Si la prise en charge d’un saignement sous AOD ou AVK est bien établie dans les dernières recommandations européennes, la question de la recherche de sa cause n’est pas traitée. Les patients et les professionnels de santé peuvent attribuer ces saignements aux traitements plutôt qu’à une pathologie intrinsèque, comme une tumeur occulte.
Pour déterminer si la recherche de cancer en cas de saignement sous AOD ou AVK était pertinente, des chercheurs de l’université de Toronto (Canada) ont mené une étude de cohorte à l’échelle de la population de la province de l’Ontario (la plus peuplée du pays). En utilisant les données de santé nationales pour les patients ≥ 66 ans de la province (assurance maladie universelle, prescriptions médicamenteuses, hospitalisation), ils ont recherché les cancers diagnostiqués dans les deux ans suivant l’initiation d’un traitement par warfarine ou AOD après un diagnostic de FA.
Parmi les 119 480 personnes incluses ayant commencé un anticoagulant pour cause de FA (âge moyen = 77,4 ans, 48 % de femmes), 21,8 % avaient subi un saignement documenté, et 4,9 % avaient reçu un diagnostic de cancer dans les deux ans. Le saignement était associé avec un hazard ratio (HR) de diagnostic de cancer de 4,0 (IC 95 % = [3,8 ; 4,3]). Le HR variait par type de cancer : il était particulièrement élevé pour les cancers gastro-intestinaux (HR = 5,0 ; IC 95 % = [4,6 ; 5,5]), génito-urinaires (HR = 5,0 ; IC 95 % = [4,4 ; 5,7]), et respiratoires (HR = 4,0 ; IC 95 % = [3,5 ; 4,6]).
Le hazard ratio de diagnostiquer un nouveau cancer correspondant au site du saignement était particulièrement élevé lorsqu’il s’agissait de cancers gastro-intestinaux, génito-urinaires ou respiratoires. De manière intéressante, les cancers découverts pendant le suivi de 2 ans l’étaient à un stade plus précoce si le diagnostic avait lieu après un saignement (27,6 % de stade 4 après saignement contre 31,3 % sans saignement ; p = 0,029).
Pour les auteurs, ces résultats montrent que, chez les patients âgés anticoagulés, le saignement était fortement associé avec un diagnostic subséquentde cancer, qui tendait alors à être détecté à un stade plus précoce qu’en l’absence de saignement. « Cela souligne l’importance de rechercher rapidement la cause du saignement chez ces patients, plutôt que de l’attribuer à un effet indésirable attendu », affirment-ils.
Pour en savoir plus :
Nobile C. Fibrillation atriale : recos européennes 2024. Rev Prat (en ligne) 12 septembre 2024.