Le dernier rapport de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives révèle des changements dans l’usage des substances psychoactives des Français, avec une baisse de la consommation d’alcool et tabac mais une hausse préoccupante de l’usage des drogues illicites et de la pratique des jeux d’argent…

Les estimations sur la consommation de diverses substances psychoactives et des jeux d’argent sont fondées sur les données les plus récentes issues de diverses enquêtes représentatives de la population (ESCAPAD, EnCLASS, EROPP…).

Alcool et tabac en baisse, surtout chez les ados

Bien que l’alcool et le tabac restent les deux substances psychoactives les plus consommées par la population française, les taux d’usages (dans l’année et quotidiens) baissent depuis une dizaine d’années.

Dans la population adulte, en 2023, l’usage quotidien s’établissait respectivement à 7 % et 23 % (fig. 1).

Chez les adolescents (17 ans), la prévalence de l’usage régulier d’alcool était de 7 % en 2022, contre 10 % en 2011, et l’usage quotidien de tabac a baissé de moitié depuis une dizaine d’années. En revanche, l’expérimentation et l’usage quotidien du vapotage augmentent dans cette population depuis 2017 (fig. 2).

Cannabis : expérimentations en hausse chez les adultes, mais pas chez les ados

La moitié des adultes déclaraient en 2023 avoir expérimenté le cannabis (c’est-à-dire l’avoir consommé au moins une fois dans la vie), soit dix points de pourcentage de plus qu’en 2014. La prévalence de l’usage dans l’année est stable à 11 %.

Chez les adolescents, en revanche, tant l’expérimentation que la consommation régulière ont chuté sur la même période : l’expérimentation est passée de 48 % en 2014 à 30 % en 2022 ; la consommation régulière a diminué de plus de moitié (fig. 2).

La France reste toutefois le 3e pays d’Europe en matière d’usage du cannabis dans l’année parmi les 15 - 64 ans.

Autres drogues illicites en plein essor

La banalisation de l’usage de la cocaïne se confirme : près d’un adulte sur dix déclare l’avoir déjà expérimentée en 2023, soit une proportion quasi-doublée par rapport à 2017. Quant à l’usage au moins une fois dans l’année, il concernait 1 million de personnes en 2023, soit près du double qu’un an auparavant. Les contextes de consommation sont plus « démocratisés » : Ivana Obradovic, directrice adjointe de l’OFDT, souligne que la cocaïne est maintenant consommée par « des actifs qui l’utilisent pour tenir au travail », alors que son utilisation était restreinte à certains milieux auparavant. Cette banalisation est aussi liée à une plus grande disponibilité – la production mondiale estimée a plus que doublé depuis 2010 – et une relative stabilité des prix (66 €/g en 2023 vs 60 € en 2011) alors même que la teneur moyenne en principe actif a bondi dans le même temps (de 46 % à 73 %).

Une hausse des intoxication graves en lien avec la cocaïne a également été recensée ces dernières années. En 2023, plus d’un décès sur cinq (parmi les décès liés à l’usage abusif des substances illicites ou médicaments) était attribué à la cocaïne – d’où l’importance pour le médecin de savoir repérer les consommations problématiques, traiter les complications aiguës et chroniques et aider au sevrage. Voir notre article pratique sur ce sujet : https ://www.larevuedupraticien.fr/article/cocaine-des-complications-en-hausse.

La croissance de la consommation est aussi observée pour les autres substances illicites (ecstasy/MDMA, champignons hallucinogènes, LSD, amphétamines, héroïne, crack…) : le taux d’expérimentation pour l’ensemble – incluant la cocaïne – est passé de 10 % en 2017 à 15 % en 2023. Parmi tous les produits recensés par l’OFDT, ces produits illicites hors cannabis sont ceux qui ont connu la plus forte croissance en matière à la fois d’expérimentation (+ 50 %) et d’usage dans l’année (+ 70 %) depuis 2017 chez les adultes (fig. 1).

À l’exception de l’héroïne, tous les indicateurs témoignent d’une augmentation de l’offre de drogues illicites en raison d’une production mondiale en forte croissance. Cette offre croissante s’accompagne d’une concentration accrue en principe actif et d’une diversification des produits. Depuis 2008, 450 NPS (nouveaux produits de synthèse) ont été répertoriés en France, dont 17 en 2023. Des pratiques en lien avec ces produits, notamment le « chemsex », sont en plein essor.

Jeux d’argent et de hasard : aussi en hausse

Alors qu’elle avait baissé sur la période 2014 - 2019, la pratique des jeux d’argent et de hasard – tirages, grattages, paris sportifs, etc. – parmi les 18 - 75 ans ré-augmente depuis, si bien qu’en 2023 la prévalence du jeu dans l’année était de 52 % dans cette population (contre 47 % en 2022).

Face à la croissance inédite au niveau mondial de l’industrie des jeux d’argent ces dernières années – notamment grâce à l’essor des paris en ligne –, une commission du Lancet a récemment alerté sur la nécessité de mettre en place des politiques et des contrôles réglementaires plus stricts, axés sur la prévention. Elle a conclu, grâce à une revue systématique de la littérature, que le jeu pathologique ou à risque (c’est-à-dire ayant occasionnellement au moins un symptôme du jeu pathologique, ou des difficultés personnelles liées au jeu) pourrait concerner jusqu’à 12 % des hommes et 6 % des femmes.

Pour en savoir plus
Observatoire français des drogues et des tendances addictives. Drogues et addictions, chiffres clés 2025. 15 janvier 2025.

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