Dermatite de contact au nickel 

Nicole, 48 ans, consulte pour une éruption cutanée prurigineuse en région ombilicale. L’examen clinique met en évidence un placard excorié au niveau de cette zone de contact avec la boucle de la ceinture (figure).

La dermatite de contact est secondaire à une réaction d’hypersensibilisation de type retardé, favorisée par le contact entre la peau et un allergène. Ce phénomène de sensibilisation est d’autant plus important que le corps étranger responsable a un poids moléculaire faible. La sensibilisation primaire survient après contact d’une durée comprise entre deux et trois semaines.

Le plus souvent, ces réactions sont dues à des métaux (chrome, nickel), aux additifs retrouvés dans les gants et chaussures (thiurames, carbamates…) mais aussi aux conservateurs des parfums, écrans solaires, produits de beauté, colorants, additifs des vernis, etc. Le sulfate de nickel est un allergène très fréquent, notamment chez la femme (17 % de sensibilisation chez elles), présent dans les bijoux fantaisie, la mercerie classique (bouton de pantalon, fermeture éclair), les pièces de monnaie et les outils professionnels. Il existe une allergie concomitante au cobalt (famille identique dans la classification périodique des éléments). Le nickel est également présent dans certains aliments (fruits à coque, chocolat…). 

Cliniquement, les manifestations sont variables et dépendantes de la sensibilisation du patient. Le plus souvent, il s’agit d’un eczéma prurigineux limité initialement à la zone de contact. Les zones les plus fréquemment atteintes sont les mains et le visage, mais aussi les lèvres, les paupières, le dos et les pieds.

La prise en charge repose sur l’éviction de l’allergène lorsque celui-ci a pu être identifié. Il convient d’effectuer des tests épicutanés dans le cas de réactions importantes ou de doute diagnostique. Un antihistaminique peut être prescrit pour limiter le prurit, ainsi que des dermocorticoïdes. 

Pour en savoir plus
Amsler A, Aractingl S, Soria A. Hyper­sensibilités et allergies cutanéo-­muqueuses chez l’enfant et l’adulte. Rev Prat 2015;65(1):121-38.
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Encéphalite à VZV sur zona ophtalmique

Un homme de 86 ans est adressé aux urgences pour chute à domicile avec station au sol prolongée dans un contexte d’asthénie. On note un zona ophtalmique, qui a été découvert en ville, traité par valaciclovir per os. 
À l’examen clinique, le patient est fébrile, il a un tremblement d’action avec un ralentissement psychomoteur, une éruption cutanée de l’hémiface gauche avec un ptosis et une uvéite antérieure aiguë homolatéraux (figure).
Le taux de leucocytes est à 10 g/L, les neutrophiles à 8,99 G/L et la CRP à 89 mg/L. Les hémocultures reviennent stériles. La ponction lombaire met en évidence un liquide clair avec une leucocytorachie à 833/mm3, des polynucléaires neutrophiles à 15 %, des lymphocytes 55 % et une PCR positive pour le virus varicelle-zona.
Un scanner cérébral non injecté est réalisé ; il est sans particularité. 
Un traitement par aciclovir par voie intraveineuse est mis en place, ainsi qu’un traitement anti-inflammatoire local de l’œil gauche.

Le virus varicelle-zona (VZV) est responsable, lors de la primo-infection chez l’adulte immunocompétent, d’atteintes respiratoires sévères traduisant la pneumonie varicelleuse et, lors de la réactivation virale, d’une éruption cutanée vésiculeuse nommée zona. Les atteintes neurologiques sont rares chez l’adulte. 

Le zona ophtalmique est une éruption métamérique vésiculeuse de la première branche du nerf trijumeau (V1). Il est plus fréquent chez les sujets âgés. L’éruption peut siéger sur l’une des trois branches du nerf ophtalmique (frontale, lacrymale ou nasale). Les complications oculaires sont fréquentes. Les principales complications neurologiques sont les douleurs post-zostériennes (dont l’un des facteurs de risque est l’âge supérieur à 50 ans), mais d’autres complications exceptionnelles sont possibles, comme les encéphalites. Rare mais grave, ce processus aigu et inflammatoire affectant le parenchyme du système nerveux central survient généralement lors de la réactivation du virus, notamment chez les sujets âgés. Dans ce contexte, l’identification précoce de l’infection neurologique est cruciale, car elle conditionne le pronostic.

L’encéphalite à VZV peut se manifester de manière subtile, avec des symptômes neurologiques non spécifiques, comme une asthénie ou un léger ralentissement psychomoteur. Ces symptômes peuvent être facilement attribués au processus inflammatoire lié au zona ou aux comorbidités.

Les examens d’imagerie cérébrale, tels que le scanner ou l’IRM, peuvent être normaux dans les premières phases de la maladie, ce qui rend le diagnostic précoce plus difficile. Toutefois, un syndrome confusionnel, des troubles du comportement, des signes de focalisation (déficit moteur, paralysie d’un nerf crânien, aphasie, mouvements anormaux), des crises d’épilepsie focales ou des troubles neurovégétatifs sont possibles. 

