Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge.
Généralités (rang A)
L’hémorragie méningée ou hémorragie sous-arachnoïdienne (HSA) non traumatique désigne une irruption de sang d’origine artérielle dans les espaces sous-arachnoïdiens péricérébraux où cheminent les artères. C’est une forme rare d’accident vasculaire cérébral (AVC), avec une incidence globale estimée à 6 pour 100 000 personnes-année. Il existe d’importantes variations géographiques d’incidence, avec des taux notablement plus élevés en Finlande et au Japon.
85 % des HSA survenues en dehors de tout traumatisme sont secondaires à la rupture d’un anévrisme développé aux dépens de l’une des artères piales intracrâniennes et 5 % sont secondaires à d’autres types d’anomalies vasculaires (dissection artérielle, malformation ou fistule artérioveineuse, angéite cérébrale, thrombose veineuse cérébrale). Dans 10 % des cas, aucune cause n’est retrouvée ; on parle alors d’HSA idiopathique.
Un anévrisme est caractérisé par la perte de parallélisme de la paroi artérielle du fait d’une détérioration structurale localisée (perte de la limitante élastique interne et rupture de la média). Un anévrisme peut être sacciforme ou fusiforme.
Facteurs de risque (rang B)
Les facteurs de risque d’HSA sont identiques à ceux de la formation et de la croissance des anévrismes intracrâniens : hypertension artérielle, tabagisme actif, hypercholestérolémie. De plus, l’HSA peut être favorisée par l’intoxication alcoolique aiguë et l’utilisation de substances sympathomimétiques (cocaïne). Il existe une prédominance féminine (sex ratio à 1,3) et une prédisposition familiale. En effet, entre 5 et 20 % des patients atteints d’HSA par rupture d’anévrisme ont un antécédent familial. Cependant, on ne parle de « forme familiale » d’anévrisme que lorsque deux parents au premier degré ont présenté une HSA par rupture d’anévrisme ou sont porteurs d’un anévrisme intracrânien. C’est uniquement dans ce cadre qu’un dépistage familial d’anévrisme est recommandé. Plusieurs pathologies à transmission génétique peuvent être associées à un taux d’anévrisme plus élevé que dans la population générale et donc à risque plus important de survenue d’une hémorragie méningée. La plus fréquente est la polykystose rénale autosomique dominante, pour laquelle un dépistage systématique d’anévrisme intracrânien par imagerie par résonance magnétique (IRM) est recommandé.
D’autres maladies rares sont responsables d’une augmentation du risque d’hémorragie méningée (affections héréditaires du tissu conjonctif, maladie d’Ehlers-Danlos vasculaire, neurofibromatose de type 1).
Pronostic
Le pronostic des hémorragies méningées reste très sévère, avec une mortalité de 22 à 26 % en préhospitalier et de 20 % dans les vingt-quatre premières heures. La mortalité globale est proche de 50 %. Près de la moitié des survivants gardent des séquelles sévères, et seulement un tiers des patients retrouvent une qualité de vie identique, dix-huit mois après l’HSA.
Diagnostic
Anamnèse et examen clinique
Un haut degré de suspicion doit prévaloir pour toute céphalée brutale, ou tout tableau neurologique incluant des céphalées.
La céphalée est l’élément central de l’anamnèse. Elle est brutale, « en coup de tonnerre », maximale en quelques secondes à une minute. Le patient est capable de préciser le moment exact du début de la céphalée. Typiquement, outre son caractère inhabituel rapporté par le patient, elle est très intense, « la pire douleur de ma vie », holocrânienne, continue et résistante aux antalgiques de palier 1. Des épisodes antérieurs de céphalée brutale, résolutifs spontanément, les semaines précédentes peuvent être retrouvés à l’anamnèse (céphalées sentinelles). Il n’y a pas de fièvre.
Des nausées, avec ou sans vomissements, s’associent à cette céphalée dans 70 % des cas. Les différents éléments du syndrome méningé (raideur de nuque, sono- et photophobies, signes de Kernig et Brudzinski) peuvent faire défaut à la phase initiale mais doivent être recherchés. Des troubles de conscience jusqu’au coma peuvent être présents d’emblée. Des convulsions accompagnent la céphalée initiale dans environ 10 % des cas.
