Les médicaments contenant du finastéride sont utilisés dans le traitement de l’alopécie androgénétique et de l’hypertrophie bénigne de la prostate. Ils exposent à des risques de troubles psychiatriques, ainsi qu’à des troubles de la fonction sexuelle.
Face aux signalements persistants d’effets indésirables (EI) graves, l’ANSM a saisi en 2024 l’Agence européenne des médicaments (EMA) afin que soit réévaluée la balance bénéfices/risques des médicaments contenant du finastéride ou du dutastéride (molécule similaire).
EMA : renforcer l’information
À l’issue de cette réévaluation, le Comité pour l’évaluation des risques en matière de pharmacovigilance (PRAC) de l’EMA a confirmé que le finastéride administré par voie orale (1 mg et 5 mg) était bien associé à un risque d’idées suicidaires et a recommandé son ajout dans la rubrique EI pour tous les médicaments en contenant. Il a néanmoins considéré que le rapport bénéfices/risques restait favorable, sous réserve du renforcement de l’information des patients et soignants.
Ainsi, les laboratoires devront procéder à :
- Modifier les RCP et les notices des médicaments ;
- Ajouter une carte patient dans chaque boîte de finastéride 1 mg ;
- Envoyer une lettre d’information aux professionnels de santé en septembre 2025.
L’ANSM va plus loin
L’ANSM a demandé au centre régional de pharmacovigilance (CRVP) de Limoges une expertise de pharmacovigilance sur les troubles psychiatriques (dépression, idées suicidaires, suicide…) isolés ou associés à des troubles sexuels, en lien avec le finastéride dans le traitement de l’alopécie androgénétique. Résultat : 110 cas de troubles psychiatriques ont été répertoriés entre janvier 1985 et mai 2024. La majorité de ces patients étaient jeunes (âge médian 30 ans) et ils avaient été traités par finastéride pendant près de 6 ans en moyenne. Les deux tiers de ces cas étaient graves, dont 1 décès par suicide et 4 tentatives de suicide. Pour la moitié de ces patients (56 cas), les troubles psychiatriques ou sexuels n’étaient pas résolus malgré l’arrêt du traitement.
Selon l’ANSM, « le rapport bénéfices/risques du finastéride 1 mg dans l’alopécie androgénétique est défavorable et les mesures prévues au niveau européen ne suffisent pas à réduire efficacement le risque d’idées suicidaires ».
Recos pour les médecins
Concernant le finastéride 1 mg indiqué dans l’alopécie androgénétique :
- Surveillez les modifications de l’humeur ou l’apparition de troubles sexuels chez votre patient traité par finastéride ;
- Si ce dernier a des changements de l’humeur, une humeur dépressive, une dépression ou des idées suicidaires, interrompez le traitement ;
- Si votre patient évoque l’apparition de troubles de la fonction sexuelle ou de tout autre effet indésirable, évaluez l’opportunité de poursuivre ou d’arrêter ce traitement ;
- Réévaluez systématiquement la pertinence de la poursuite du traitement lors de chaque consultation de suivi et vérifiez qu’il est bien toléré.
Que dire aux patients ?
- En cas de modification de votre humeur (humeur dépressive, dépression ou pensées suicidaires), arrêtez vous-même votre traitement et consultez votre médecin ;
- En cas d’apparition de troubles de la fonction sexuelle (troubles de l’érection, de l’éjaculation, diminution de la libido) ou de tout autre effet indésirable, signalez-le rapidement à votre médecin. Chez certains patients, ces perturbations peuvent contribuer à des changements de l’humeur, y compris des pensées suicidaires ;
- En cas de traitement prolongé par finastéride, une réévaluation de sa pertinence doit être régulièrement réalisée.
Pour en savoir plus
Martin Agudelo L. Finastéride et dutastéride : réévaluation de leur balance bénéfices/risques. Rev Prat (en ligne) 22 octobre 2024.