Jacques, 9 ans, consulte pour une rectorragie fugace de sang rouge, non douloureuse.

Il a déjà eu un épisode de ce type 5 mois plus tôt. Mais cette fois-ci, sa mère constate, outre les traces de sang dans les selles, une structure d’allure organique qu’elle prend en photographie (fig. 1).

À l’examen, l’abdomen est souple et non douloureux. Le toucher rectal est strictement normal. Rendez-vous est pris avec le gastro-entérologue.

La rectosigmoïdoscopie visualise un polype isolé du bas rectum pédiculé, de 6 mm, qui sera réséqué (fig. 2).

L’analyse anatomopathologique conclut à une hamartomatose d’un polype juvénile.
Par Yves Abitteboul1, Baptiste Desvaux1, Jean Masbou2, Stéphane Oustric1

discussion

Le polype juvénile isolé, masse tissulaire développée à partir de la paroi du tube digestif, fait saillie dans la lumière (il est volontiers pédiculé), sans que cela ne préjuge de son type histologique.
En fonction de ce dernier, les polypes sont dits hyperplasiques, adénomateux, hamartomateux ou encore inflammatoires (pseudo- polypes consécutifs à des poussées inflammatoires comme lors des MICI). L’hamartome résulte de l’assemblage désordonné de tissus identiques à ceux de l’organe considéré (ici le côlon).
Le polype juvénile isolé hamartomateux est relativement fréquent chez l’enfant (8 %).
Il touche en règle générale ceux de 1 à 10 ans. Il faut l’évoquer devant des rectorragies de sang rouge de faible abondance, récidivantes, avec des traces de sang enrobant la selle lors de la défécation et parfois une extériorisation du polype par l’anus. Il est volontiers localisé au niveau du rectosigmoïde.
À l’examen, on inspecte la marge anale et on réalise un toucher rectal, mais le diagnostic est généralement fait à l’aide d’une imagerie de type rectosigmoïdoscopie ou coloscopie.
La localisation des polypes est principalement rectosigmoïdienne (75 % des cas), la lésion étant le plus souvent unique.
Le traitement consiste en une exérèse endoscopique. Les récidives (4 à 7 pour 1 000) et les dégénérescences malignes sont rares, il n’y a donc pas lieu de proposer une surveillance particulière.
En cas de nouvel épisode de rectorragie, il faut refaire une endo-scopie.
Devant des polypes multiples (plus de 5) avec des lésions extra- coliques associées (intestin grêle, estomac) et une composante familiale, on évoque des syndromes polyposiques hamartomateux comme la polypose juvénile familiale, le syndrome de Peutz-Jeghers ou encore le syndrome de Cowden, qui sont des maladies autosomiques dominantes. Ces affections beaucoup plus rares requièrent une prise en charge spécifique avec des coloscopies et polypectomies régulières et parfois une colectomie précoce en raison du risque de dégénérescence maligne.
Pour en savoir plus
– Couvelard A. Des entités à connaître au sein du tube digestif : polypes juvéniles et autres polypes hamartomateux. Paris; symposium CHDH-SFED JFPD: 2007.

– Bonnefoy S, Béchade D, Bertocchi C, Blondon H, Desramé J, Algayres J. Polypes coliques juvéniles sporadiques de l’adulte. Gastroenterol Clin Biol 2009;33(1Pt1):88-91.

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