La suspicion d’encéphalite virale aiguë est toujours une urgence médicale, nécessitant de réaliser une ponction lombaire et une imagerie cérébrale. Le pronostic dépend à la fois du statut immunitaire de l’hôte et de la virulence de l’infection.

Dans le cadre du zona ophtalmique, la nécessité de pratiquer une ponction lombaire, en l’absence de signes neurologiques francs, n’a pas fait l’objet d’études. Néanmoins, malgré les risques faibles mais réels liés à ce geste (infections secondaires, céphalées post-ponction, hématomes…), il doit être d’indication large en cas de suspicion d’atteinte centrale.

L’instauration précoce du traitement antiviral par voie intraveineuse est cruciale, car elle permet de réduire la mortalité et la morbidité associées à la maladie, en particulier les séquelles neurologiques. 

Le suivi des complications oculaires, notamment l’uvéite et la kératite, est également indispensable. La vaccination contre le VZV est recommandée après la phase aiguë pour diminuer les risques de récidive et le risque de douleurs post-zostériennes. 

Pour en savoir plus 
Fontenaille C, Meunier B, Ebbo M, et al. La ponction lombaire pose le diagnostic. Rev Med Intern 2019;40:A210. 
Du Pasquier R, Meylan P, Kaiser L, et al. Encéphalites virales. Rev Med Suisse 2009;201(17):968-73.  
Boitez P, Danneels P, Rocour S, et al. Deux cas d’encéphalite compliquant un zona ophtalmique. Ann Dermatol Venereol - FMC 2023;3(8),Supplement 1:A226.
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Psoriasis unguéal

Un patient de 50 ans consulte pour une visite de routine. À la poignée de main de bienvenue, l’aspect piqueté de ses ongles interpelle.
Dans ses antécédents, on note un alcoolo-tabagisme actif, une dyslipidémie non traitée et une lombalgie chronique. Il ne prend pas de traitement et son contexte de vie est stable. Les lésions unguéales sont apparues six mois auparavant et touchent également l’ongle nouvellement renouvelé (figure).
Il n’a aucune autre plainte. L’examen dermatologique ne retrouve pas d’autres particularités. Il s’agit ici d’un psoriasis unguéal isolé.

Le psoriasis est une dermatose érythémato-squameuse qui concerne 2 % de la population. Il peut atteindre -l’ensemble du revêtement cutané même s’il prédomine au niveau des coudes et genoux, de la région lombosacrée, du siège, des paumes et plantes des pieds, du bord cubital des avant-bras et des cuisses. Le visage est généralement épargné. Certaines atteintes sont davantage en faveur d’une forme sévère -associée au rhumatisme psoriasique, comme celle du cuir chevelu, des ongles ou du sillon interfessier.

L’atteinte unguéale peut prendre plusieurs formes : -dépression ponctuée, trachyonychie (ongle rugueux, décoloré, de surface hétérogène, avec des stries longitudinales et des fissures), leuconychie (ongle blanc), taches d’huile de Milian (aspect de taches d’huile sous-unguéales), hématomes filiformes. On estime que 90 % des patients suivis pour -psoriasis déclarent un jour une atteinte unguéale. Le dés-agrément esthétique est la principale plainte ; cependant, plus de la moitié des patients déclarent une augmentation de la sensibilité à la pression, causant une gêne fonctionnelle importante.

Le principal diagnostic différentiel est l’onychomycose. En cas de doute, la réalisation d’un prélèvement mycologique et/ou d’une biopsie permet de faciliter le diagnostic, même si une atteinte mixte est possible.

Sur le plan physiopathologique, l’atteinte unguéale est souvent la conséquence d’une atteinte rhumatismale par -inflammation des enthèses du doigt (tendon de l’extenseur et des ligaments latéraux) provoquant une libération de cytokines, une synovite et une atteinte secondaire de l’ongle par contiguïté. Il convient donc de rechercher systématiquement une atteinte de l’articulation interphalangienne distale par un examen clinique minutieux pouvant être complété par un bilan radiologique. 

Le traitement de l’onychopathie psoriasique ne repose pas sur un schéma thérapeutique standardisé. En cas de psoriasis cutané ou d’atteinte rhumatismale sévère, l’atteinte unguéale ne prédomine pas dans la décision thérapeutique. Le panel de traitements est vaste et il convient de proposer, selon la gravité, l’application d’émollients, de dermocorticoïdes de grade IV, voire des injections locales de corticoïdes (intra-matricielles, dans le lit de l’ongle) ou des traitements systémiques ainsi que des biothérapies. La décision de traitement est prise conjointement avec le dermatologue. 

