L’eczéma allergique de contact est une hypersensibilité retardée à médiation cellulaire. Le tableau clinique prend la forme d’une dermatose vésiculeuse et prurigineuse dont la topographie correspond en général à la zone de contact avec l’allergène. 

Comment devient-on allergique ?

On ne naît pas allergique, on le devient au contact d’un allergène potentiel. 

La physiopathologie de l’eczéma allergique de contact comporte deux phases. 

La première est celle, inapparente, de sensibilisation. Elle peut survenir plusieurs jours à années après le premier contact avec l’allergène. Lors de cette phase, l’allergène doit traverser la peau, puis être pris en charge par les cellules de Langerhans, qui migrent ensuite au contact des ganglions et activent des cellules T « mémoires ».

Lors d’un nouveau contact avec l’allergène, l’eczéma allergique de contact apparaît après un délai de douze à soixante-douze heures environ au site de contact avec l’allergène : c’est la phase de révélation. 

En l’absence de nouveau contact, les cellules T mémoires de l’allergène sont toujours présentes, mais l’eczéma n’est pas actif. En revanche, si les contacts sont répétés, le patient peut développer des poussées d’eczéma aiguës subintrantes, aboutissant à une chronicisation de l’eczéma.

Dans quelles situations évoquer un eczéma allergique de contact ?

Toute dermatose vésiculeuse aiguë localisée doit faire évoquer le diagnostic d’eczéma allergique de contact. 

Évolution clinique en quatre temps

L’eczéma évolue classiquement en quatre phases successives. 

En premier lieu, le prurit et un érythème apparaissent. Puis des vésicules (fig. 1), qui peuvent parfois confluer pour former des bulles, couvrent la zone érythémateuse. Un œdème peut également survenir (fig. 2). Les vésicules se rompent facilement pour laisser place à un suintement qui forme des croûtes. Enfin, si le contact avec l’allergène est interrompu, les lésions d’eczéma disparaissent après quelques jours à la suite d’une desquamation (fig. 3). En cas de contacts répétés, l’eczéma devient chronique (fig. 4). L’eczéma allergique de contact débute le plus souvent sur la zone de contact avec l’allergène mais peut diffuser à distance, voire se généraliser.

Situations à connaître

Selon les zones atteintes et les allergènes incriminés, les tableaux cliniques peuvent être extrêmement variés. Connaître quelques situations peut permettre d’éviter des erreurs diagnostiques.

Un eczéma aigu peut être œdémateux (fig. 2), il faut alors le distinguer d’un angiœdème. La présence de signes épidermiques (vésicules, suintements visibles, ou desquamation lors de la phase de guérison) et la durée prolongée sur plusieurs jours sont des éléments clés pour éliminer un angiœdème. En effet, celui-ci ne comprend pas de signes épidermiques et disparaît en général en moins de quarante-huit heures lorsqu’il s’agit d’une forme histaminique.

Un eczéma œdémateux et inflammatoire (fig. 2) peut parfois être pris pour un érysipèle, voire une cellulite. L’absence de fièvre, le caractère prurigineux et la topographie bilatérale sont des éléments permettant de récuser ces diagnostics.

Un eczéma aigu vésiculeux peut faire évoquer une infection virale de type herpès, varicelle ou zona. Le caractère épars des vésicules dans la varicelle et la disposition métamérique lors du zona ne posent en général pas de réel problème diagnostique.

Face à une suspicion d’eczéma allergique de contact localisé au niveau des pieds, il faut toujours se méfier d’une infection dermatophytique. L’évolution centrifuge des lésions, la bordure circinée et l’absence de guérison sous dermocorticoïde doivent faire suspecter ce diagnostic (fig. 5).

Il peut être difficile de distinguer un eczéma allergique de contact d’une dermatite atopique. La xérose chronique, l’atteinte des zones bastions comme les plis des coudes ou poplités, les antécédents atopiques et l’évolution chronique permettent de poser le diagnostic de dermatite atopique. Cependant, la situation peut être parfois plus complexe, et un patient atteint de dermatite atopique peut développer un eczéma allergique de contact surajouté aux topiques cosmétiques, voire aux dermocorticoïdes, qu’il utilise pour traiter sa peau, par exemple.

L’eczéma chronique des mains est une situation classique en pathologie professionnelle, mêlant souvent dermatite d’irritation et potentiel eczéma allergique de contact (fig. 6). Le travail en milieu dit « humide » de certains métiers et le port prolongé de gants sont souvent propices à son développement.

L’eczéma allergique de contact peut être aéroporté, lorsque l’allergène est en suspension dans l’air et se dépose sur les zones découvertes du visage notamment. Cette situation concerne particulièrement les molécules parfumantes des sprays ou parfums d’ambiance, mais également des biocides comme la méthylisothiazolinone des peintures à l’eau.