Certains signes neurologiques ont une valeur localisatrice. Une atteinte du nerf moteur oculaire commun (III) évoque, par exemple, la rupture d’un anévrisme développé au niveau de la paroi postérieure de l’artère carotide interne supraclinoïdienne ipsilatérale. L’atteinte de la sixième paire crânienne n’a pas de valeur localisatrice et résulte de l’hypertension intracrânienne.
Ainsi, tout syndrome méningé brutal et non fébrile est une HSA jusqu’à preuve du contraire et nécessite un bilan diagnostique en urgence.
Évaluation de la gravité clinique initiale
Plusieurs échelles cliniques permettent d’évaluer la gravité initiale d’un patient présentant une HSA. L’échelle de la World Federation of Neurological Societies (WFNS) [tableau] est la plus consensuelle. Elle associe le score de Glasgow (degré de vigilance et signes de souffrance axiale) à la présence d’un déficit moteur.
Les patients ayant d’emblée un score de Glasgow inférieur ou égal à 12 (grades 4 et 5 de l’échelle WFNS) ont un pronostic péjoratif.
Bilan paraclinique étiologique (rang B)
Couple scanner-angioscanner cérébral
Tout patient suspect d’HSA non traumatique doit bénéficier d’un scanner cérébral sans injection en urgence. Le scanner a une très bonne sensibilité (proche de 95 % dans les 24 premières heures) pour le diagnostic positif d’HSA, visualisée sous la forme d’une hyperdensité spontanée des espaces sous-arachnoïdiens (sillons corticaux, citernes de la base, vallées sylviennes et/ou scissure interhémisphérique [voir Focus]).
L’abondance de l’HSA, quantifiée par l’échelle de Fisher (tableau), est un facteur de risque indépendant de vasospasme et d’ischémie cérébrale retardée au cours de l’évolution et reflète donc directement la gravité.
Le scanner permet également de dépister les complications précoces, parmi lesquelles l’hydrocéphalie aiguë, les hématomes parenchymateux associés, l’œdème cérébral et les signes d’engagement. La présence d’un hématome a une valeur localisatrice et peut aider à identifier l’anévrisme rompu en cas d’anévrismes multiples.
Il faut noter que la sensibilité du scanner cérébral pour la mise en évidence d’une HSA diminue en cas de saignement de faible abondance et au-delà de trois jours après l’hémorragie.
L’angioscanner cérébral a une sensibilité d’environ 95 % pour la détection des anévrismes artériels (voir Focus). Une attention particulière doit être portée à l’analyse des sites fréquents d’anévrisme dits « de bifurcation ». L’angioscanner peut être faussement négatif en cas d’anévrisme sacciforme de taille inférieure à 3 mm, d’anévrisme disséquant de type « blister » (phlyctène développée sur une artère disséquée, sans vrai sac) ou encore en cas de vasospasme masquant l’anévrisme.
Place de l’IRM
L’IRM présente de très bonnes performances diagnostiques dans cette situation, mais les nécessités de surveillance rapprochée d’un patient atteint d’HSA grave font souvent privilégier le scanner, examen moins long et plus rapidement disponible.
La séquence FLAIR a une sensibilité supérieure au scanner cérébral sans injection pour le diagnostic d’HSA. L’hémorragie est visible sous la forme d’un hypersignal au sein des espaces sous-arachnoïdiens (voir Focus). Cet hypersignal est peu spécifique et se retrouve dans d’autres situations pathologiques (méningite infectieuse, carcinomateuse) ou iatrogènes (oxygénothérapie à haut débit sur ventilation mécanique, injection préalable de gadolinium, artéfacts métalliques). Le contexte clinique et les autres constatations d’imagerie, comme la localisation cisternale des hypersignaux, permettent d’exclure ces diagnostics différentiels.
Après une semaine d'évolution, l’hypersignal FLAIR diminue et les produits de dégradation de l’hémoglobine apparaissent en hyposignal en séquence T2*. Une séquence FLAIR peut être positive jusqu’à deux semaines après l’HSA, le T2* jusqu’à un mois.
L’angio-IRM du polygone de Willis, réalisée au cours du même examen, peut mettre en évidence un anévrisme (voir Focus), mais sa sensibilité reste faible pour la détection des anévrismes dont la taille est inférieure à 3 mm, en conditions cliniques. En outre, elle demande, comme toute séquence d’IRM, une immobilité et une collaboration qui ne sont pas toujours possibles de la part d’un patient à la phase aiguë d’une HSA.
