Angiokératomes de Fordyce

Sylvain, 54 ans, consulte pour des nodules de couleur violette apparus au niveau des bourses et évoluant depuis plusieurs années (figure). Par pudeur, il n’a jusqu’ici jamais consulté, mais, les lésions prenant de l’ampleur, il s’inquiète.
Texte

Les angiokératomes de Fordyce sont liés à des anomalies bénignes du système vasculaire veineux et s’observent généralement chez les hommes de plus de 30 ans. Fréquents (15 % des hommes ayant plus de 50 ans en sont porteurs), leur origine reste méconnue. Les angiokératomes peuvent s’observer au niveau du tronc (dernières vertèbres lombaires, zone périombilicale, fesses) et des cuisses ; leur présence doit faire évoquer la maladie de Fabry transmise génétiquement (inactivation du chromosome X) associant aux manifestations cutanées des signes neurologiques, ORL, cardiovasculaires et rénaux. Lorsqu’ils existent chez la femme, ils sont localisés au niveau de la vulve.

Cliniquement, des maculopapules au niveau du scrotum – plus rarement au niveau du pénis et du gland – sont disposées de manière symétrique. Les angiokératomes sont de couleur rubis ou violette et sont asymptomatiques. Parfois, en cas de prurit soutenu entraînant les lésions de grattage, ils peuvent saigner.

La prise en charge repose sur une abstention thérapeutique dans la grande majorité des cas, du fait de leur caractère bénin. Pour des raisons esthétiques, il est possible de les retirer par azote liquide, chirurgie ou laser. Il est important d’expliquer au patient qu’il existe une possibilité de récidive, en dépit d’un traitement bien conduit. 

Pour en savoir plus
Hall A. Atlas of male genital dermatology. Ed. Springer 2019.
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Ulcère de Buruli

Ashraf, 15 ans, en provenance de Mayotte, consulte pour de multiples ulcérations au niveau  des jambes (figure). Apparues il y a plus de quinze jours, ces lésions persistent en dépit de soins locaux.  Un prélèvement est effectué.
Texte

L’ulcère de Buruli, décrit pour la première fois par Albert Cook en 1897, est dû à Mycobacterium ulcerans, mycobactérie souvent retrouvée en Afrique, en Amérique latine et dans le Pacifique occidental. Dans la très grande majorité des cas, cette affection concerne les enfants de moins de 15 ans. La transmission s’effectue par voie aquatique (possible contamination transcutanée). 

Cliniquement, les lésions sont situées sur les membres inférieurs (60 % des cas) ou supérieurs (30 % des cas). Elles évoluent en trois stades :

  • pré-ulcératif avec apparition de nodules ou papules de 1 à 2 cm de diamètre et dépigmentation de la peau sous-jacente ;
  • ulcératif avec ulcération indolore à fond nécrotique, de couleur jaune, avec bords décollés. En périphérie, la bordure est de couleur noire et/ou devient œdémateuse ;
  • cicatrisation avec développement d’un tissu cicatriciel scléreux. 

Dans certains cas, un lymphœdème de jambe apparaît.

Le diagnostic est affirmé par PCR identifiant Mycobacterium ulcerans.

Le traitement dépend de la taille de la lésion :

  • catégorie I (lésion unique de moins de 5 cm) ou catégorie II (lésion unique entre 5 et 15 cm) : antibiothérapie par rifamycine à 10 mg/kg/j en une prise et clarithromycine à 7,5 mg/kg/j en deux prises, durant deux mois (OMS)  ;
  • catégorie III (multiples ou lésion de plus de 15 cm) : chirurgie complémentaire à l’antibiothérapie. 

