Elles révèlent que, en 2022, 673 190 personnes sont décédées sur le territoire français. Toutes causes de décès confondues, le taux de mortalité standardisé – qui neutralise l’effet du vieillissement de la population – est légèrement au-dessus du niveau de 2021 (886,6 décès pour 100 000 habitants contre 885,5 pour 100 000 habitants). Depuis 2020, ce taux est nettement plus élevé que celui auquel on aurait pu s’attendre au regard de la tendance des années précédentes (figure).
Le Covid- 19 n’est plus la 3e cause de mortalité, mais les décès par maladies respiratoires augmentent
Alors qu’en 2021 le Covid- 19 figurait toujours parmi les principales causes de décès, représentant 9 % du total, il recule en cinquième place en 2022, représentant 6 % de l’ensemble des décès. Ses victimes, majoritairement les personnes de 85 ans ou plus, étaient en moyenne plus âgées qu’en 2021.
La baisse de la mortalité par Covid – le taux standardisé de décès ayant nettement reculé, avec près de 30 morts pour 100 000 habitants en moins qu’en 2021 – s’explique en grande partie par l’atteinte d’une immunité collective élevée (couverture vaccinale, ample circulation du virus), associée à une moindre virulence des variants.
En revanche, le taux de mortalité des maladies respiratoires hors Covid- 19 a fortement progressé (59,4 pour 100 000 habitants, contre 49,4 pour 100 000 en 2021 ; figure). Elles sont devenues, en 2022, la troisième cause de décès, responsables de 6,7 % de l’ensemble des décès. Cette hausse, principalement observée en janvier, avril et décembre 2022, s’explique en partie par les deux épidémies de grippe saisonnière.
Cancers et maladies cardio-neurovasculaires : premières causes de décès
Comme chaque année depuis deux décennies, les cancers sont la première cause de mortalité en France. En 2022, ils étaient responsables d’un quart de tous les décès.
Au premier rang : ceux de la trachée, des bronches et du poumon, responsables de 18 % de décès par cancer (deux sexes confondus). Ils sont suivis des cancers colorectaux et de l’anus (10 %), des cancers du sein et de ceux du pancréas (7,5 % chacun). Chez les femmes, les cancers du sein restent la première cause de décès par cancer (17 %) suivis de près de ceux du poumon (14 %).
Si en 2022 le nombre de décès par cancer est légèrement supérieur à celui de 2021, le taux standardisé de mortalité par cancer est inférieur (241,9 contre 243,3/100 000) et poursuit la baisse observée depuis 2015 (figure). La tendance diffère entre les hommes (baisse : 305,9 contre 309,2) et les femmes (stabilisation : 177,9 contre 177,3). À âge égal, les hommes sont 2 fois plus souvent victimes de cancers que les femmes (en excluant du calcul les tumeurs spécifiques au sexe). Plus de la moitié des personnes décédées d’un cancer en 2022 avaient entre 65 et 84 ans.
Les maladies de l’appareil circulatoire étaient la 2e cause de mortalité en 2022 (21 % des décès) tous âges confondus, mais la première cause chez les personnes âgées de 85 ans ou plus (25,8 %). Si le taux de mortalité standardisé est globalement stable par rapport à 2021, il est en légère hausse chez les plus de 85 ans et chez les femmes. De plus, comme en 2021, il est significativement au-dessus de la tendance qui précédait la crise sanitaire (figure).
Mortalité due aux maladies métaboliques : toujours en augmentation
Pour la troisième année consécutive, la mortalité par maladies endocriniennes, nutritionnelles et métaboliques (4 % de tous les décès) est significativement plus élevée que la tendance sur la période 2015 - 2019.
La hausse par rapport à l’année précédente concerne toutes les classes d’âges et est notamment portée par les décès de malnutrition protéino-énergétique chez les personnes de 85 ans ou plus et les hypovolémies. L’incidence du diabète sucré a cessé de baisser depuis 2020 – ce à quoi Santé publique France attribuait, dans sa précédente analyse, cette hausse des décès –, mais le taux de mortalité par cette maladie est stable depuis 2020.