Place de l’artériographie
L’angiographie cérébrale numérisée 3D reste l’examen de référence dans l’évaluation des artères intracrâniennes, et tout particulièrement pour la recherche d’anévrismes intracrâniens. Cependant, les performances de l’angioscanner et de l’angio-IRM ont progressivement remplacé l’artériographie à visée diagnostique. L’artériographie des quatre axes à destinée encéphalique (deux artères carotides, deux artères vertébrales) reste indiquée en cas d’HSA, à visée diagnostique lorsque les examens non invasifs sont négatifs et dans le cadre du bilan pré-interventionnel/opératoire ou pour guider la décision thérapeutique dans les cas complexes, en cas d’observation d’un ou de plusieurs anévrismes sur le bilan initial.
Place de la ponction lombaire (rang A)
La ponction lombaire (PL) n’est indiquée que si la symptomatologie clinique est évocatrice d’HSA et si l’imagerie cérébrale est normale. La PL n’est pas une urgence absolue en cas de suspicion d’HSA ; en effet, il est préférable d’attendre un délai de six à douze heures après l’hémorragie pour la réaliser car il faut un temps suffisant pour obtenir la lyse des globules rouges et la formation de bilirubine et d’oxyhémoglobine, permettant de montrer le caractère xanthochromique du liquide cérébrospinal (LCS) surnageant après centrifugation (et d’exclure une hémorragie liée au traumatisme de la ponction lombaire). Le rapport leucocytes/globules rouges est différent du rapport sanguin.
Au total, la PL avec recherche de surnageant xanthochromique garde une place dans le diagnostic d’HSA lorsque la symptomatologie est évocatrice et le scanner normal.
Hémorragies méningées non anévrismales (rang B)
HSA non anévrismales avec anomalies artérielles
Cinq pour cent des hémorragies méningées non traumatiques ne sont pas liées à une rupture anévrismale. Ainsi, la dissection d’une artère intracrânienne, un anévrisme infectieux, mycotique (par exemple, secondaire à une endocardite infectieuse), une angéite cérébrale, une malformation vasculaire (fistule, malformation artérioveineuse…), certaines angiopathies primitives ou secondaires (syndrome de vasoconstriction cérébrale réversible) peuvent être responsables d’HSA. Le bilan initial est identique.
HSA traumatiques
La présence d’une HSA chez un patient traumatisé crânien est banale (près de 50 % des traumatismes modérés à sévères) et n’expose pas aux risques de l’HSA non traumatique par rupture d’une malformation. Il est cependant capital d’écarter l’hypothèse d’un traumatisme crânien par perte de connaissance secondaire à une HSA. La présence de lésions traumatiques parenchymateuses ou osseuses adjacentes (contusions cérébrales, fracture de la voûte…), l’aspect en scanner (HSA superficielle focale, sans atteinte des citernes, en cas de traumatisme) et, avant tout, une anamnèse parfaitement claire doivent être recherchés afin de confirmer la nature traumatique de l’hémorragie méningée. Au moindre doute, il faut réaliser une imagerie vasculaire à visée étiologique.
Hémorragies périmésencéphaliques
Certaines hémorragies méningées non anévrismales ont une topographie purement périmésencéphalique, c’est-à-dire que l’hyperdensité au scanner occupe les citernes autour des pédoncules cérébraux (mésencéphale) et autour du pont, avec peu ou pas d’atteinte des autres citernes. Ces HSA ont un meilleur pronostic (risques moindres de resaignement, d’hydrocéphalie et d’ischémie cérébrale retardée) et aucune anomalie vasculaire n’est habituellement retrouvée. Il s’agit d’un diagnostic d’élimination. Le bilan et la prise en charge initiale sont identiques ; le bilan doit inclure une artériographie cérébrale complète. Les récidives hémorragiques sont exceptionnelles.
Prise en charge thérapeutique (rang B)
Mise en condition
Tout patient suspect d’HSA doit être transféré en urgence dans un centre disposant de services de neurochirurgie, de réanimation neurologique et de neuroradiologie interventionnelle ; il doit être admis en milieu réanimatoire spécialisé minimisant les stimulations neurosensorielles et visuelles.
Hypertension intracrânienne et hydrocéphalie aiguë
Pour les grades élevés, il existe de façon quasiment constante une hypertension intracrânienne (HTIC) qui résulte de plusieurs mécanismes qui doivent être explorés et traités.
