Intestin irritable : une revue systématique fait le point sur l’efficacité des thérapies comportementales

Le syndrome de l’intestin irritable (SII) est un trouble fonctionnel digestif qui touche environ 4,2 % de la population en France. Source d’une dégradation importante de la qualité de vie, comparable à celle vécue par les survivants d’AVC ou les patients souffrant d’insuffisance cardiaque, le SII se caractérise par des douleurs abdominales récurrentes (≥ 1 jour par semaine en moyenne dans les 3 derniers mois) associées à la défécation ou à un changement de fréquence/consistance des selles. En raison d’une physiopathologie mal comprise, le SII reste difficile à prendre en charge ; il dispose de traitements médicamenteux symptomatiques, mais pas de traitement spécifique.

Dans ce cadre, des guidelines européennes (de 2022) et américaines (de 2021) recommandent l’utilisation de psychothérapies, en particulier celles dirigées sur l’intestin, comme traitement alternatif. Après une première revue systématique avec méta-analyse destinée à estimer l’efficacité de ces techniques dans le SII, parue en 2020, une équipe internationale de chercheurs a mis à jour ses travaux dans une nouvelle revue systématique avec méta-analyse sur le même sujet, publiée le 9 octobre 2025 dans le Lancet Gastroenterology & Hepatology.

Pour effectuer cette méta-analyse, les scientifiques ont recherché tous les essais randomisés contrôlés comparant l’efficacité de thérapies comportementales entre elles ou face à une intervention contrôle dans le SII, et publiés dans la littérature scientifique anglophone. Pour ce faire, ils ont scanné les publications mises en ligne jusqu’au 23 avril 2025 sur les bases de données Medline, Embase, Embase Classic, PsycInfo et Central. L’efficacité des thérapies testées a été quantifiée dans une méta-analyse calculant leur risque relatif (RR) de ne pas améliorer les symptômes du SII au premier suivi post-thérapie par rapport à l’intervention contrôle. Ainsi, une estimation de RR < 1 dont l’intervalle de confiance à 95 % ne contient pas 1 est synonyme de bénéfice significatif de l’intervention testée.

En tout, les chercheurs ont inclus 67 essais randomisés comprenant 7 441 participants, dont 5 002 (67 %) ont reçu une thérapie comportementale et 2 439 (33 %) une intervention contrôle. Par rapport à la précédente méta-analyse de 2020, 26 nouveaux essais comprenant 3 298 patients ont été inclus.

Les thérapies comportementales disposant du plus grand nombre d’études et de patients et qui montraient un bénéfice significatif par rapport à l’intervention contrôle étaient, dans l’ordre des RR, les thérapies cognitivocomportementales (TCC) en contact minimal avec le soignant (RR = 0,55 ; IC 95 % = [0,39 ; 0,76]), la thérapie d’autogestion de la maladie avec le téléphone (RR = 0,57 ; [0,41 ; 0,80]), la thérapie psychodynamique (RR = 0,59 ; [0,43 ; 0,80]), les TCC (RR = 0,65 ; [0,53 ; 0,80]), la thérapie d’autogestion de la maladie (RR = 0,68 ; [0,50 ; 0,92]), les TCC en ligne en contact minimal avec le soignant (RR = 0,77 ; [0,61 ; 0,96]), et l’hypnothérapie centrée sur l’intestin (RR = 0,79 ; [0,66 ; 0,95]).

En prenant en compte uniquement les essais recrutant des patients souffrant de SII à symptômes réfractaires, l’autogestion par téléphone ainsi que la thérapie par incitations motivationnelles se sont révélées supérieures à l’intervention contrôle et à la prise en charge standard. De plus, les TCC de groupe et la thérapie psychodynamique étaient supérieures à la prise en charge standard. Pour les chercheurs, ces résultats montrent que plusieurs thérapies comportementales, notamment des TCC et l’hypnothérapie centrée sur l’intestin, sont efficaces contre les symptômes du SII. Toutefois, le niveau de preuves de ces comparaisons d’efficacité reste faible à très faible, et appelle à réaliser de nouveaux essais de meilleure qualité méthodologique.