Les modalités de l’antibiothérapie dans les infections courantes sont en plein bouleversement, compte tenu de l’évolution des résistances bactériennes. Après les fiches sur les infections ORL, urinaires et cutanées en 2024, la HAS édite les recos pour le traitement en ville des pneumonies aiguës communautaires chez l’adulte et l’enfant.

PAC chez l’adulte

La pneumonie aiguë communautaire (PAC) est une infection potentiellement grave, dont les causes peuvent être bactériennes ou virales (des co-infections peuvent survenir).

La cause la plus fréquente est Streptococcus pneumoniae . En général, elles surviennent plutôt chez des sujets âgés de plus de 40 ans, sont de début brutal, s’accompagnent d’une altération de l’état général et d’une fièvre élevée. Elles sont associées à une mortalité élevée.

Les pneumonies dites atypiques sont dues à des bactéries comme Mycoplasma pneumoniae, Chlamydia pneumoniae. En général, elles touchent les jeunes adultes de moins de 40 ans, sont de début progressif, l’état général est conservé et la fièvre est peu élevée. Ces pneumonies surviennent également dans des contextes épidémiques et peuvent être liées à une transmission interhumaine.

Le traitement antibiotique des PAC est probabiliste.

Quels examens complémentaires ?

En ambulatoire, les examens microbiologiques ne sont pas requis.

Une imagerie thoracique est recommandée et il est souhaitable de l’obtenir dans un délai court (idéalement 24 h). Néanmoins, elle ne doit pas retarder la mise en route du traitement antibiotique. Sa normalité doit conduire à reconsidérer le diagnostic de pneumonie.

Quels signes d’alerte ?

Les critères qui doivent amener à discuter une prise en charge hospitalière sont :

  • Tolérance clinique :
    • hypothermie < 36 °C ou hyperthermie > 40 °C ;
    • hypotension ;
    • fréquence respiratoire ≥ 30 cycles/min ;
    • confusion.
  • Présence de comorbidités : insuffisance cardiaque, maladie cérébrovasculaire, maladie rénale, hépatique, BPCO, hospitalisation dans l’année, antécédent de pneumonie bactérienne.
  • Facteurs médico-sociaux : personne âgée isolée, isolement social, inobservance thérapeutique.
 

En l’absence de ces critères, la prise en charge de la PAC est possible en ambulatoire.

Antibiothérapie en ville

Le traitement antibiotique probabiliste des PAC sans signe de gravité est indiqué ci-dessous.

Antibiothérapie de 1re intention en absence de comorbidités :

  • amoxicilline 1 g 3 fois par jour.
 

En cas d’allergie documentée contre-indiquant les pénicillines ou de rupture de stock :

  • pristinamycine 1 g 3 fois par jour.
 

En cas de suspicion de pathogènes atypiques ou en cas d’échec à 72 h de l’antibiothérapie initiale :

  • clarithromycine : 500 mg 2 fois par jour ;
  • spiramycine : 3 MUI 3 fois par jour ;
  • azithromycine : 500 mg par jour en une prise à J1 puis 250 mg par jour (antibiotique ayant un impact plus important sur la résistance bactérienne du fait de sa longue demi-vie).
 

En cas d’allergie documentée ou de contre-indication aux macrolides :

  • pristinamycine : 1 g 3 fois par jour ;
  • doxycycline : 200 mg 1 fois par jour.
 

En cas de comorbidités ou d’exposition aux antibiotiques (à l’exception des furanes, fosfomycine-trométamol et pivmécillinam) dans le mois précédant ou d’hospitalisation dans les 6 mois :

  • amoxicilline-acide clavulanique : 1 g- 125 mg 3 fois par jour.
 

En cas d’allergie documentée à la pénicilline :

  • ceftriaxone : 1 g 1 fois par jour par voie IM, IV ou SC ;
  • céfotaxime : 1 g 3 fois par jour par voie IM ou IV.
 

En dernier recours, si aucune autre antibiothérapie n’est possible :

  • fluoroquinolone antipneumococcique : lévofloxacine 500 mg 1 fois par jour.
 

Attention : les fluoroquinolones ne doivent pas être prescrites si le patient a reçu une fluoroquinolone dans les 3 mois précédents. De plus, leur utilisation peut être associée à l’apparition d’effets indésirables, parfois graves et invalidants.

En cas d’échec à 72 h de l’antibiothérapie si patient avec comorbidités :

  • avis spécialisé ;
  • discuter l’hospitalisation.

Durée de traitement antibiotique et suivi des patients

En absence de signes d’amélioration après 72 h : modifier l’antibiothérapie (remplacement pénicillines par macrolides).

En cas d’aggravation après 72 h : discuter l’hospitalisation.

La durée du traitement antibiotique est à adapter selon la gravité de l’atteinte et la rapidité de récupération sous traitement :

  • 7 jours maximum en cas de PAC non compliquée ;
  • possibilité d’arrêt à 5 jours voire à 3 jours à condition que les critères de stabilité clinique soient obtenus et vérifiés par le médecin :
    • apyrexie ;
    • PA systolique ≥ 90 mm Hg ;
    • fréquence cardiaque ≤ 100/min ;
    • fréquence respiratoire ≤ 24/min ;
    • SpO2 ≥ 90 % ou PaO2 ≥ 60 mm Hg en air ambiant.
 