Pour en savoir plus
Marsollier L, Aubry A, Carbonnelle E, et al. Mycobactéries cutanées dues à Mycobacterium ulcerans, Mycobacterium marinum, Mycobacterium abscessus, Mycobacterium chelonae et autres mycobactéries non tuberculeuses. EMC Maladies infectieuses 2020;37(3):1-14. 
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Psoriasis flexural

À la demande des infirmières, Monique, 75 ans, consulte pour des lésions au niveau du siège (figure). Malgré l’application consciencieuse d’émollients et d’antifongiques locaux, un imposant placard s’est développé et persiste. Outre la présence d’une zone érythémateuse très étendue mais bien limitée, l’examen clinique objective des placards érythémato-squameux en périphérie (figure, flèche verte) et des lésions similaires au niveau des coudes.
Texte

La prévalence du psoriasis flexural, ou psoriasis inversé, varie entre 3 et 36 %. Ce large écart tient surtout au fait que le diagnostic est difficile à poser : la confusion avec d’autres affections des plis (intertrigo fongique, notamment) est fréquente.

Sur le plan clinique, on observe des placards brillants, le plus souvent très érythémateux mais peu squameux, contrairement aux autres formes de psoriasis. Les limites de ces zones sont très nettes, avec une démarcation particulièrement visible entre la lésion et la peau saine. Chez le petit enfant, il est possible d’objectiver cette entité au niveau du siège (psoriasis des langes). Outre cette localisation, les plis axillaires, inguinaux, sous-mammaires, l’ombilic, les espaces entre les orteils et le pourtour des oreilles peuvent être atteints. En cas de macération superficielle, les lésions peuvent devenir très malodorantes : il faut alors rechercher une colonisation fongique secondaire – notamment par Candida albicans –, situation fréquente chez les patients diabétiques. 

Le diagnostic est essentiellement clinique et doit être associé à la recherche de lésions semblables (placards érythémato-squameux limités) sur le reste du corps.

Le traitement repose classiquement sur l’administration de dermocorticoïdes en association au calcipotriol. Éviter toute macération au niveau de ces zones est également de rigueur. 

Pour en savoir plus
Micali G, Verzi AE, Giuffrida G, et al. Inverse psoriasis : From diag­nosis to current treatment options. Clin Cosmet Investig Dermatol 2019;12:953-9. 
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Syndrome de Leser-Trélat

Jules, 68 ans, consulte pour une efflorescence rapide de lésions pigmentées au niveau du dos et du thorax, dont certaines lésions se détachent (figure). Il explique ne plus avoir d’appétit depuis trois mois, décrit des douleurs épigastriques parfois intenses et a constaté une perte de poids de 5 kg. Des explorations sont réalisées, permettant de poser le diagnostic d’adénocarcinome gastrique.
Texte

Le syndrome de Leser-Trélat associe une pathologie néoplasique à une floraison brutale de lésions de kératose séborrhéique. Il est dû à une augmentation des récepteurs à EGF (facteur de croissance épidermique [epidermal growth factor]) au niveau cutané. Ce syndrome paranéoplasique est contesté par de nombreux dermatologues car, pour certains, il existerait une discordance entre le développement de lésions de kératose séborrhéique et la pathologie néoplasique concomitante.

Cependant, plusieurs pathologies malignes semblent associées à cette dermatose : les cancers digestifs (surtout gastriques), les lymphomes, le syndrome de Sézary ou le mycosis fongoïde. Par ailleurs, certaines pathologies infectieuses (la lèpre) ou dermatologiques (le psoriasis, le pityriasis rubra pilaire), certains états physiologiques comme la grossesse ou certaines thérapeutiques (les biothérapies) peuvent également favoriser la survenue de ce syndrome.

Cliniquement, on objective une floraison rapide et importante de formations pigmentées rattachées à l’épiderme ayant un caractère râpeux. Dans 50 % des cas, un prurit est constaté ; dans près de 40 % des cas, un acanthosis nigricans s’y associe (pigmentation cutanée généralement centrée en région cervicale) . Le plus souvent, les lésions de kératose séborrhéique sont mises en évidence au niveau du tronc (76 %) et des membres (38 %).

La prise en charge repose sur le traitement de la pathologie primitive. Les lésions régressent dès lors que l’affection en cause est stabilisée ou en rémission. 