Un hématome cérébral peut être associé à une HSA dans 20 à 34 % des cas, secondaire dans 50 % des cas à un resaignement. En imagerie, il est le plus souvent au second plan par rapport à l’HSA (petit hématome, grande HSA), lorsque la lésion vasculaire en cause est un anévrisme. Un hématome de grande taille, isolé, à proximité notamment de la bifurcation sylvienne, est toutefois possible. La présence d’un hématome a une valeur localisatrice, particulièrement utile en cas d’anévrismes intracrâniens multiples. En cas d’engagement cérébral secondaire à la taille de l’hématome, et une fois le bilan d’imagerie complété, rien ne doit retarder l’évacuation chirurgicale de l’hématome qui doit être complétée par l’exclusion de l’anévrisme par un microclip dans le même temps opératoire ou, plus rarement et si la situation clinique le permet, par voie endovasculaire (coiling de l’anévrisme).
Outre l’hématome intraparenchymateux, un hématome sous-dural peut être secondaire à la rupture d’un anévrisme intracrânien, particulièrement lorsque l’anévrisme est localisé à la naissance de l’artère communicante postérieure ou de l’artère péricalleuse.
L’hydrocéphalie aiguë, dont l’incidence est estimée entre 12 et 31 %, est due soit à une obstruction du système ventriculaire par l’hémorragie ventriculaire, soit à un trouble aigu de la résorption par feutrage des granulations arachnoïdiennes. Les facteurs prédictifs d’une hydrocéphalie à la phase aiguë d’une HSA sont l’âge, l’hémorragie intraventriculaire (notamment du V4), l’importance de l’HSA et la localisation de l’anévrisme sur la circulation postérieure. Lorsque l’hydrocéphalie est symptomatique et/ou évolutive, son traitement repose sur le drainage ventriculaire par voie externe (DVE). En cas d’hydrocéphalie, si un geste endovasculaire est envisagé, le DVE doit idéalement être posé avant l’embolisation car l’héparinothérapie nécessaire au geste d’embolisation peut gêner la pose ultérieure d’un DVE. Le sevrage en est habituellement fait dans les dix jours qui suivent. L’implantation d’un système de dérivation ventriculaire définitif (par dérivation ventriculo-péritonéale ou ventriculo-atriale) n’est nécessaire que chez 15 % des patients.
Un œdème cérébral est très fréquent dans les heures qui suivent le début des symptômes. Il nécessite la mise en place d’un monitorage de la pression intracrânienne (PIC), idéalement par un cathéter dédié.
Traitement de l’anévrisme
Le resaignement précoce d’un anévrisme rompu non traité est assorti d’une mortalité élevée à court terme (70 %) et d’une morbidité importante à long terme.
Le risque de resaignement est majoré lorsque l’anévrisme est de grande taille, lorsque la pression artérielle est élevée, lorsque la PIC diminue brutalement (drainage trop rapide d’une hydrocéphalie). Un anévrisme rompu non exclu est, de plus, un frein à l’optimisation des mesures de maintien de la pression de perfusion cérébrale (PPC) qui nécessitent une élévation de la pression artérielle moyenne ou le respect d’une élévation spontanée de celle-ci.
L’unique moyen de prévenir une récidive hémorragique est l’exclusion complète du sac, qui peut être réalisée par voie endovasculaire ou microchirurgicale.
Le traitement endovasculaire est la technique de prise en charge de première intention pour la plupart des anévrismes rompus. Il consiste en une exclusion sélective du sac par des spires de platine (« coils ») à largage contrôlé (voir Focus). Il persiste des indications de traitement microchirugical de l’anévrisme. Le choix de la procédure la plus appropriée pour chaque patient nécessite une discussion pluridisciplinaire spécialisée, tenant compte de l’état physiologique du patient, de la topographie et morphologie du sac, des rapports de voisinage avec les artères perforantes et de la présence d’un hématome associé.
Le traitement chirurgical consiste à réaliser un volet pour aborder les vaisseaux du polygone de Willis, qui sont suivis jusqu’à l’anévrisme dont le collet est disséqué et libéré. La mise en place d’un clip sur le collet de l’anévrisme permet son exclusion complète.
Vasospasme cérébral et ischémie cérébrale retardée
Le vasospasme est la principale complication retardée de l’HSA, responsable de complications neurologiques graves et d’une mortalité importante après la phase initiale.
