La population va-t-elle diminuer en France ? L’espérance de vie stagne-t-elle ? L’Institut national d’études démographiques (Ined) vient de publier une étude sur la situation démographique française. En se fondant sur les dernières données disponibles sur les décès, naissances, migrations et sur l’espérance de vie, les chercheurs ont aussi réalisé des projections de population à l’horizon 2070…

La population augmente même si le solde naturel ne cesse de baisser

Il y a aujourd’hui 68,6 millions d’habitants en France, selon les dernières estimations de l’Ined (données au 1er janvier 2025). En 2024, la population a augmenté de 0,25 % – soit 169 000 habitants – par rapport à l’année précédente. Cette hausse a principalement été due à un solde migratoire positif, estimé à 152 000 personnes ; le solde naturel (qui est l’excédant des naissances sur les décès) n’en a représenté qu’une petite partie, environ 10 %.

C’est une tendance observée depuis des années : la baisse des naissances et la hausse des décès ont fait diminuer le solde naturel de 140 000 en 2019 à 17 000 en 2024. Prenant ce « scénario 2024 » comme base pour leurs projections, les chercheurs de l’Ined ont estimé que le solde naturel deviendra négatif en 2027, en raison de la hausse continue des décès résultant de l’arrivée des générations du « baby-boom » aux âges élevés. Ce déficit – davantage de décès que de naissances – continuera de croître jusqu’en 2060 avant de se stabiliser.

Toutefois, selon ces mêmes projections, la population continuera de croître jusqu’en 2040, malgré ce solde naturel négatif, grâce au solde migratoire positif qui compense la baisse de la fécondité et la stagnation de l’espérance de vie (v. ci-après). Ainsi, la population en France atteindrait un plafond à 70 millions dans les années 2040 pour ensuite diminuer à 68 millions en 2070.

L’espérance de vie ne progresse plus comme avant

Depuis la seconde guerre mondiale, l’espérance de vie française à la naissance augmentait d’environ 3 mois par an, mais cette progression est ralentiedepuis les années 2000.

La pandémie de Covid l’a logiquement fait diminuer, en raison de l’excès de mortalité qu’elle a entraînée, mais elle a repris une trajectoire ascendante depuis. Ainsi, en raison de la forte baisse de la mortalité en 2023 par rapport à 2022, l’espérance de vie à la naissance a pu dépasser son niveau prépandémique ; elle continue à progresser, mais de façon moins marquée, en 2024 (fig. 1).

L’année dernière, elle s’établissait ainsi à 80 ans pour les hommes et 85,6 ans pour les femmes, ce qui représente, par rapport à 2023, un gain d’un peu plus de 1 mois pour les hommes, mais une stagnation pour les femmes.

Les chercheurs soulignent que la progression de l’espérance de vie observée sur les dernières années est moins importante que les projections établies en 2021 par l’Insee, et que, comparée aux évolutions depuis le milieu du XXe siècle, elle s’essouffle.

Mais comment expliquer cette tendance ? Même si une stagnation préoccupante de la mortalité infantile a été documentée en France depuis quelques années, cette mortalité – étant donné son faible niveau – n’a presque plus d’influence aujourd’hui sur l’espérance de vie. En revanche, un certain essoufflement des progrès sur la mortalité due aux maladies cardiovasculaires et aux cancers – principales causes de décès en France aujourd’hui – pourrait être en cause.

En effet, si les progrès ont été spectaculaires depuis plusieurs décennies en matière de prévention et traitement, notamment pour les maladies cardiovasculaires (fig. 2), « le ralentissement des progrès de l’espérance de vie depuis une dizaine d’années est peut-être le signe que les retombées de la révolution cardiovasculaire sont en voie d’épuisement  », expliquent les chercheurs.

« Les progrès futurs pourraient dépendre de plus en plus de la lutte contre les cancers qui sont devenus la première cause de décès  », poursuivent-ils. Or, si la mortalité due aux cancers a beaucoup diminué et continue de baisser chez les hommes, l’évolution est moins favorable pour les femmes. Les dernières données de l’Institut national du cancer, publiées en 2024, montrent qu’entre 2011 et 2021 le taux de mortalité par cancer standardisé a diminué de - 2,1 % par an chez les premiers mais seulement de - 0,6 % par an chez les secondes. La hausse des cancers liés au tabac chez les femmes participe de cette tendance – la prévalence du tabagisme ayant augmenté de façon considérable dans cette population depuis les années 1970.

Ces données soulignent également l’importance de s’attaquer aux autres facteurs de risque modifiables de cancer, notamment la consommation d’alcool, qui augmente aussi chez les femmes depuis quelques années.

Pour en savoir plus
Pison G, Toulemon L. La population de la France va-t-elle diminuer ?  Population & Sociétés, n° 631, 2025.

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