Lié dans la quasi-totalité des cas aux HPV, le cancer du col de l’utérus est responsable de 3 000 nouveaux cas et 800 décès par an en France. Compte tenu du surrisque chez les personnes immunodéprimées, la HAS recommande des modalités de dépistage spécifiques.

Pour rappel, le dépistage du cancer du col de l’utérus est fondé, pour les femmes de 25 à 29 ans, sur la réalisation de deux examens cytologiques à un an d’intervalle, puis 3 ans après si le résultat des deux premiers est normal. Pour les femmes de 30 à 65 ans, un test HPV est à réaliser tous les 5 ans.

Cependant, les personnes immunodéprimées (infectées par le VIH, sous traitement immunosuppresseur, greffées ou ayant une immunodépression constitutionnelle) ont un risque accru d’avoir un cancer du col de l’utérus, dans la mesure où l’immunodépression peut favoriser une réactivation d’une infection HPV latente et une diminution de la clairance virale. D’où la nécessité d’adapter les modalités de dépistage dans ces populations.

Recos en cas d’infection par le VIH

Pour les personnes vivant avec le VIH (PVVIH), des recommandations de bonnes pratiques ont été émises en juin 2024 par l’ANRS-MIE (agence dédiée aux maladies infectieuses émergentes) et le Conseil national du sida et des hépatites virales (CNS). Elles sont identiques à celles de la population générale, à l’exception de deux cas de figure :

  • pour les femmes ≥ 25 ans et  30 ans ayant un taux de lymphocytes T CD4  350/μL ou un nadir  200 cellules/μL, une cytologie est préconisée annuellement, au lieu de tous les 3 ans en population générale ;
  • alors que le dépistage s’applique aux femmes de 25 à 65 ans en population générale, il est recommandé de le prolonger, au cas par cas, pour les PVVIH ≥ 65 ans ayant un antécédent de lésion intraépithéliale ou d’infection persistante HPV-HR.

Pour les femmes de 30 ans et plus, compte tenu de l’excellente valeur prédictive négative du test HPV-HR et de l’histoire naturelle de l’infection par le HPV, il a été jugé peu probable par l’ANRS-MIE et le CNS (sur avis d’experts) qu’un cancer du col avancé se développe dans les 5 ans suivant un résultat négatif au test HPV-HR. Par conséquent, des recommandations identiques à celles de la population générale s’appliquent pour les femmes ≥ 30 ans, même en cas d’immunosuppression avancée.

Une littérature limitée dans les autres situations

La littérature sur les personnes immunodéprimées hors PVVIH est pauvre et aucune étude ne permet de comparer directement l’incidence, la gravité ou l’âge d’apparition de cancer du col de l’utérus entre les différentes catégories d’immunodépression. Autre difficulté : au sein d’une même catégorie de personnes immunodéprimées, le niveau d’immunosuppression peut varier en fonction de la nature de la pathologie ou de la greffe, des traitements immunosuppresseurs prescrits… Il faut également prendre en compte les risques liés à un dépistage plus fréquent : interventions potentiellement inutiles, impact psychologique d’un dépistage positif, coûts… Un groupe de travail a été constitué par la HAS pour statuer sur les modalités de dépistage dans ces populations.

Recos chez les immunodéprimées hors PVVIH

Quelles patientes concernées ?

Après analyse des données de la littérature, la HAS recommande un dépistage plus rapproché du cancer du col de l’utérus pour les personnes immunodéprimées suivantes :

  • atteintes de déficit immunitaire primitif ou congénital (par exemple, syndrome de DiGeorge, agammaglobulinémie, hypogammaglobulinémie…) ;
  • greffées par cellules souches hématopoïétiques allogéniques ;
  • atteintes de lupus systémique (traitées ou non) ;
  • sous traitement immunosuppresseur depuis au moins un an (par exemple, pour une greffe, une polyarthrite rhumatoïde, une MICI, une sclérose en plaques…) ;
  • toute personne en situation d’immunodépression sévère, diagnostiquée par un professionnel de santé.

Attention : la conduite à tenir pour le dépistage est la même pour les femmes vaccinées ou non contre le HPV.

À quel intervalle ?

Pour ces personnes ciblées, le dépistage doit débuter dans l’année suivant la greffe, le diagnostic de lupus systémique ou la mise sous traitement immunosuppresseur, y compris chez les femmes de plus de 30 ans dont le dernier test HPV était négatif avant ces situations.

Le dépistage est recommandé aux intervalles suivants :

  • de 25 à 29 ans : réalisation d’une cytologie annuelle ;
  • de 30 à 65 ans : un premier test HPV est à réaliser à 30 ans, puis tous les 3 ans, si le résultat du test est négatif ;
  • à partir de 65 ans, la poursuite ou l’arrêt du dépistage du CCU devra être décidé selon le résultat du dernier test HPV et en tenant compte des antécédents médicaux.

Quelles modalités ?

Le prélèvement cervical peut être réalisé, comme en population générale immunocompétente, par un gynécologue, un médecin généraliste ou une sage-femme et également en laboratoire de biologie sur prescription médicale.

Le dépistage doit être l’occasion de réaliser le suivi gynécologique médical requis en cas d’immunosuppression (risque plus important d’autres pathologies gynécologiques +++).

Un algorithme avec la conduite à tenir selon les résultats est indiqué dans la figure. En cas de résultat anormal, la CAT est identique à celle pour les femmes immunocompétentes (ici : Conduite à tenir devant une femme ayant une cytologie cervico-utérine anormale), dans l’attente de recos spécifiques.

L’autoprélèvement est une alternative au prélèvement cervical par un professionnel de santé pour la réalisation d’un test HPV pour les femmes à partir de 30 ans, non dépistées ou insuffisamment dépistées selon le rythme recommandé, ou dans le cas particulier d’une mobilité réduite (personnes atteintes de sclérose en plaques par exemple).

Pour en savoir plus
HAS. Dépistage du cancer du col de l’utérus chez les personnes immunodéprimées (hors PVVIH).  8 octobre 2025.
ANRS. Dépistage et prise en charge des cancers chez les personnes vivant avec le VIH. Mars 2024.
Pour aller plus loin :
Dujardin C, Foulon A, Gondry J. Modalités du dépistage du cancer du col de l’utérus en France.  Rev Prat Med Gen 2025;39(1093):21-3.
De Parades V. Dépistage pragmatique des lésions anales liées aux HPV.  Rev Prat 2024;74(4):351.
Benoit L, Azaïs H, Koual M, et al. Item 300. Tumeurs du col utérin, tumeurs du corps utérin.  Rev Prat 2024;74(4):433-40.

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