L’obésité a une nouvelle définition depuis le début de l’année : elle est désormais caractérisée par un excès d’adiposité. Hormis dans l’IMC > 40, son diagnostic ne repose plus sur l’IMC seul – une approche qui manquait de nuance et conduisait à des diagnostics erronés –, mais doit aussi prendre en compte des mesures de l’excès d’adiposité (soit directes par ostéodensitométrie ou bioimpédance, soit indirectes par des mesures anthropométriques comme le tour de taille, le rapport taille-hanches ou le rapport tour de taille-hauteur). On distingue désormais deux types d’obésité : l’obésité préclinique, où les patients n’ont pas de complications actuelles dues à l’excès d’adiposité et qui n’est pas considérée comme une maladie ; et l’obésité clinique, maladie chronique et systémique caractérisée par des altérations de la fonction des tissus, des organes ou de l’individu liées à une adiposité excessive.
4 990 adultes inclus
Comment se traduit concrètement ce changement de définition de l’obésité, en termes de populations diagnostiquées ? Afin de le déterminer, des chercheurs coréens ont comparé la prévalence de l’obésité clinique avec celle de l’obésité dans son ancienne définition (IMC ≥ 30, ou IMC ≥ 27,5 chez les personnes asiatiques). À cette fin, ils ont utilisé des données de 2017 - 2018 du programme de recherche nutritionnel par enquêtes NHANES, qui constituent la cohorte représentative la plus récente à l’échelle des États-Unis. Seuls les adultes ≥ 20 ans de NHANES ayant complété leurs données d’examen physique et ayant des mesures anthropométriques valides ont été inclus dans l’analyse, afin de se restreindre aux personnes dont le statut d’obésité clinique a pu être évalué (cf. encadré).
Les résultats de cette analyse ont été publiés le 25 septembre 2025 sous la forme d’une lettre de recherche dans le JAMA Network Open. 4 990 adultes ont été inclus (âge moyen ± écart-type = 48,12 ± 17,13 ans ; 51,69 % de femmes ; 62,71 % de blancs non-hispaniques, 11,38 % de noirs non-hispaniques, 15,43 % d’hispaniques). Dans la cohorte, la prévalence de l’obésité dans son ancienne définition basée sur l’IMC était de 43,81 % (IC 95 % = [40,16 % ; 47,47 %]), soit une prévalence comparable à celle de l’obésité clinique dans sa nouvelle définition (44,74 % (IC 95 % = [41,73 % ; 47,76 %]).
60 % de recouvrement obésité clinique/obésité « traditionnelle » basée sur l’IMC
Surprise : malgré ces prévalences similaires, seuls 25,76 % de la cohorte (IC 95 % = [22,87 % ; 28,66 %]) avait à la fois une obésité clinique et une obésité « traditionnelle » basée sur l’IMC – soit environ 60 % de recouvrement entre l’obésité clinique et l’obésité « traditionnelle », définie uniquement par l’IMC. 18 % des sujets de la cohorte ne correspondaient qu’à l’ancienne définition de l’obésité basée sur l’IMC, tandis que 19 % ne répondaient qu’aux nouveaux critères diagnostics de l’obésité clinique. Parmi les adultes ayant un excès d’adiposité, environ 45 % étaient classés en obésité préclinique – une proportion qui diminuait avec l’âge, passant de 77 % chez les 20 - 29 ans à 8,5 % des 80 ans et plus. À l’inverse, la proportion de personnes uniquement obèses selon l’ancienne définition d’après l’IMC (mais sans obésité clinique) fondait avec l’âge, passant de 28 % des 20 - 29 ans à moins de 1 % des 80 ans et plus.
Pour les auteurs, ces résultats indiquent que, malgré des prévalences similaires, les 2 définitions de l’obésité correspondent à des populations distinctes. Les jeunes adultes et les personnes à statut socioéconomique plus élevé étaient plus souvent classés comme obèses uniquement sur la base de l’IMC, à l’inverse des personnes âgées et des sujets issus de milieux défavorisés plus souvent touchés par l’obésité clinique. Enfin, pour les 45 % de patients ayant un excès d’adiposité relevant de l’obésité préclinique, les scientifiques notent que leur risque élevé de progresser vers l’obésité clinique ou d’autres maladies chroniques rend crucial la mise en place d’interventions précoces de prévention.
Critères utilisés pour rechercher l’obésité clinique dans NHANES.
Excès d’adiposité si :
- IMC ≥ 30 (ou ≥ 27,5 chez les personnes asiatiques) + au moins une mesure anthropométrique (tour de taille ≥ 102 cm chez l’homme (90 cm si homme asiatique) ou ≥ 88 cm chez la femme (80 cm si femme asiatique), rapport taille-hanches > 0,9 chez l’homme ou > 0,85 chez la femme, rapport tour de taille-hauteur > 0,5) ;
- Deux mesures anthropométriques (cf. seuils ci-dessus) quel que soit l’IMC ;
- Mesure directe du pourcentage de graisse corporelle > 25 % chez l’homme ou > 35 % chez la femme ;
- IMC ≥ 40.
Une fois l’excès d’adiposité constaté, l’obésité clinique a été évaluée sur la base d’altérations dans la mobilité ou les activités quotidiennes, ou sur la présence de symptômes traduisant des altérations de la fonction des tissus ou des organes (indiqués en encadré de l’article suivant).
Pour en savoir plus :
Martin Agudelo L. Prescription des aGLP-1 dans l’obésité en MG : comment faire, en pratique ? Rev Prat (en ligne) 30 juin 2025.
Mallordy F. Effet yoyo après l’arrêt des aGLP-1 ? Rev Prat (en ligne) 28 août 2025.
Martin Agudelo L. Surpoids et obésité chez la femme : nouvelles recos HAS. Rev Prat (en ligne) 6 mars 2025.
Obésité : un changement de paradigme en 2025. Rev Prat (en ligne) 4 mars 2025.
Laville M, Clément K, Pattou F. La définition de l’obésité clinique évolue ! Rev Prat 2025;75(2);119.
Martin Agudelo L. Obésité : nouvelle définition, nouvelle prise en charge. Rev Prat (en ligne) 17 janvier 2025.
Nocca D. Vivre avec le fardeau de l’obésité. Rev Prat 2025;75(7);770-2.