Une situation particulière à connaître est l’eczéma allergique de contact manuporté : la zone de réaction, souvent les paupières, le visage et le cou, ne correspond pas à la zone d’application. Cette situation concerne notamment l’eczéma allergique de contact au vernis à ongles.

Pour se développer, l’eczéma photoallergique de contact nécessite la présence à la fois d’une irradiation solaire et du contact avec l’allergène. Le caractère photodistribué des lésions d’eczéma (visage, cou, dos des mains, face externe des avant-bras) fait évoquer le diagnostic. Il est bien sûr à distinguer d’une phototoxicité qui prend plutôt l’aspect d’une brûlure ou d’un « coup de soleil », strictement localisé aux zones de contact avec la substance phototoxique. Dans ce cas, il n’y a pas de lésion d’eczéma.

L’eczéma allergique de contact par procuration correspond à la situation où la personne qui a l’eczéma allergique de contact n’est pas celle qui utilise le produit incriminé, conduisant souvent à un retard diagnostique. Par exemple, un eczéma allergique de contact au niveau du visage ou du tronc peut être dû à la coloration capillaire du conjoint.

Comment poser le diagnostic d’eczéma allergique de contact ?

Le diagnostic est clinique et anamnestique : l’interrogatoire retrouve, dans les jours précédant l’apparition de l’eczéma, un contact avec un allergène potentiel sur la zone de réaction. Il est d’ailleurs important face à un eczéma allergique de contact étendu de faire préciser au patient la zone corporelle au niveau de laquelle les lésions ont débuté. 

La confirmation diagnostique passe par la réalisation de patch tests par un allergologue ou un dermato-allergologue. Le principe de ces tests est de reproduire un eczéma de contact localement après application d’allergènes commerciaux ou de produits suspects (cosmétiques, par exemple) sur le haut du dos. La cotation de la lecture des tests est standardisée en croix pour les tests positifs :

+ = érythème et œdème ;

++ = érythème œdème et présence de vésicules ;

+++ = présence de bulles.

 

L’évaluation de la pertinence des résultats est une étape importante. En pratique, trois rendez-vous généralement espacés de quarante-huit heures sont nécessaires à la réalisation de ces tests. La batterie standard européenne comporte 30 allergènes et constitue un bon screening diagnostique, mais de nouveaux allergènes sont en permanence identifiés. Il est donc indispensable de tester les produits suspects des patients qui sont parfois les seuls tests positifs. Il est important de conseiller aux patients chez qui l’on suspecte un eczéma allergique de contact de conserver les produits suspects afin de pouvoir les tester ultérieurement. 

Quels sont les allergènes potentiels ?

La liste des allergènes potentiels est longue et, aux allergènes classiques contenus dans la batterie standard, s’ajoutent en permanence de nouveaux allergènes. Ces derniers peuvent être des ingrédients de produits cosmétiques même « naturels », des huiles essentielles, être contenus dans des accessoires de sport (protège tibias, baskets…), des dispositifs médicaux (capteurs de glycémie ou pompe à insuline, produits collants…), des accessoires divers (cigarettes électroniques, casque audio, écouteurs, montres, lunettes…), des topiques médicamenteux (dermocorticoïdes ou collyres, par exemple)…

Comment traiter un eczéma allergique de contact ?

Le traitement repose sur les dermocorticoïdes dont la force et la galénique sont à adapter à l’âge du patient et à la zone à traiter. Une application par jour, le soir, jusqu’à disparition des manifestations, permet en général la guérison en quelques jours lorsque le contact avec l’allergène est stoppé.

Le seul moyen d’assurer la guérison définitive et sans rechute de l’eczéma allergique de contact est d’identifier l’allergène responsable et de mettre en place une éviction.

À ce jour, il n’existe pas de possibilité de désensibilisation d’un allergène responsable d’un eczéma allergique de contact. Cette allergie est définitive, et seule l’éviction des contacts avec l’allergène peut permettre la guérison. En cas de nouveau contact, le délai d’apparition de l’eczéma peut se raccourcir mais n’est jamais immédiat et ne peut pas induire un choc anaphylactique. 

Encadre

Que dire à vos patients ? 

  • Cette allergie est définitive, seule l’éviction permet d’éviter la rechute.
  • Il faut conserver les produits suspects pour pouvoir les tester.
  • L’exploration allergologique repose sur des patch tests ; trois rendez-vous à deux jours d’intervalle sont nécessaires.

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essentiel

L’eczéma allergique de contact est une hypersensibilité retardée nécessitant une sensibilisation préalable.

Le contact avec l’allergène potentiel est à rechercher dans les jours précédant l’apparition.

Il peut être vésiculeux, bulleux, œdémateux ou chronique.

Seule l’éviction du contact avec l’allergène, une fois identifié, permet la guérison sans rechute.