Le vasospasme s’installe le plus souvent à J4 de l’HSA avec un pic d’intensité vers J7 et cède habituellement après deux semaines. Il est défini comme une réduction segmentaire, prolongée et initialement réversible de la lumière d’une artère proche ou à distance de l’anévrisme rompu. Il survient chez près de 50 % des patients, mais n’est symptomatique de façon transitoire ou permanente que chez 10 % d’entre eux. Une recrudescence des céphalées, une fièvre, une hypertension artérielle, une hyperleucocytose et/ou une hyponatrémie peuvent l’accompagner mais en sont parfois les seuls signes. Un vasospasme sévère, étendu ou de longue durée, peut évoluer vers l’infarctus cérébral. Le risque de survenue d’un vasospasme après une HSA est lié à l’abondance de celle-ci à la phase aiguë (échelle de Fisher). Son incidence est également plus élevée chez les jeunes, les femmes, chez les sujets tabagiques actifs, chez les patients d’emblée grave (WFNS > 2, score de Glasgow < 14) ou présentant une accélération précoce des vitesses circulatoires cérébrales enregistrées en doppler transcrânien (DTC).
L’ischémie cérébrale retardée se manifeste par des troubles de la conscience, des céphalées croissantes et/ou un déficit neurologique focal, conséquence du vasospasme artériel entraînant une hypoperfusion cérébrale dans les territoires concernés.
Diagnostic du vasospasme
La première étape de diagnostic du vasospasme consiste à éliminer d’autres causes d’aggravation neurologique secondaire : hydrocéphalie, resaignement, crises d’épilepsie infracliniques, troubles hydroélectrolytiques, par la réalisation systématique d’un scanner cérébral, d’un électroencéphalogramme (EEG) et d’un bilan biologique.
Le doppler transcrânien est utilisé pour monitorer quotidiennement, au lit du patient, les vitesses circulatoires cérébrales qui s’élèvent en cas de vasospasme. Le cas échéant, l’angiographie cérébrale numérisée, l’angioscanner ou l’angio-IRM permettent de confirmer le vasospasme en démontrant le rétrécissement segmentaire des artères intracrâniennes, maximal à proximité de l’anévrisme rompu. Le choix de la modalité d’imagerie varie selon les centres. La réalisation d’une artériographie a l’avantage de pouvoir être associée à un traitement mécanique ou chimique par voie artérielle.
Le vasospasme angiographique n’est pas nécessairement corrélé à l’intensité des symptômes neurologiques et n’est pas synonyme d’ischémie cérébrale secondaire. En ce sens, l’imagerie de perfusion (IRM ou scanner) peut aider pour évaluer la qualité de la perfusion cérébrale et rechercher une ischémie secondaire, notamment chez les patients intubés ou dont l’évaluation neurologique est difficile.
Traitement du vasospasme et de l’ischémie cérébrale retardée
Nimodipine dès la phase aiguë
Le traitement préventif du vasospasme repose sur l’administration systématique et précoce, par voie intraveineuse, de nimodipine, inhibiteur calcique aux propriétés vasodilatatrices, dès la phase aiguë.
Mesures tensionnelles
Ce traitement est associé à des mesures permettant de maintenir une pression de perfusion cérébrale adaptée (> 70 mmHg) après exclusion de l’anévrisme et en l’absence de contre-indication (insuffisance cardiaque, œdème aigu pulmonaire…). Ces mesures incluent le maintien d’une pression artérielle moyenne dans les limites élevées de la normale (ou le respect d’une hypertension spontanée modérée, pression artérielle moyenne > 100 mmHg) et le maintien d’une euvolémie stricte. Les médicaments vasoactifs utilisés doivent être titrables pour permettre une optimisation des paramètres de perfusion cérébrale.
En cas d’échec de ces mesures, un traitement endovasculaire doit être envisagé. Il consiste en une injection intra-artérielle in situ d’un vasodilatateur (nimodipine, milrinone…). Une angioplastie mécanique peut y être associée en réalisant une dilatation endovasculaire des segments artériels sténosés, à l’aide d’un ballonnet (voir Focus).
Mesures associées
Monitorage cardiotensionnel continu
Les spécificités de la prévention et du traitement du vasospasme impliquent un monitorage invasif continu de la pression artérielle, permettant un suivi constant et précis des conditions hémodynamiques.