Le processus de guérison est long : après l’initiation du traitement, l’amélioration de certains symptômes (toux, expectoration, asthénie) est progressive et peut prendre plusieurs semaines ; cela ne nécessite pas de prolonger l’antibiothérapie.

Prévention

La survenue d’une pneumonie aiguë communautaire doit amener à une réévaluation de la prise en charge du patient en particulier :

  • sevrage tabagique ;
  • vérification de la vaccination antipneumococcique, antigrippale, anti-VRS et anti-Covid- 19 selon le calendrier vaccinal en vigueur.
 

Les nouvelles recos sur la vaccination antipneumococcique sont accessible ici : Vaccinations antipneumococciques : recos du CMG.

PAC chez l’enfant

Chez l’enfant, il s’agit d’une infection fréquente souvent virale ou à déclenchement viral. Avant 4 ans la cause bactérienne la plus fréquente est le pneumocoque. Après 4 ans s’ajoute Mycoplasma pneumoniae, cause fréquente mais souvent peu grave. Le tableau clinique habituel associe une toux fébrile, parfois une dyspnée et/ou tachypnée (tableau), des anomalies auscultatoires et un tirage sous-costal. Classiquement, pour le pneumocoque, le début est brutal avec une fièvre élevée ou mal tolérée, une tachypnée, une altération de l’état général (parfois associés à des douleurs abdominales). En cas de Mycoplasma pneumoniae, l’installation est habituellement progressive, la fièvre est peu élevée, la toux est persistante, des signes extrarespiratoires fréquents (cutanés, digestifs, articulaires...) et l’état général n’est pas altéré.

Pour confirmer le diagnostic, la CRP en micro-méthode (mesure automatisée ou bandelette) peut contribuer à différencier la cause bactérienne (CRP > 100 mg/L) de la cause virale (CRP < 40 mg/L), mais ce test n’est interprétable qu’après 36 à 48 h de fièvre.

La radiographie pulmonaire est généralement recommandée pour rechercher des complications ou un diagnostic différentiel mais ne doit pas retarder la mise en route du traitement antibiotique probabiliste.

L’échographie thoracique, si le médecin est formé, a une sensibilité et une spécificité comparable à la radiographie pulmonaire sans exposition aux rayons X.

Critères d’hospitalisation

  • Nouveau-né et nourrissons de moins de 6 mois.
  • Troubles hémodynamiques : tachycardie (tableau), temps de recoloration cutanée > 3 secondes, marbrures, extrémités froides, HTA (tableau), signes de sepsis.
  • Signes d’insuffisance respiratoire aiguë : dyspnée, hypoxie (saturation en oxygène ≤ 90 %), tirage sous-costal marqué, apathie, sueurs, troubles de la conscience.
  • Difficultés alimentaires (vomissements, diarrhée profuse, signes de déshydratation).
  • Administration médicamenteuse per os impossible (vomissements, refus).
  • Comorbidités graves.

Traitement antibiotique probabiliste des PAC en ambulatoire

En cas de suspicion de pneumocoque :

  • amoxicilline (voie orale) : 80 à 100 mg/kg/jour en 2 prises (sans dépasser 3 g/jour) pendant 5 jours.
 

Si allergie ou rupture de stock ou intolérance alimentaire :

  • ceftriaxone (IV or IM) : 50 mg/kg/jour en 1 injection (sans dépasser 2 g/jour) pendant 5 jours.
 

En cas d’échec à 48 h- 72 h ou de suspicion de pathogènes atypiques :

  • clarithromycine en première intention : chez l’enfant jusqu’à 60 kg à la posologie de 15 mg/kg/j soit 1 dose/poids matin et soir (sans dépasser la posologie adulte de 1 g/jour) pendant 5 jours.
 

Attention : l’azithromycine fait partie des antibiotiques critiques ayant un impact plus important sur la résistance bactérienne du fait de sa longue demi-vie. Pour les alternatives à la clarithromycine, cf. Réponse rapide sur la prise en charge diagnostique et thérapeutique des pneumonies atypiques à Mycoplasma pneumoniae en ambulatoire chez l’enfant et l’adulte (HAS).

Suivi (enfant de plus de 6 mois)

  • Réévaluer dans les 48 à 72 h en cas de non-amélioration (fièvre, état général). En cas de pneumonie à Mycoplasma pneumoniae, l’apyrexie est plus lente.
  • En cas d’amélioration clinique, ne pas réaliser une radiographie de contrôle.
  • Si absence d’amélioration, rechercher une éventuelle complication (radiographie pulmonaire ou échographie thoracique) et envisager un traitement adapté à Mycoplasma pneumoniae.
  • En cas d’aggravation clinique : hospitaliser.

Prévention 

La primovaccination contre le pneumocoque est obligatoire dès l’âge de 2 mois chez tous les nourrissons nés à partir du 1er janvier 2018. Les nouvelles recos sur cette vaccination sont indiquées ici : Vaccinations antipneumococciques : recos du CMG.

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