Pour en savoir plus
Chastanier M, Villani A, Jullien D. Psoriasis - Maladie chronique invalidante, mais non sans solutions. Rev Prat Med Gen 2022;36(1072):507-11.
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Syndrome de Sneddon

Mme X, 55 ans, sans antécédents médicaux notables, consulte pour un épisode de paresthésie transitoire du membre supérieur droit et une aphasie. L’examen clinique révèle un livedo racemosa marqué au niveau des membres inférieurs et du tronc (fig. 1). L’IRM cérébrale met en évidence des lésions ischémiques multiples en territoire sylvien superficiel gauche (fig. 2). Le bilan immunologique retrouve la présence d’anticorps antiphospholipides (anticardiolipines et anticoagulants lupiques). 
Le diagnostic de syndrome de Sneddon associé à un syndrome des antiphospholipides est retenu.
La patiente est mise sous bi-antiagrégants pendant trois semaines, puis sous simple antiagrégant. Un suivi régulier est instauré et une stabilisation clinique est observée après six mois de traitement, sans nouvel épisode ischémique. Le livedo racemosa persiste, mais sans progression.

Le syndrome de Sneddon est une vasculopathie non inflammatoire touchant les petits et moyens vaisseaux. Il s’agit d’une maladie rare qui associe des lésions cutanées de type livedo race-mosa à des manifestations neurologiques d’origine vasculaire.

Le diagnostic repose sur la présence de livedo racemosa et d’accidents vasculaires cérébraux (AVC) ou d’accidents ischémiques transitoires (AIT), souvent associés à un syndrome des antiphospholipides (SAPL).1,2

Les diagnostics différentiels incluent d’autres causes de vasculopathies, comme la maladie de Fabry ou les vascularites systémiques.3

Sur le plan physiopathologique, il s’agit d’une dysfonction endothéliale et d’une thrombophilie.

Le traitement antithrombotique préventif est doublement justifié du fait de la thrombophilie4 et du SAPL fréquemment associé. Il est essentiel de dépister ce dernier précocement afin d’optimiser la prise en charge et prévenir les complications neurologiques irréversibles. Une surveillance rapprochée est indispensable afin de prévenir tout nouvel épisode et de limiter la progression des atteintes neurologiques. 

Références 
1. Samanta D, Cobb S, Arya K. Sneddon Syndrome: A Comprehensive Overview. J Stroke Cerebrovasc Dis 2019;28(8):2098-108. 
2. Beato Merino MJ, Diago A, Fernandez-Flores A, et al. Clinical and Histopathologic Characteristics of the Main Causes of Vascular Occusion - Part II: Coagulation Disorders, Emboli, and Other. Actas Dermosifiliogr 2021;112(2):103-17. 
3. Mitri F, Enk A, Bersano A, et al. Livedo racemosa in neurological diseases: An update on the differential diagnoses. Eur J Neurol 2020;27(10):1832-43. 
4. Narwutsch A, Wohlrab J, Sperfeld AD, et al. Combination therapy for Sneddon syndrome to reduce the incidence of cerebrovascular complications. J Dtsch Dermatol Ges 2024;22(7):947-54.
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Ulcérations secondaires au nicorandil

Un patient de 69 ans, fumeur, traité pour une hypertension artérielle et une cardiopathie ischémique, consulte pour des douleurs anales évoluant depuis plusieurs semaines. L’examen révèle des ulcérations de la marge (fig. 1).

Le nicorandil est un médicament vasodilatateur, activateur des canaux potassiques, utilisé dans l’angor. Sa tolérance est globalement bonne. Cependant, il peut entraîner des ulcérations dont les localisations de prédilection sont buccales, cutanées et digestives. Au niveau digestif, ces lésions surviennent parfois tardivement après le début du traitement et plus fréquemment à des doses thérapeutiques élevées. Le mécanisme serait lié à un effet local ischémique ou cytotoxique, particulièrement dans les zones cicatricielles mal vascularisées ou sensibles aux microtraumatismes. Au niveau anal, le principal symptôme est la douleur.

À l’examen clinique, ces ulcérations ont le plus souvent des bords nets et un fond propre ; elles sont uniques dans près de 80 % des cas. Elles sont parfois creusantes, avec un risque de complication infectieuse à type de fistule (fig. 2).

Le diagnostic repose sur le contexte et l’anamnèse ainsi que sur la guérison après l’arrêt du nicorandil.

L’évolution est favorable : la cicatrisation des ulcérations survient en moyenne trente jours après l’arrêt du traitement, mais peut s’étaler sur plusieurs mois en fonction de la gravité de l’atteinte et de la dose cumulée reçue de nicorandil. La reprise du traitement est déconseillée en raison du risque élevé de récidive. 

Pour en savoir plus
Toquero L, Briggs CD, Bassuini MM, et al. Anal ulceration associated with Nicorandil: Case series and review of the literature. Colorectal Dis 2006;8(8):717-20.
Babic V, Petitpain N, Guy C, et al. Nicorandil-induced ulcerations: A 10-year observational study of all cases spontaneously reported to the French pharmacovigilance network. Int Wound J 2018;15(4):508-18.
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