Quel est le point commun entre ail sous vide, conserves artisanales de carottes, tortillas industrielles et chirurgie esthétique ?
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Préparations « maison » et artisanales
Dans ce cas, les sources de contamination sont le plus souvent des conserves ou préparations artisanales ou faites maison (par exemple, en 2025, il y a eu des cas liés à de l’ail confit conditionné sous vide par un traiteur, ou encore à des carottes mises en bocal de façon artisanale). Le botulisme peut parfois venir d’aliments industriels contaminés, comme le montre le rappel récent de tortillas industrielles après 2 cas confirmés de botulisme en Bretagne.
Mais l’alimentation n’est pas la seule voie de contamination. Cette dernière peut aussi s’effectuer par injection de toxine botulique, le plus souvent dans le cadre d’interventions médicales ou esthétiques (Botox) ; on parle alors de botulisme iatrogène. En tout, 9 % des foyers et 11,5 % des cas déclarés en 2018-2024 relevaient du botulisme iatrogène, souvent dans le cadre d’injections esthétiques frauduleuses. Enfin, le botulisme infantile, qui survient par ingestion de spores qui germent dans l’intestin et entraînent sa colonisation par C. botulinum chez les nourrissons de moins de 1 an, comptait pour 15 % des foyers et 9 % des cas de botulisme sur cette période.
Quels symptômes ?
Après une incubation de 18 à 36 heures (plus la durée d’incubation est courte, plus l’affection est sévère) apparaissent des troubles digestifs (diarrhée, nausée, vomissements) et oculaires (mydriase, paralysie de l’accommodation, diplopie). L’atteinte des paires crâniennes provoque des troubles de la déglutition et une disparition du réflexe nauséeux, parfois responsable de fausses routes. Survient ensuite une paralysie ascendante des membres et du tronc, sans atteinte sensitive. Une paralysie des muscles respiratoires peut entraîner le décès. En outre, on observe une diminution des sécrétions au niveau de la bouche et du pharynx, responsable d’une dysphagie, une hypotension orthostatique et des troubles du rythme cardiaque. Une constipation persistante peut être responsable d’une occlusion intestinale.
Le botulisme infantile se manifeste de manière légèrement différente. Il se caractérise par une constipation, une anorexie, une paralysie des paires crâniennes (troubles de la vision et de l’élocution), une insuffisance respiratoire, une évolution apyrétique et une hypotonie généralisée, d’où le nom de « bébé flasque » (sloppy baby).
Quelle prise en charge ?
Le traitement du botulisme est essentiellement symptomatique et requiert, dans les formes sévères, des soins respiratoires intensifs avec ventilation assistée.
L’administration de l’antitoxine botulique dans les heures ou les premiers jours après le début des symptômes peut permettre de raccourcir le temps d’hospitalisation. La dispensation de l’antitoxine botulique se fait via une autorisation d’accès compassionnel (AAC). La demande de celle-ci s’effectue par les PUI sur la plateforme de dédiée de l’ANSM e-Saturne (https://icsaturne.ansm.sante.fr/). Le stock d’antitoxine botulique relève du stock de l’État, géré par Santé publique France. Les demandes sont traitées 24 h/24 et 7 jours/7.
Quelle prévention ?
L’hygiène alimentaire, le respect des procédés de stérilisation et des règles de préparation des conserves sont indispensables, en particulier dans les productions familiales. Une boîte de conserve bombée est très suspecte et ne doit pas être consommée. Contrairement aux spores, la toxine botulique, thermolabile, est inactivée par une exposition à une température de 85 °C durant cinq minutes et est détruite par l’ébullition pendant dix minutes.
Pour prévenir le botulisme infantile, la consommation de miel ou de sirop de maïs est déconseillée avant l’âge de 12 mois. Ces aliments peuvent, en effet, avoir été contaminés par des abeilles porteuses de C. botulinum, contracté dans la nature.
Pour ce qui est du botulisme iatrogène, l’ANSM a rappelé en février 2025 que seuls des médecins habilités peuvent acheter et administrer des produits injectables à usage esthétique : médecins spécialistes en chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique, en dermatologie, en chirurgie de la face et du cou, en chirurgie maxillo-faciale et en ophtalmologie. Si un prestataire d’esthétique l’administre à ses clients, il se met dans l’illégalité et met en danger la santé de ses clients. De la même manière, l’achat de médicaments à base de toxine botulinique est réglementé, et sa vente sur internet interdite.
Références :
Bourée P, Garedaghi Y, Bisaro F. Botulisme. Rev Prat Med Gen 2024;38(1086):193-5.
Santé publique France. Botulisme en France. Bilan 2018-2024. 30 juillet 2025.
Sante.gouv.fr. Cas suspect de botulisme : retrait et rappel d’ail confit conditionné sous vide et de préparations à tartiner vendues sur des marchés locaux ou en ligne. 22 septembre 2025.
Sante.gouv.fr. Cas confirmés de botulisme : retrait et rappel de plusieurs références de tortillas produites par Palacios (Espagne) et vendues en grande distribution sur l’ensemble du territoire. 26 septembre 2025.
ARS Pays de la Loire. Cas groupés de botulisme sur le secteur de Cholet. 17 juillet 2025.
Gérôme P. Royaume Uni : plusieurs dizaines de cas de botulisme liés à des interventions esthétiques. MesVaccins 21 juillet 2025.
Pour en savoir plus :
Popoff M-R. Botulisme, toujours présent… Rev Prat Med Gen 2018;32(1008):688-9.
Nobile C. Botox : des complications graves ! Rev Prat (en ligne) 20 mars 2025.
Martin Agudelo L. Cas de botulisme en France : quelle conduite à tenir ? Rev Prat (en ligne) 13 septembre 2024.
Nobile C. Botulisme : des cas en France (alerte DGS). Rev Prat (en ligne) 14 septembre 2023.