Pour en savoir plus
Husain Z, Ho JK, Hantash BM. Sign and pseudo-sign of Leser-Trelat: case report and a review of the literature. Journal of Drugs Dermatol 2013;12(5):e79-e87.
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Molluscum pendulum

Un homme de 68 ans consulte pour une « boule » gênante depuis quelques semaines. L’examen clinique révèle une masse pédiculée de la fesse (fig. 1).
Texte

Le molluscum pendulum, ou « acrochordon », est une tumeur épithéliale bénigne. Sa physiopathologie n’est pas élucidée. Le diabète de type 2 pourrait être un facteur favorisant. Il siège plus volontiers au niveau du cou, des creux axillaires ou de la région inguinale mais peut également survenir au niveau ano-périnéo-fessier. 

Cliniquement, il prend typiquement la forme d’une excroissance le plus souvent de petite taille (fig. 2), de consistance molle, de couleur rosée ou brun foncé, comportant un pédicule dont la finesse est évocatrice du diagnostic. Généralement asymptomatique, il peut parfois s’ulcérer et être à l’origine de douleurs et de saignements. 

Les principaux diagnostics différentiels sont le molluscum contagiosum, l’hidradénome papillifère, la kératose séborrhéique, le condylome, le kyste sébacé, la thrombose hémorroïdaire externe, la marisque, le nævus bénin, plus rarement le mélanome malin, le carcinome basocellulaire, la maladie de Bowen, le carcinome épidermoïde. L’analyse histologique est utile en cas de doute diagnostique. 

Concernant la prise en charge, la destruction par électro-coagulation ou cryothérapie, voire l’exérèse, est indiquée en cas de gêne (irritation locale, préjudice esthétique).

Pour en savoir plus
Curtis JR, Hurst E, Lee M, et al. A true molluscum pendulum. Int J Dermatol 2007;46:853-4.
Gaurav V, Grover C. “Molluscum” Conditions in Dermatology. Indian Dermatol Online J 2021;12:962-5.
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Syndrome de Turner

Une patiente âgée de 30 ans est vue en consultation pour une hypothyroïdie profonde, avec un taux de thyréostimuline ultrasensible (TSHus) supérieur à 500 mUI/L. L’examen clinique objective une taille à 98 cm, un poids à 16 kg, un retard pubertaire au stade S1 P1 selon la classification de Tanner et un syndrome dysmorphique, avec un front bombé, une implantation basse des cheveux, un hypertélorisme, un cou palmé court et un écartement mamelonnaire (fig. 1 et 2). L’examen clinique met également en évidence une vulve infantile avec des lésions achromiques au niveau des grandes lèvres, faisant évoquer un vitiligo (fig. 3). 
Les explorations paracliniques révèlent un profil hormonal en faveur d’un hypogonadisme hypergonadotrope et un âge osseux de 4 ans et demi. L’étude génétique confirme le diagnostic de syndrome de Turner à l’état homogène (dysgénésie ovarienne avec phénotype féminin et caryotype 45X0). 
Un traitement hormonal substitutif thyroïdien et par hormone de croissance est débuté.
Texte

Le syndrome de Turner est une affection génétique rare, secondaire à une délétion du chromosome X. Dans la plupart des cas, il est diagnostiqué dès l’enfance au vu des diverses atteintes auto-immunes qui l’accompagnent. Ses manifestations cliniques sont, en général, le motif de consultation, en particulier le retard staturopondéral, la thyroïdite et/ou le diabète.1,2

Devant un retard staturopondéral associé à un syndrome dysmorphique chez la fille, il est nécessaire de penser au syndrome de Tuner afin d’en assurer une prise en charge précoce et ainsi éviter les complications graves, telle que l’hypothyroïdie profonde. 

Références 
1. Gravholt Ch, Viuff MH, Brun S et al. Turner syndrome: Mechanisms and management. Nat Rev Endocrinol 2019;15(10):601-14. 
2. De Sanctis V, Khater D. Autoimmune diseases in Turner syndrome: An overview Acta Biomed 2019;90(3):341-4. 
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