Par ailleurs, cette tendance à la hausse qui inverse la trajectoire tracée dans les années précédentes concerne aussi la mortalité par maladies de l’appareil digestif et de l’appareil génito-urinaire (figure). Pour ces dernières, l’augmentation est principalement portée par les maladies du rein et de l’uretère chez les personnes de 85 ans et plus.
Ces hausses pourraient être liées à des effets induits par la pandémie et qui perdurent (retard de prise en charge, difficultés d’accès aux soins, changements dans les comportements, voire dans l’offre de soins).
Mortalité par « causes externes »
La mortalité par causes dites « externes » – chutes accidentelles, accidents de transport, suicides… – a considérablement augmenté entre 2021 et 2022 (figure).
La hausse, observée dans tous les groupes d’âges, est portée par les accidents : ceux liés aux transports retrouvent leur niveau prépandémique, les chutes accidentelles poursuivent leur hausse et les autres accidents augmentent aussi. Néanmoins, elle doit être interprétée avec précaution, du fait de la diffusion progressive d’un nouveau format de certificat depuis 2018, conduisant à recenser les causes externes mieux qu’auparavant, et à la mise à disposition de données relatives à ces dernières par l’Institut médicolégal de Paris.
La mortalité par suicide est, quant à elle, légèrement supérieure en 2022 par rapport à 2021 ; elle retrouve son niveau de 2020 mais sans sortir significativement de sa tendance à la baisse d’avant le Covid- 19. Toutefois, les évolutions diffèrent selon l’âge : en particulier, le taux de mortalité par suicide des jeunes femmes de 19 ans ou moins augmente depuis 2020 (2,2/100 000 en 2022, contre 2,0 en 2021 et 1,3 en 2020). Dans de précédents articles, nous avons déjà analysé la dégradation de la santé mentale des jeunes – et notamment des femmes – qui se reflète aussi dans une prescription accrue de médicaments psychotropes et dans la hausse des troubles anxiodépressifs, des automutilations et des conduites suicidaires ces dernières années.
Près de 200 décès pour 100 000 personnes sont évitables
Au sein des décès enregistrés pour une année donnée, certains pourraient être évités par la prévention (interventions de santé publique et de prévention primaire sur les comportements à risque : tabagisme, alcool, conduites à risque, maladies à prévention vaccinale…) ou par le traitement (soins de santé efficaces et prodigués à temps).
La Drees a donc estimé, pour 2022, que 135,3 décès pour 100 000 habitants de moins de 75 ans auraient pu être évités grâce à la prévention primaire. La mortalité évitable par traitement s’élevait à 60,8/100 000 habitants. Ainsi, comme dans l’ensemble des pays de l’Union européenne, la mortalité liée à la prévention primaire en France est supérieure à celle liée au traitement.
Enfin, le taux de mortalité évitable est beaucoup plus élevé chez les hommes que chez les femmes (263,5 contre 128,8 décès/100 000 habitants). C’est notamment la composante liée à la prévention primaire qui est en cause : 197,5 décès pour les hommes pour 73,2 décès pour les femmes, alors que celle liée aux traitements est similaire (66,0 et 56,6 décès respectivement).
Pour conclure, ces deux études confirment une rupture de la tendance à la baisse de la mortalité observée entre 2015 et 2019, pour la mortalité toutes causes et pour la majorité des grandes causes prises isolément – hormis les cancers. Ainsi, la hausse de la mortalité se poursuit en 2022, notamment pour des maladies endocriniennes et de l’appareil digestif. Dans de précédents articles, nous avons déjà évoqué et analysé la trajectoire anormale de l’espérance de vie en France ces dernières années.
Cadillac M, Fouillet A, Rivera C, et al. Les causes de décès en France en 2022 : recul du Covid-19 et hausse des maladies respiratoires. Drees 2024;1312.
Dans cet article
- Le Covid- 19 n’est plus la 3e cause de mortalité, mais les décès par maladies respiratoires augmentent
- Cancers et maladies cardio-neurovasculaires : premières causes de décès
- Mortalité due aux maladies métaboliques : toujours en augmentation
- Mortalité par « causes externes »
- Près de 200 décès pour 100 000 personnes sont évitables