Prise en charge de la douleur
La douleur est liée à l’irritation méningée dûe à l'HSA. Une antalgie doit être initiée dès l’admission. Un titrage morphinique est souvent nécessaire.
Troubles hydro-électrolytiques et glycémie
Différents mécanismes secondaires à l’agression cérébrale peuvent être responsables d’une hyponatrémie (syndrome de perte en sel, syndrome de sécrétion inappropriée d'hormone antidiurétique [SIADH] plus rarement…) ou d’une hypernatrémie (diabète insipide). La présence d’une hyperglycémie à l’admission doit être recherchée et corrigée.
Une surveillance hydro-électrique et glycémique stricte doit être mise en place et prolongée jusqu’à la sortie de neuroréanimation pour permettre une correction rapide de toute anomalie.
De façon plus générale, il est capital de monitorer et corriger les potentielles agressions cérébrales secondaires d’origine systémique (ACSOS).
Dépistage et prise en charge des complications cardiorespiratoires
Les complications cardiaques sont fréquentes, liées initialement à l’intense stimulation sympathique et à la décharge noradrénergique qui accompagnent la rupture anévrismale puis à la nécessité de maintenir la pression de perfusion cérébrale au prix d’une pression artérielle élevée. Un électrocardiogramme est réalisé pour rechercher des troubles de repolarisation (fréquents à la phase aiguë). Une surveillance de la pression veineuse centrale par cathétérisme droit et du débit cardiaque (échocardiographie transthoracique [ETT], échocardiographie transœsophagienne [ETO]) peut être nécessaire.
Les complications respiratoires sont le plus souvent d’origine infectieuse et secondaires à une inhalation initiale ou à la ventilation mécanique. Un œdème pulmonaire neurogénique peut également survenir précocement. Il s’agit d’une complication grave pouvant évoluer vers un syndrome de détresse respiratoire aigu qui, en l’absence de complication, se résout spontanément en moins de trois jours.
Autres mesures thérapeutiques
La maladie thromboembolique est systématiquement prévenue par une contention mécanique des membres inférieurs associée à une héparinothérapie à doses préventives. Aucun traitement antiépileptique n’est recommandé de manière systématique ; son introduction est évaluée au cas par cas.
La survenue d’une hémorragie intraoculaire (syndrome de Terson) dans le cadre d’une HSA, volontiers sévère, peut entraîner des troubles visuels à court et long termes. Il n’existe pas de traitement spécifique en dehors de la vitrectomie en l’absence d’amélioration.
Il peut s’y associer une hémorragie rétinienne ou prérétinienne au pronostic visuel péjoratif.
Conclusion
L’HSA non traumatique est un accident vasculaire cérébral rare mais grave. Il s’agit d’une urgence médicale, nécessitant une prise en charge multidisciplinaire complexe et un dialogue constant entre les différents spécialistes impliqués. Le traitement d’une HSA anévrismale est séquentiel, combinant une exclusion précoce de l’anévrisme rompu, le traitement des causes d’hypertension intracrânienne (hydrocéphalie, hématome associé, resaignement anévrismal…) et l’instauration de mesures préventives du vasospasme cérébral et de l’ischémie cérébrale retardée secondaire consistant en l’administration d’inhibiteurs calciques et le maintien d’une pression de perfusion cérébrale adaptée. La prise en charge d’un patient souffrant d’une hémorragie méningée nécessite une surveillance continue des paramètres vitaux et biologiques en secteur réanimatoire.
• Toute céphalée brutale ou symptômes neurologiques associés à des céphalées aiguës est une hémorragie méningée jusqu’à preuve du contraire et doit faire réaliser un scanner cérébral en urgence.
• Le patient doit être placé en secteur neuroréanimatoire dans un hôpital disposant d’un plateau technique complet, d’un service de neurochirurgie et de neuroradiologie interventionnelle, quel que soit son état clinique initial.
• La première étape du traitement est de traiter l’anévrisme pour éviter un resaignement, dont le pronostic est catastrophique. Le traitement est réalisé par embolisation, dans la plupart des cas.
• La prévention du vasospasme cérébral associe l’administration de nimodipine dès la phase aiguë et la mise en place de mesures de maintien de la pression de perfusion cérébrale après traitement de l’anévrisme.
• Une surveillance continue et un dépistage précoce des complications (hypertension intracrânienne, complications cardiovasculaires et prévention des agressions cérébrales d’origine systémique) est indispensable.
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