En 2025, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) constate que 98 % des Français de 12 ans et plus possèdent un téléphone mobile, dont 91 % un smartphone. L’évolution rapide des pratiques numériques modifie l’exposition de la population aux ondes radiofréquences (3 kHz – 3 000 GHz), avec un usage vocal en déclin au profit de l'utilisation du haut-parleur ou d’oreillettes, réduisant ainsi l'exposition directe de la tête aux ondes radio.
Parallèlement, le développement massif de l’internet mobile (vidéos, réseaux sociaux, etc.), favorisé par la 4G, la 5G et la densification en antennes relais, entraîne une augmentation progressive de l'exposition aux radiofréquences dans l’environnement, notamment dans les zones urbaines bien équipées.
Ces évolutions justifient un suivi régulier des niveaux d’exposition des populations et l’évaluation de leurs effets éventuels sur la santé. C’est dans cette optique que l’Anses a publié ce 26 novembre 2025 une mise à jour de son expertise « radiofréquences et cancer », qui datait de 2013 pour les adultes et de 2016 pour les enfants.
250 nouveaux articles retenus
Depuis ces précédentes expertises, l’organisme indique que près de mille nouvelles études investiguant l’éventuelle association entre cancer et exposition aux ondes radio ont été publiées, dont des travaux de grande ampleur. L’ensemble de ces études épidémiologiques, expérimentales ou mécanistiques a été analysé. En tout, près de 250 articles scientifiques ont été retenus pour évaluer l’effet des ondes radio sur l’apparition de cancer en se basant sur leur pertinence, la qualité de leurs protocoles expérimentaux et la robustesse de leurs analyses.
Dans certaines de ces nouvelles études, des effets des ondes radio sur des mécanismes cellulaires ont été mis en évidence in vitro (stress oxydant, mort cellulaire, génotoxicité, inflammation, immunosuppression) et chez la souris (augmentation d’adénomes hépatocellulaires par exemple), sans niveau de preuve solide. Cependant, les études épidémiologiques n’apportent pas d’éléments probants sur une association avec l’apparition de cancers chez l’être humain.
La prise en compte de ces nouvelles connaissances, associées aux précédentes données scientifiques, conduit à ne pas établir de lien de cause à effet entre exposition aux ondes radio et survenue de cancers. Cette conclusion ne signifie pas pour autant que toute hypothèse de l’existence d’effets cancérogènes est écartée.
Maintenir la vigilance
De fait, l’Anses n’appelle pas à réduire la vigilance, et son comité d’experts mobilisé sur l’avis « radiofréquences et cancer » « s’interroge sur la mise en œuvre systématique de nouvelles technologies [5G, 6G, NDLR], en l’absence d’évaluation préalable des risques et de débats publics ».
Le même comité d’experts recommande de considérer d’autres impacts du développement des technologies numériques :
- sur l’environnement : empreinte carbone, consommation d’énergie, ressources
- minières, cycle de vie des appareils, eau, biodiversité ;
- sur les nouveaux usages et les pratiques, avec leurs conséquences notamment sur la santé mentale ;
- sur les répercussions sur la santé des travailleurs et sur l’emploi, les conditions de travail, la qualité de vie.
Avec la multiplication des publications sur les radiofréquences, l’Anses indique concentrer désormais ses expertises sur des effets sanitaires spécifiques. Par exemple, comme plusieurs nouvelles études cellulaires mécanistiques suggèrent des effets sur la fertilité, l’agence recommande d’engager la réévaluation de ces effets.
Recommandations d’usage du téléphone mobile
Enfin, rappelant que le téléphone mobile est la source d’exposition prédominante aux radiofréquences (par rapport au micro-ondes, au Wi-Fi, aux antenne relais, etc.), le comité d’experts appelle en outre à continuer de suivre les préconisations déjà en vigueur concernant l’utilisation du téléphone mobile : usage raisonné, privilégier les zones de bonne réception et les connexions de bonne qualité (Wi-Fi plutôt que réseaux mobiles), utiliser des oreillettes ou kits mains libres, limiter l’usage par les enfants.
L’Anses souligne que ces recommandations sont cohérentes avec les travaux portant sur d’autres effets sanitaires des téléphones mobiles et des écrans, tels que les effets de la lumière bleue sur le sommeil ou encore les impacts de la sédentarité chez les jeunes, fortement liés au temps passé devant un écran. L’Anses rendra par ailleurs début 2026 une expertise sur les effets de l’usage des réseaux sociaux numériques chez les adolescents.
Anses. Avis de l’Anses relatif à l’expertise « radiofréquences et cancer ». 24 octobre 2025.
Pour en savoir plus :
Martin Agudelo L. Le téléphone portable nuit à la qualité du sperme. Rev Prat (en ligne) 10 novembre 2023.
Mallordy F. Près de 40 % des adultes ont une addiction au smartphone. Rev Prat (en ligne) 25 mars 2025.
Scala B. Quel est le vrai danger des ondes électromagnétiques ? Inserm. 1er décembre 2025.