 IGO.
13. Lettre aux professionnels de santé. Contraception hormonale d’urgence contenant du lévonorgestrel : nouvelle recommandation pour les utilisatrices de médicaments, ou produits à base de plantes, inducteurs enzymatiques. ANSM. Janvier 2017. https://urls.fr/BcBK_X 

Dans cet article

Ce contenu est exclusivement réservé aux abonnés

Résumé

Si le préservatif est le seul moyen de contraception permettant de se prémunir contre la transmission du virus de l’immunodéficience humaine (VIH) par voie sexuelle, il est courant de l’associer à une autre méthode contraceptive afin de minimiser les risques liés à la survenue d’une grossesse non désirée. Selon les dernières recommandations internationales, toutes les contraceptions sont autorisées en cas d’infection par le VIH et leur prescription doit suivre les précautions d’emploi usuelles (facteurs de risque, interactions médicamenteuses, tolérance…).